De tous les crimes, le plus abject est l'insulte faite à l'intelligence des peuples et c'est le forfait qu'a commis le dictateur déchu en avril 2000, expédiant les funérailles du «Zaïm», croyant pouvoir effacer le souvenir de Bourguiba de la mémoire du peuple tunisien. L'histoire, en juge implacable, par l'intermédiaire de la révolution, a rendu son verdict, en redonnant au «Combattant Suprême» la place qu'il mérite dans le cœur des Tunisiennes et des Tunisiens de tous âges et de toutes les conditions. En effet, malgré les dérives dues à la vieillesse et à un entourage de conspirateurs, Bourguiba a été l'un des rares leaders contemporains dont le souvenir a incarné le rêve, puis la réalité d'un peuple dont il faisait viscéralement partie. Habib Bourguiba, le tribun d'exception, le maître à penser, le pédagogue hors pair, a été aussi un homme de culture capable de citer le Coran de mémoire, puis de clamer La mort du loup dans un «français» à faire pâlir de jalousie les linguistes les plus avertis. Habib Bourguiba, le politique, bâtisseur de l'Etat tunisien moderne, le chantre de l'éducation et de la santé pour tous, l'avocat infatigable de l'émancipation de la femme, a aussi représenté la modernité, le progrès et une politique extérieure visionnaire (et qui aurait toute sa place en 2011), ce qui lui a valu l'inimitié de tous les dirigeants arabes sur qui il prend une revanche posthume éclatante. Pour toutes ces raisons, et encore une fois malgré les vicissitudes du pouvoir, «le Combattant Suprême», avec un bilan largement positif, mérite sa place parmi les plus grands de l'histoire contemporaine; aujourd'hui, mon pays, tu peux pleurer, mais aussi célébrer ton fils bien-aimé, Habib Bourguiba. Enfin, je pense qu'il est temps que la statue équestre du «Zaïm» revienne de son exil, et qu'elle retrouve la place du 14 janvier 2011, pour faire face à l'autre grand de notre patrie au bout de l'avenue : Ibn Khaldoun.