«Il faut arrêter d'avoir peur», déclare Syhem Belkhodja à son auditoire, mardi dernier, dans la salle du 4e art, lors de la séance de 20 heures de Tunis, capitale de la danse. Elle le dit pour rassurer, mais aussi pour faire patienter le public, qui a dû attendre près d'une heure, le temps que le spectacle du Théâtre municipal se termine et que ceux qui y assistaient nous rejoignent. La soirée pouvait enfin commencer. C'est le ballet de Lorraine qui invite. Née en 1978, cette compagnie est désormais une habituée du festival. Pour cette édition, elle est venue présenter deux numéros. Le premier est du New-Yorkais Stephen Petronio. Sur une musique de Blixa Bargled, ce danseur propose via «Broken man» sa vision propre du 11 septembre, une date revenue au-devant de l'actualité après l'annonce de la mort de Ben Laden. Comme l'exprime si bien le texte de présentation, «ce qui attire l'œil et touche le cœur, ce sont les brusques passages d'une immobilité quasi totale à des mouvements déchiquetés, également tendus et convulsifs d'un moment à l'autre. A la fois décisif et découragé, «Broken man» traduit une tristesse envahissante et une incertitude de la vie», le tout en six minutes, de quoi ne pas laisser indifférent. La deuxième partie est le troisième duo d'une longue pièce composée elle-même de quatre duos et intitulée «Docteur Labus». Une chorégraphie de Jean-Claude Gallotta, désormais au répertoire du Ballet de Lorraine, dirigé par Didier Deschamps. Jeune et pétillant, le duo choisi, un homme et une femme, exprime à travers des pas à la cadence soutenue des sentiments allant de la passion au rejet et de la complémentarité à la séparation. Ils investissent la scène de long en large. Les yeux ne peuvent suivre leur parade qu'à l'aide du cœur et de tous les sens. Une chorégraphie participative qui dure un peu plus d'une demi-heure, où la musique, passant de la présence à l'absence, fait d'autant mieux ressortir la nudité de ces deux corps en dialogue. «Broken man» et le morceau choisi de «Docteur Labus» ne constituent sans doute pas le meilleur du Ballet de Lorraine, mais on s'en contentera. Vu les circonstances, ce qui importe le plus c'est que le festival continue d'exister.