Un public nombreux s'est rendu à l'ouverture de la 6e édition de Doc à Tunis, qui s'est tenue mercredi 20 avril, au Théâtre municipal. Une édition spéciale dédiée aux «révolutions» et particulièrement à celle de la Tunisie et qui a su faire, cette fois, dans le «grand public» et drainer, ainsi, une nouvelle audience, dépassant celle des habitués et autres cinéphiles. Et rien de plus normal, lorsqu'il s'agit de ramener des images, grand écran, sur les derniers événements qui ont secoué le pays, rien de plus normal quand la soirée est intitulée «Témoins d'une révolution». Les 30mn de retard inaugural passées, le temps d'installer tout ce beau monde et l'ouverture est officiellement annoncée par la projection de la bande-annonce de cette nouvelle édition. Le mot de présentation était assuré par deux jeunes du collectif d'organisation, nouvellement constitué. On nous explique que le facteur temps était décisif, quant à cette édition de Doc à Tunis qui a dû se plier à l'actualité (programme et organisation). Ainsi, on nous a, préalablement, annoncé beaucoup de maladresses et d'imperfections mises sur le compte de l'improvisation… Le coup d'envoi de ces témoignages filmés est donné par le court métrage documentaire SOS de Karim Belhaj. Sa caméra est allée à la rencontre, durant deux Ramadans successifs (2009-2010), d'une couche maudite du peuple tunisien, de ces gens qui vivent dans la misère la plus crue, de ces personnes délaissées par un régime oppresseur et corrompu. Le cinéaste nous livre les cris de SOS, lancés par ces personnes mais aussi par ceux des volontaires du Croissant-Rouge qui, tant bien que mal, essayent de leur venir en aide, confrontés également à ce même régime qui, durant 23 ans, a tenu en laisse toutes les associations humanitaires. 26 mn de témoignages, d'images frappantes d'une réalité exclue d'une conscience collective et qui est livrée, ici, sans hyperboles, sans violence, sans lyrisme et sans fioriture aucune au niveau de l'image. Une réalité livrée crûment mais surtout sincèrement. Karim Belhaj qui, bien qu'ayant écarté l'adjectif révolutionnaire en parlant de son film, a su appuyer là où ça fait mal et traiter ainsi, de la cause à effet, des prémices d'une révolution en gestation. S'en est suivi un extrait du film Rev'o, encore en cours d'élaboration, de Olfa Chakroun qui, selon ses mots, a choisi La Goulette comme microcosme pour parler de corruption et des spéculations de tous genres du temps de la famille Trabelsi. Son documentaire, elle le veut prêt avant juillet, pour pouvoir participer, à sa manière, aux débats électoraux. Néjib Belkadhi était également de la partie avec un extrait de 20mn, monté tout récemment, mais qui trace sa méthodologie et figure le squelette de son documentaire, également en cours de réalisation. Hors champs et coulisses, la caméra de Néjib n'a rien raté des sit-in, manifestations et autres meetings et débats politiques. N.Belkadhi ambitionne de continuer à récolter ses images jusqu'aux élections de l'Assemblée. Mohamed Ali Nahdi, de son côté, nous livre une version de 26 mn de son film (52 mn). Sorte de va-et-vient entre les impressions du cinéaste-citoyen qui consomme les images de la révolution via son écran et la réalité d'une rue en ébullition que le cinéaste (avec son collègue Mokhtar) est allé filmer. Le dernier extrait projeté est celui de Christophe Cotteret. Son film qui sera, normalement, prêt au mois de mai, parle de cette démocratie tunisienne en élaboration. Une soirée satisfaisante, mais qui n'a pas manqué (on voyait venir) de virer vers la fin au lynchage quand Khmaïes Khayati a pris le micro pour nous reparler des films. Les plus réticents ont préféré quitter la salle sans, pour autant, oublier de rappeler les anciennes sympathies politiques de ce dernier…On nous apprend que les films qui ont manqué à l'appel, ceux, entre autres, de Zran et Elyes Baccar, seront projetés dimanche prochain à la salle Le «Mondial».