Cinq ans de fermeture, de travaux et de trafics de toutes sortes... Il a vu passer les plus grands. Il a connu des heures de gloire et d'autres plus sombres. Réduit au silence depuis cinq ans, il n'a pas été homologué, malgré des travaux importants. Au départ, le Stade Zouiten a été conçu pour servir de vélodrome. On a beau chercher la date de sa construction dans les archives de la municipalité de Tunis, Aucune trace. Disons qu'il a été construit au début du siècle dernier. Les Français l'ont baptisé stade Géo-André du nom d'un sportif français tué durant la campagne de Tunisie (Seconde Guerre mondiale). Après l'indépendance et plus précisément en 1962, on l'a rebaptisé Chedly Zouiten mais sans apporter aucune modification à un stade devenu au fil des années un monument historique du quartier du Belvédère. Des interrogations. Aucune modification, disions-nous ? Pas vraiment, puisque le Zouiten a connu des travaux une première fois, en 1977 qui ont permis l'ajout de deux clôtures. Il s'est refait une beauté et même plus à l'occasion de la CAN 1994, puisque la charpente métallique a été complètement rénovée, en plus de l'installation du tableau lumineux. Pourquoi, dès lors, se rend-on compte que le Zouiten est devenu dangereux et en danger? Qui a ordonné les travaux? Qui les a faits? Combien ces travaux ont -ils coûté? Qui a vérifié l'efficacité et la solidité des travaux? Pourquoi n'a t-on pas décelé ses défauts? Autant de questions sans réponses, mais qui en disent long sur les trafics de toutes sortes sous l'ancien régime. L'affaire Zouiten aura-t-elle des suites? Laisser-aller. Au fait, le stade Zouiten a été si mal entretenu qu'il a failli s'effondrer, disparaître. Le 6 octobre 2006, il abrite la rencontre ST-USMO, la toute dernière avant que la municipalité de Tunis ne décide de le fermer le 17 novembre de la même année. Depuis, le Zouiten a été au centre d'un véritable mystère et de plusieurs supputations. On évoquait une main mise des Trabelsi sur le stade. Info ou intox ? Même après la révolution du 14 janvier, aucun ne peut confirmer cette hypothèse. A la municipalité de Tunis, si les bruits de couloir font allusion à l'intention du clan Trabelsi de mettre la main sur le parc et la piscine du Belvédère, rien de tel, concernant le stade Zouiten. Pourtant... Deux ans d'étude. Après sa fermeture en 2006, on a fallu deux années pour la municipalité de Tunis et le ministère de la Jeunesse et des sports pour effectuer les études nécessaires, débloquer les dotations et lancer les appels d'offres. Le délai des études était-il dans les normes? M. Moufid Ben Kaâbia, chargé du département de la planification et du contrôle au ministère de la Jeunesse et des Sports, nous apporte un élément de réponse : "Le Zouiten est le plus ancien stade de Tunisie. Cet édifice est bâti sur une colline, ce qui nécessite des fondations profondes. Les tests d'usage exigent du temps. En réponse à votre question, les délais des études qui ont duré deux ans sont dans les normes. Il est bon de rappeler qu'un stade de football est un espace public. Nous sommes donc tenus d' être exigeants en matière de sécurité", nous a déclaré M. Ben Kaâbia. Quant aux appels d'offres, on nous dit que les démarches ont respecté la législation qui régit les chantiers publics. On nous dit... Nous ne sommes pas sûrs. Deux ans de travaux. Le 9 janvier 2009, les travaux de rénovation du Zouiten ont démarré. Le coût est estimé à 3,9 millions de dinars. Il englobe la rénovation du réseau d'assainissement et de drainage des eaux pluviales, la rénovation des tribunes d'honneur et de presse, des gradins côté pelouse, des vestiaires et des installations électriques. La rénovation totale, quoi. Pour savoir où en sont les travaux, nous sommes allés voir M. Nabil Karoui, chef du service sport de la municipalité de Tunis. Le responsable municipal qui a pris ses fonctions le 17 décembre 2010, et qui nous a fourni des détails et en allant sur les lieux, nous avons découvert un stade complètement rénové avec une pelouse centrale opérationnelle, une annexe en gazon synthétique équipée de vestiaires, le tout flambant neuf. Une information de taille: "Les travaux sont officiellement achevés le 7 avril. Le 12 avril, nous avons envoyé un courrier au ministère de la Jeunesse et des Sports, via le gouvernorat de Tunis, pour l'homologation du stade", nous fait savoir M. Nabil Karoui. Et quand on l'interroge dans quel état est le Zouiten, le responsable municipal nous répond avec émotion : "C'est à présent un bijou architectural. Avant le démarrage des travaux, le stade était tout simplement dans un état lamentable, faute d'entretien. Un état si désastreux qu'il n'y avait pas d'autre alternative que de fermer ses portes", nous a-t-il dit. Au fait, tout a été refait ou presque : "Les travaux ont touché essentiellement les canaux d'évacuation des eaux pluviales. Tout a été remis à neuf avec, en prime, un grand réservoir d'eau à utiliser pour l'arrosage du gazon. Par ailleurs, un système d'arrosage automatique a été installé. Et puis, tous les équipements du stade ont été rénovés, notamment les installations électriques", nous a également fait savoir le chef de service sport de la municipalité de Tunis. Le stade n'est pas encore homologué ! Jeudi dernier, la commission d'homologation s'est rendue au Zouiten. Elle est composée des représentants de la municipalité de Tunis, du ministère de la Jeunesse et des Sports, de la protection civile, du ministère de l'Intérieur et de la Fédération tunisienne de football. Ladite commission a émis des réserves en matière de sécurité. Au fait, il est impératif de faire un grand nettoyage dans l'entourage du stade pour se débarrasser des déchets, résidus des travaux d'autres chantiers avoisinants, notamment des pierres à enlever. Egalement, la hauteur de la barrière de séparation n'est pas conforme aux normes de sécurité. Voilà pourquoi le stade Chedly Zouiten n'est pas encore prêt pour abriter la compétition. On ne nous dit pas tout! Derrière le grand portail du stade et sa façade qui n'a pas perdu de son charme, nous avons découvert une pelouse splendide. Sous un ciel grisâtre, les techniciens municipaux procèdent au traçage du rectangle vert. Plus haut sur les gradins, on découvre les fauteuils de la tribune d'honneur encore cachetés. Bref, le Zouiten n'attend que d'être homologué pour revivre une seconde jeunesse. Toutefois, Nabil Karoui émet un souhait: "Tous ces travaux n'auront aucun sens sans entretien. C'est vital", nous a-t-il lancé. Ce qu'on ne nous dit pas, c'est que les travaux auraient pu être mieux faits et à moindre coût. Mais personne n'a pris la responsabilité de le dire ouvertement. A titre d'exemple, les portails du stade auraient pu être rénovés au lieu d'être changés. Pourquoi principalement cette enquête? Pour répondre à une question que pose l'opinion publique depuis près de cinq ans : quand le Zouiten sera-t-il rouvert? La réponse? Elle n'est pas pour demain, car des ajustements sont encore prévus par mesure de sécurité. Il est bon de signaler que la commission d'homologation sera appelée à revenir inspecter les lieux dans les 10 à 15 jours. Et vogue la galère!