Comme toutes les grandes villes du monde, Tunis a, malheureusement, ses «enfants dans la rue». Leur nombre est certes réduit, mais ils sont quand même visibles dans certaines artères de la capitale. Accoutrement misérable, physique chétif et vulnérable, ils inspirent pitié et compassion. Ils proposent de menus services, comme l'essuyage des pare-brise, ou mendient quelques millimes. Leur cible privilégiée : les automobilistes qui s'arrêtent quelques instants au feu rouge. Leurs espaces de prédilection, ce sont les grandes artères et les places publiques les plus fréquentées, que ce soit par les piétons ou par les automobilistes. Et ces petits sont des cas sociaux bien à part. D'autres enfants, pourtant en âge scolaire, au lieu d'aller à l'école, vendent des objets divers, comme les mouchoirs en papier, du chewing-gum et autres crayons ou stylos. Certains accèdent aussi aux moyens de transport en commun, comme le métro, les bus et le train, où ils font le va-et-vient, criant à tue-tête pour écouler leurs produits à des prix souvent dérisoires. Un enseignement et un encadrement permanents L'un de ces vendeurs ambulants en bas âge, répondant au prénom de Sami, s'est exprimé pour tous ses «camarades» qui ont choisi très tôt de «gagner leur vie», poussés par le besoin : «Je suis obligé de travailler comme vendeur ambulant pour aider mes parents qui n'ont pas de revenu fixe et se débrouillent de leur côté pour subvenir aux besoins de la famille». Ces enfants ne sont donc pas scolarisés, bien que vivant dans un pays ayant un taux national de scolarisation proche de 100%. Pourtant, l'accès à l'école est gratuit et obligatoire pour tout enfant ayant six ans ou plus. La Tunisie a depuis toujours accordé – encore plus au cours des dernières années – une attention particulière à ces catégories vulnérables, en mettant en œuvre une politique sociale efficace pour prendre en charge ces enfants laissés pour compte et souvent livrés à eux-mêmes à cause essentiellement de la pauvreté mais aussi de l'abandon. Les pouvoirs publics font de leur mieux pour réunir ces enfants dans des centres bien équipés en vue de leur fournir un enseignement et un encadrement permanents. Pour chaque enfant, un projet d'intégration dans la vie sociale est élaboré. Mohamed, un autre enfant non scolarisé est d'accord pour accéder à un centre pour être pris en charge «à condition de revenir chaque jour chez moi pour revoir mes parents», tient-il à souligner. Ces établissements d'animation éducative et sociale, dont le nombre a atteint les 276 entre clubs et complexes de l'enfance, contribuent à assurer un épanouissement adéquat aux enfants, en valorisant leur talent et en les orientant vers les valeurs et les principes nobles, comme ceux qui ont trait à la solidarité, à l'entraide et à la coopération. Ils bénéficient également d'une prévention contre tous les dangers que peut encourir un enfant. Les cadres éducatifs de ces établissements ont droit, quant à eux, à des sessions de formation et de recyclage en vue d'améliorer leurs compétences et d'être en mesure de fournir à leurs protégés des prestations de qualité. Ces cadres sont encouragés à prendre des initiatives en vue d'adapter le contenu pédagogique et les activités de loisirs aux besoins des enfants pris en charge. Et ces petits sont de plus en plus exigeants. Ne se contentant plus de lire un livre ou de regarder sagement la télévision, ces enfants souhaitent désormais avoir leur téléphone portable, naviguer sur la toile et faire la connaissance de nouveaux amis. Pour toucher toutes les régions de la Tunisie, et leur offrir l'ensemble des activités proposées, des clubs itinérants ont vu le jour, destinés aux enfants résidant dans les zones rurales et les quartiers qui ne disposent pas de clubs sédentaires. Pas moins de 150 quartiers limitrophes aux grandes villes sont ainsi visités une ou deux fois par semaine en vue de mener des activités au profit des enfants, sous l'œil vigilant de cadres compétents. Les espaces de loisirs et de culture multidisciplinaires de ce type sont au nombre de 24.000, profitant à plus de 1.288.000 enfants. Réintégrer l'enfant dans son milieu Les efforts des différents intervenants sont conjugués dans le cadre d'un dispositif cohérent pour protéger l'enfance. Le but est d'encadrer efficacement les petits en vue de réintégrer l'enfant dans son milieu familial. C'est ainsi que l'Institut national de protection de l'enfance (Inpe) a accueilli 354 nouveaux enfants au cours des neuf premiers mois de 2009. Il a pu intégrer, en outre, 556 autres enfants sous forme d'adoption, de prise en charge ou d'insertion familiale ou au sein des villages SOS. Les 2.900 enfants pris en charge dans les complexes intégrés et les 3.259 se trouvant dans les complexes de l'enfance ont appris beaucoup de choses au bout de quelques mois, et notamment la manière de se comporter dans la société pour se prémunir contre les risques qui les guettent, en plus, bien sûr, de l'éducation et des loisirs. Quelque 5.782 requêtes sont, cependant, parvenues aux délégués de protection de l'enfance durant les neuf premiers mois de l'année écoulée. De l'ensemble de ces requêtes, 5.400 ont fait l'objet d'un traitement adéquat et de suivi, soit 93,5%. Il s'est avéré que l'abandon et l'oisiveté constituent les principaux risques pour ces enfants avec un taux de 28,3%. Autre problème rencontré : l'incapacité des parents de faire l'encadrement et l'éducation utiles (22,7%). Le juge de la famille s'occupe, lui aussi, des enfants menacés. C'est le recours en cas de défaillance. Les tribunaux de première instance ont réceptionné 2.277 cas d'enfants menacés et faisant partie de toutes les catégories d'âge. Le milieu familial inapte à l'encadrement constitue la première des menaces qui guettent ces enfants. Le juge de la famille essaye tout de même de laisser l'enfant au sein de sa famille quand cela est possible. L'enfant n'est remis à une autre famille ou confié à un centre de protection que si la situation l'exige vraiment. C'est, en tout cas, mieux que de voir ces enfants investir la rue en butte à toutes les menaces, contraints de «gagner leur vie» misérablement. Des scènes qu'on ne devrait plus voir dans nos artères surtout que notre pays a atteint des degrés élevés dans tous les domaines socioéconomiques.