La relation à établir entre les objectifs de développement de la région du Centre-Ouest et l'organisation à l'échelle nationale des réseaux de communication est au centre des options générales. Le Centre-Ouest a toujours souffert d'un enclavement relatif par rapport aux régions littorales du pays, bien plus urbanisées et sur lesquelles se concentre l'activité économique du pays (90% du tissu industriel tunisien et 90% des emplois industriels se concentrent sur une bande littorale d'une vingtaine de kilomètres de largeur, bien desservie par les infrastructures de transport et une connexion facile avec les marchés extérieurs). L'amélioration des infrastructures routières de la région du Centre-Ouest et de ses liaisons avec le littoral nord-est et est du territoire, en favorisant les flux d'échanges, est essentielle au développement urbain et industriel de la région, lui permettant d'accéder aux opportunités qui peuvent s'offrir notamment en termes d'investissements industriels. Des prémices existent, et nous avons pu voir des investisseurs, notamment étrangers, délaisser la région du Sahel, quelque peu saturée, pour s'implanter dans un des gouvernorats du Centre-Ouest, riches de disponibilités de main-d'œuvre et de terrains industriels à des prix bien plus abordables. La région du Centre-Ouest doit, aujourd'hui, se donner les moyens de profiter de la surcharge des zones littorales en matière d'industries manufacturières et accueillir les nouveaux investissements. Ceci suppose une nette amélioration du réseau routier principal, et en particulier le renforcement des infrastructures d'échange avec le littoral nord-est et est. La question porte, aujourd'hui, sur le type d'aménagement adéquat à retenir pour relier cette région du Centre-Ouest aux régions littorales et au réseau autoroutier national. En somme, faut-il construire une autoroute ou bien procéder à un élargissement des axes structurants du Centre-Ouest que sont la RN2, la RN3 et partiellement la RN12, et aménager ces trois axes aux normes de voies rapides ? Il faut dire qu'un certain nombre d'éléments présentés ci-dessous plaident pour un aménagement aux normes d'une route express plutôt que d'un projet autoroutier. Des investissements très lourds pour des trafics modérés Une autoroute se distingue d'une voie rapide ou voie express par un certain nombre de particularités propres, parmi lesquelles nous pouvons citer des caractéristiques géométriques de tracé et de profil permettant des vitesses de circulation relativement élevées, l'absence de croisement à niveau — l'accès et la sortie se faisant à travers des aménagements de type échangeur —, ainsi qu'une gestion des obstacles en accotement bien plus exigeante, pose de glissières de sécurité, etc. Toutefois, ces particularités ont un prix : les coûts d'aménagement d'un km d'autoroute, très variables bien entendu selon les reliefs traversés et les frais d'expropriation, peuvent être estimés pour l'autoroute du centre-ouest à environ 4 millions de dinars le km. Pour une longueur d'environ 200 km, les coûts de réalisation de l'autoroute du Centre-Ouest seront d'environ 800 millions de dinars, à prendre en charge par l'ensemble de la collectivité nationale. En revanche, pour un aménagement aux normes de voies express, les coûts au km sont estimés à moins de 2 millions de dinars, soit des économies correspondant à une enveloppe d'environ 400 millions de dinars. Cette enveloppe pourra être investie sur des projets de développement régional ayant un intérêt économique bien plus intéressant pour la région, comme la réhabilitation des routes locales et vicinales et l'aménagement et la construction de pistes agricoles et rurales, dont cette région en particulier, au potentiel agricole et hydro-agricole intéressant, à un grand besoin. Un autre projet structurant, économiquement bien plus intéressant pour cette région qu'une autoroute, on pense à titre d'exemple à un projet de transfert des excédents des eaux du Nord vers le centre du pays. Par ailleurs, les flux de trafic que connaissent les axes principaux de la région centre-ouest ne dépassent pas la limite des 10.000 véhicules par jour. Des ordres de trafic absolument non déterminants pour des aménagements de type autoroutier, qui ne peuvent s'envisager qu'à partir de flux de l'ordre de 20.000 véhicules par jour, voire plus. Contrairement à un aménagement de type autoroutier qui dessert un trafic de bout à bout, une route express dessert l'ensemble des localités traversées. Elle permet également une meilleure «irrigation du territoire», du fait d'une meilleure insertion dans le réseau routier régional dans son ensemble, composé de routes d'importance régionale et locale, ainsi que de routes vicinales et de pistes agricoles. Des efforts importants sont nécessaires aujourd'hui pour réhabiliter et renforcer l'infrastructure routière de la région et, en particulier, densifier le réseau de pistes agricoles. Ceci permettra en outre un meilleur maillage et une meilleure intégration du territoire national, ce qui est aussi au centre des préoccupations des pouvoirs publics. Comme indiqué précédemment, les ordres de trafic caractéristiques de la région ne sont pas déterminants pour un aménagement de type autoroutier. De plus, l'application d'un péage, comme il est de rigueur en Tunisie pour les autoroutes de liaisons interurbaines, marquera un effet dissuasif sur un certain nombre d'usagers, aux revenus relativement faibles et dont les gains de temps sont valorisés de façon très relative. Pour les investisseurs industriels désirant lancer un projet industriel à Kasserine ou Sidi Bouzid plutôt qu'à Sousse par exemple, ils sont plus intéressés par trouver des zones industrielles fonctionnelles et de bonne qualité dotées des commodités nécessaires, que par des gains de temps de toutes les façons marginaux.