Dans un contexte international caractérisé par la raréfaction des ressources énergétiques et une dégradation des ressources naturelles, le souci environnemental a fini par occuper une place de choix au centre des priorités de développement identifiées à l'échelle internationale. C'est dans ce cadre qu'on peut situer le développement de nouvelles énergies renouvelables qui sont à la fois inépuisables et non nuisibles à l'environnement. Une réflexion collective a, en effet, démarré, depuis quelques années autour de l'identification et du développement de nouvelles énergies alternatives et on a, alors, commencé à parler de plus en plus d'énergie solaire et d'énergie éolienne, toutes deux produites grâce à un élément naturel et non polluant. La Tunisie, pays qui bénéficie d'un taux d'ensoleillement favorable au développement de l'énergie solaire, a été l'un des pays qui ont investi dans ce type d'énergie et a consacré, pour ce faire, un ensemble d'actions et de projets. La bilan énergétique national, qui a affiché depuis l'an 2000 un début de déficit, a motivé le choix de la Tunisie de mettre en place, depuis 2005, un programme national de maîtrise de l'énergie et le développement des énergies renouvelables pour réduire la consommation énergétique de 20% à l'horizon 2011 et de 40% à l'horizon 2030. Ces efforts ont permis à la Tunisie de se positionner en bonne position (vingtième à l'échelle mondiale) parmi les pays où l'énergie solaire est la plus développée. Dans un premier temps, la Tunisie a lancé un programme pour promouvoir et développer l'énergie solaire thermique exploitée pour le chauffage et n'a pas tardé, suite au succès enregistré dans le secteur thermique, à se lancer dans le solaire photovoltaïque pour produire de l'électricité. Démarré en 2005, le programme Prosol thermique a touché dans un premier temps le secteur résidentiel; le grand succès enregistré dans ce cadre a motivé l'élargissement de l'utilisation de cette énergie dans les secteurs tertiaire et industriel. M. Moncef Njeïmi, directeur de Prosol thermique à l'Anme (Agence nationale de maîtrise de l'énergie), relève que l'Etat tunisien, à travers l'Anme, a mis en place un programme ambitieux de promotion des chauffe-eau solaires (CES), un programme qui, précise-t-il, aurait permis de changer d'échelle dans la filière du solaire thermique, d'autant plus que «l'Anme a capitalisé depuis 20 ans une expérience dans ce domaine, fait qui lui a permis de mettre en place les modalités pratiques et la stratégie la plus appropriée pour réussir ce programme». Il s'agit, notamment, de la mise en place d'un cadre réglementaire et incitatif favorable au développement des énergies renouvelables et notamment de l'énergie solaire et la mise en place d'un code d'investissement propice pour le développement des énergies renouvelables. Un Fonds national de maîtrise de l'énergie (FNME) a, également, été créé; il offre des ressources stables pour le financement du soutien public à la filière et encourage les investissements dans une industrie locale de CES. M.Njeïmi relève, par ailleurs, que l'expérience tunisienne a montré que le développement du marché des CES ne pouvait se faire correctement et de façon pérenne sans mesures spécifiques relatives aux aspects financiers, institutionnels, organisationnels et qualitatifs. Ainsi, l'Anme a-t-elle prévu, dans le cadre du programme Prosol, des incitations financières qui concernent la suppression des deux principales barrières que peut rencontrer le consommateur final, en l'occurrence la lourdeur de l'investissement initial et le temps de retour élevé en comparaison avec les autres technologies conventionnelles. Ainsi, le mécanisme financier Prosol prévoit l'octroi d'une subvention publique à travers le Fnme pour chaque achat de CES et l'octroi au consommateur d'un crédit remboursable sur la facture d'électricité sur une durée de cinq ans. Sur le plan institutionnel, le programme Prosol implique la participation des acteurs majeurs directement ou indirectement concernés par le programme, notamment l'Anme qui assure la coordination entre les différents partenaires, la Steg qui assure le recouvrement des crédits octroyés, les banques qui octroient les crédits aux consommateurs et d'autres institutions et organismes qui interviennent dans certaines activités relatives au programme. Par ailleurs, la promotion de la qualité des installations solaires étant un objectif central du programme Prosol, plusieurs mesures ont été prises dans ce sens; il s'agit, entre autres, de la mise en place d'un cahier des charges d'éligibilité des fournisseurs et d'agrément des CES, l'instauration d'un système de visites de contrôle des installateurs et des fournisseurs, l'élaboration d'un guide pratique d'installation des chauffe-eau solaires individuels, la création d'un laboratoire national qui œuvre à tester les performances thermiques des CES, leurs performances mécaniques ainsi que leur durabilité, la formation continue des installateurs afin d'améliorer leur compétence, la mise en place d'un programme de qualification Qualisol pour ces installateurs… Notre interlocuteur précise que le programme Prosol, grâce notamment à tous les mécanismes mis en œuvre pour en optimiser l'impact, a permis de créer un vrai changement d'échelle dans le marché des chauffe-eau solaires, précisant que les indicateurs de développement de ce marché ne cessent de progresser au fur et à mesure de l'avancement du programme. Ainsi le rythme annuel moyen de capteurs installés se situe, depuis 2008, autour de 80.000m2 contre une moyenne annuelle de 7.000m2 avant le démarrage du programme. L'évolution du marché des CES en Tunisie a, par ailleurs, engendré une augmentation de l'offre, et on compte, désormais, 42 fournisseurs éligibles dont 9 fabricants locaux, 1.100 installateurs agréés contre 200 avant le démarrage de Prosol. En outre, le programme Prosol s'est accompagné d'un développement du tissu des fabricants locaux de CES et a notablement favorisé la création d'emplois dans la filière. La réussite de Prosol dans le secteur résidentiel a motivé l'adaptation du programme au secteur tertiaire, et ce, depuis 2008. Les cibles de ce programme sont principalement les hôtels, les collectivités locales et autres institutions publiques… Au cours de la période 2009-2010, 7.000 m2 ont été réalisés dans le secteur tertiaire et ont concerné 12 hôtels. Des projets pilotes sont en cours pour la solarisation des piscines municipales couvertes et des bains maures. S'agissant de l'utilisation de l'énergie solaire thermique dans le secteur industriel, des études sont en cours pour mettre en place les mécanismes financiers réglementaires et organisationnels appropriés. Les indicateurs positifs enregistrés depuis le démarrage du programme Prosol laissent à prévoir un avenir meilleur de la filière solaire et ont déclenché des objectifs encore plus ambitieux; c'est à ce propos que le plan solaire tunisien a été mis en œuvre à partir de 2010, un plan qui prévoit la réalisation d'une dizaine de projets énergies renouvelables couvrant la production d'électricité par des ressources renouvelables avec une puissance globale de 700 MW en 2016, principalement à travers l'éolien et le solaire ainsi que le développement du chauffage de l'eau par l'énergie solaire, et ce, par la mise en place d'une surface additionnelle de 600.000m2 de capteurs solaires. M.Njeïmi précise, à ce propos, que l'objectif du programme solaire thermique est d'atteindre, à l'horizon 2016, une surface totale de capteurs solaires de 1 million de m2 dont 420.000 m2 ont déjà été réalisés ( principalement dans le secteur résidentiel), 520.000 m2 qui seront réalisés dans le secteur résidentiel et 60.000m2 dans les secteurs tertiaire et industriel.