Situé dans le prolongement de la colline de l'Odéon, au Nord-Est du site archéologique de Carthage, le parc des Villas Romaines a offert, lundi après-midi, à ses visiteurs français entre écrivains, réalisateurs, chanteurs, comédiens et journalistes venus pour «le voyage du Jasmin», un charme bien particulier. Sur ce lieu pittoresque et envoûtant à la fois, l'ambiance était pour la première fois atypique, inhabituelle mais extraordinaire. «D'habitude, tout cet endroit surplombant le palais présidentiel était bouclé par la marée humaine de la sécurité de l'ancien président», déclare un vieil homme dans le box de la billetterie. Les visiteurs ont pris tout leur temps pour déambuler et admirer le site, et les cameramen pour choisir leurs plans au beau milieu des jardins enchanteurs et des paysages grandioses. Redonner vie aux pierres agressées par le passé Livrant chichement ses merveilles, dont le visiteur, jadis pressé de passer, ne gardait aucun souvenir, le parc a ouvert ses portes pour une escapade spatio-temporelle au cœur de ce carrefour des civilisations romaine, carthaginoise, byzantine et arabo-musulmane. «C'est, à mon avis, le sens profond du tourisme culturel», avance le ministre de la Culture M. Azdine Beschaouch. Très ému, il ajoute : «C'est à travers ce genre d'opération qu'on devrait exploiter désormais la splendeur d'antan au grand bonheur des Tunisiens et des étrangers, pour redonner vie à ces pierres dans ce joli écrin agressé par le passé, comme si c'était un péché, car interdit d'y toucher». Citant l'exemple du «Louvre», ouvert aux cérémonies et aux fêtes, le ministre fait observer que l'absence de telles actions et concepts nouveaux donnait, auparavant, une image incomplète de cette terre tunisienne et de ses étonnants contrastes. Et «si cette opération se fait deux ou trois fois par mois, je peux vous assurer que les recettes contribueraient largement à résoudre un problème majeur dans notre pays, celui de l'emploi». Le tourisme n'est pas de l'hôtellerie Préparée depuis deux mois et demi avec l'appui du réalisateur français Alexandre Arcady, cette opération de charme, la première en son genre, «ne devrait pas pour autant être la dernière», explique le ministre du Commerce et du Tourisme, M. Mehdi Houas. Sur ce parc témoin de 3000 ans d'histoire, «Carthage, qui fut détruite sept fois, ne devrait pas l'être une huitième fois», déclare-t-il. En effet, «le voyage du Jasmin» n'est en fait qu'une opération pour dire que «le tourisme n'est pas de l'hôtellerie, comme c'était le cas auparavant». Aujourd'hui, de nouvelles idées s'imposent non seulement pour la gestion des objectifs, mais aussi la gestion des opportunités idéales pour changer la donne en repensant le concept de tourisme culturel, ainsi que ses modalités structurelles, à la lumière d'un nouveau contexte social, économique et politique. Ce que le jour doit à la nuit sera tourné en Tunisie Pour sa part, le réalisateur et metteur en scène français, Charles Berling, a exprimé sa disposition à consacrer dans le cadre d'un festival théâtral à Toulon «une semaine pour la Tunisie», sachant que ce neveu du critique littéraire, Raymond Picard, est chargé, aux côtés de son frère, le metteur en scène Philippe, de la direction du Théâtre Liberté dont l'inauguration est prévue en juin 2011. Parmi les personnalités françaises qui ont participé à cette opération de soutien et d'amitié à la nouvelle Tunisie, on compte le réalisateur français, Alexandre Arcady, qui a déclaré qu'il sera bientôt en Tunisie pour donner le premier tour de manivelle de son prochain film Ce que le jour doit à la nuit, d'après le roman de Yasmina Khadra. Très discret à ce sujet, il se contente de ces quelques propos : «C'est le premier film français qui sera tourné après la révolution en grande partie en Tunisie, mais aussi en Algérie et à Marseille. Le film se situe dans l'Algérie des années 40-62 et décline cette page de l'histoire tumultueuse et fraternelle». Et d'ajouter: «Je suis très heureux d'y revenir, car je suis très optimiste malgré les soubresauts sécuritaires. La Tunisie est comme un jeune enfant qui apprend à marcher, quelquefois il trébuche, mais il se remettra debout pour marcher». Il semblerait qu'il y ait quelque chose «Habituées des plus grands palaces du monde, aucune parmi ces personnalités ne s'est plainte du couvre-feu décrété le jour même de leur arrivée le 7 mai 2011», a tenu à préciser le ministre du Tourisme. D'ailleurs, confirme le chanteur Patrick Bruel : «Malgré le couvre-feu, l'ambiance au Café Sidi Chabaâne à Sidi Bou Saïd, où on a chanté dimanche les airs nostalgiques d'Au café des délices, était plus qu'émouvante». Déterminé à terminer au plus vite son album pour revenir chanter en Tunisie, Patrick Bruel n'a pas pu garder avec son sourire malicieux, le secret d'une éventuelle chanson sur la révolution tunisienne, se contentant de dire «il semblerait qu'il y ait quelque chose». Boujnah, l'année prochaine à Tunis Et pour un coup d'essai, ce fut un coup de maître. Le récit continue avec un autre témoignage, celui de Michel Boujnah, qui s'est déclaré prêt à revenir en Tunisie l'année prochaine, pour un spectacle au Théâtre municipal de Tunis, dont les recettes iraient à un projet artisanal dans des régions intérieures de la Tunisie, et non dans les grandes villes. Après une absence de huit ans — qui ne relève pas du hasard—, précise-t-il, Michel Boujnah n'as pas pu avouer ses erreurs, ni son manque de courage pour dire «ce que tout le monde savait à propos du délire autour, notamment, de la corruption». «Aujourd'hui j'essaierais d'être présent dans ma terre natale chaque fois qu'on me le demande, rien que pour cette jeunesse qui a eu, elle, le courage de le faire et à la mémoire de mon père qui aurait été excessivement heureux de voir cette nouvelle Tunisie». Smaïn à Sousse et à Sfax Au beau milieu de cette ambiance conviviale et décontractée, l'humoriste Smaïn n'a pas, lui non plus, manqué de relever que sa visite en Tunisie avait, cette fois, une tout autre dimension, celle de redonner à ses compatriotes français le goût de revenir en Tunisie où la beauté des sites et l'accueil chaleureux de son peuple sont les principaux atouts. Pour donner l'envie de rire au peuple tunisien, la présence de Smaïn au festival du rire lors de deux soirées, les 17 et 18 mai à Sousse et à Sfax, est pour lui, une manière de témoigner son amour à cette Tunisie qui change, faisant observer que la solidarité entre tous les Tunisiens est vraiment le maître mot pour le renouveau du pays.