BAGDAD (Reuters) — Les partisans du Premier ministre irakien, Nouri Al Maliki, ont dénoncé hier des manipulations après les dernières estimations qui donnent la liste laïque d'Iyad Allaoui très légèrement en tête en nombre de voix des élections législatives du 7 mars. Ali Al Adib, un proche du chef du gouvernement, a dit avoir été averti par des scrutateurs d'une manipulation de bulletins en faveur d'une liste rivale qu'il n'a pas nommée. L'Etat de droit (EDD), la coalition d'Al Maliki, a demandé un recomptage complet des voix à Bagdad, où son avance initiale s'est réduite au fil du dépouillement effectué par la commission électorale indépendante. "Ce n'est qu'une fois que ce recomptage aura eu lieu que nous pourrons dire si le dépouillement fait par la commission est exact ou non", a déclaré Ali Al Adib. Les responsables de la commission électorale ont répondu que le dépouillement s'était déroulé en toute régularité et que de nombreuses vérifications avaient été effectuées pour prévenir toute fraude. Globalement, seulement 9.000 voix séparent l'EDD d'Irakia, la liste d'Allaoui, alors que 80% des quelque 12 millions de suffrages ont été dépouillés. Les résultats officiels complets du scrutin, qui s'est déroulé dans des conditions honnêtes selon les Nations unies, devraient encore prendre plusieurs semaines. L'EDD d'Al Maliki est en tête dans sept des 18 provinces, mais n'a guère réussi à percer dans les régions sunnites où Irakia, qui domine dans cinq provinces, a réalisé un gros score. "Les derniers résultats partiels montrent que la lutte est serrée entre les principales listes. C'est cela qui explique les craintes et les doutes de leurs dirigeants", estime Karim al Tamimi. "Fraude systématique impossible" Soutenue en cela par les observateurs de l'ONU qui la conseillent, la commission électorale a relativisé les accusations de fraude, venues jusqu'à présent principalement du camp Allaoui. La commission a enregistré à ce jour 2.000 recours, soit moins que lors des élections provinciales de janvier 2009. "La fraude systématique est pratiquement impossible", assure un responsable occidental, en estimant que la complexité même du nouveau système électoral constitue en soi un obstacle quasiment infranchissable pour les fraudeurs en puissance. Irakia, front laïque et multiconfessionnel, s'est attiré un large soutien de la minorité sunnite désireuse de retrouver l'influence dont elle jouissait sous Saddam Hussein, renversé en 2003. En troisième position figure l'Alliance nationale irakienne (ANI), qui comprend le Conseil suprême islamique irakien (CSII), parti chiite le plus puissant et principal rival de l'EDD d'Al Maliki parmi l'électorat des provinces du Sud. Les alliances d'Al Maliki et d'Allaoui, deux vieux adversaires, devront, pour pouvoir gouverner chacune, faire alliance avec l'ANI ou avec la coalition des deux principaux mouvements nationalistes kurdes du Nord, dont l'alliance a devancé haut la main la coalition réformiste Changement. Irakia dispose d'une très légère avance sur les partis kurdes à Kirkouk, fief pétrolier que les kurdes souhaitent intégrer à leur territoire semi-autonome. L'issue du scrutin au niveau national reste incertaine car la commission doit encore procéder au dépouillement des bulletins des Irakiens de l'étranger et de ceux des militaires, des policiers, des détenus, ainsi que des patients et du personnel des hôpitaux. Les observateurs s'attendent à de longs mois de tractactions laborieuses entre tous les partis pour arriver à une coalition disposant d'une majorité de travail au parlement, d'autant que certains des alliés potentiels d'Al Maliki ne seraient pas mécontents de l'écarter.