Par notre envoyé spécial Abdel Aziz HALI Au cœur de la capitale du Pays de Galles, dans les terres celtes du Royaume-Uni, rayonne un château médiéval unique dans son genre, composé d'un somptueux manoir victorien aux intérieurs spectaculaires avec une sublime touche architecturale qui porte l'empreinte néo-gothique de l'excentrique architecte William Burges. Ce large domaine transformé à partir d'un donjon normand et érigé sur un fort romain est le château de Cardiff, dont l'histoire remonte à plus de 2000 ans. La Presse vous fait découvrir ce magnifique site qui, à l'image du Palace de Buckingham à Londres, il est classé «Grade I Listed Building»* et représente avec la Baie de Cardiff ainsi que son opéra l'une des attractions touristiques de Caerdydd (Cardiff en gallois). Le donjon normand Selon le guide des lieux, l'histoire date de plus de 2 000 ans (l'an 55 avec J.C.) lors de la conquête de la tribu des Silures, depuis l'arrivée des Romains. Il peut y avoir eu au moins deux forts romains sur le site. De la fin du IIe siècle au milieu du IIIe siècle, le lieu était occupé par des bâtiments municipaux dédiés au travail des métaux. Quant au donjon de pierre, il date de la conquête normande (XIIème siècle). Il a été construit sur une motte élevée sur le site d'une castra romaine, et découvert lors de la troisième campagne de construction du marquis de Bute. Le donjon normand, dont la coquille est restée intacte, a été construit probablement en 1091 par Robert Fitzhamon, seigneur de Gloucester et conquérant de Glamorgan et ce après la tentative avortée de Robert Curthose, duc de Normandie et fils aîné de Guillaume le Conquérant, de prendre l'Angleterre de Henri le Premier. Notons que Robert de Normandie y a été emprisonné jusqu'à sa mort en 1134. Ensuite, le château a été reconstruit en pierre. Jusqu'au XVIIIe siècle, le château fut la propriété de nombreux nobles tels les Marcher Lords, de Clare, la dynastie Despenser, les comtes de Warwick Beauchamps, etc. Le manoir victorien : une merveille de l'architecture néo-gothique Dès le début du 19e siècle le château a été agrandi et remodelé dans un style néo-gothique, par Henry Holland à la demande de John Crichton-Stuart, 2e marquis de Bute. En 1868, John Crichton-Stuart, 3e Marquis de Bute, décrit comme l'homme le plus riche du monde, entreprit des travaux dans le château en s'appuyant sur le savoir-faire de l'excentrique architecte William Burges, passionné du Moyen-âge, qui avait l'habitude de se promener en tenue médiévale avec un perroquet sur l'épaule qui procéda à travers une reconstruction massive à transformer le château en un joli palais médiéval. Son imagination, son érudition, ses talents architecturaux et décoratifs, son inventivité et sa bonne humeur ont fait du château de Cardiff «le plus réussi de tous les châteaux de rêve du XIXe siècle». En effet, il transforma les salles du château en un magnifique bâtiment avec des intérieurs exotiques. Le marquis mit toute sa fortune dans ce projet. Et le résultat est à couper le souffle, selon les dires du guide des lieux. «Les salles des tours gothiques sont dotées d'une décoration riche et somptueuse : peintures murales, marbres, dorures, vitraux… témoignent aujourd'hui de l'époque victorienne. Chaque salle, d'une beauté sans pareille, est consacrée à un thème (gothique, arabe et grec). Et vous pouvez y découvrir aussi : la Tour du Client, la Tour horloge, le salon arabe, la salle de Chaucer, la pépinière, la bibliothèque, la salle des banquets et la chambre du Marquis dont le plafond est couvert de 199 miroirs positionnés de façon à tous refléter le nom Bute écrit en grec. Une salle à manger avec une table laissant passer en son centre une vigne, permettant ainsi aux convives de se servir directement de grappes fraîches. Un jardin italien sur le toit du château. Un fumoir avec une magnifique décoration arabe. Et plein d'autres pièces plus belles les unes que les autres… Ainsi, William Burges a réussi à créer de la richesse et de la fantaisie dans les intérieurs du manoir qui ont rarement été égalées. Selon les historiens, le château de Cardiff reste bel et bien le dernier chef-d'œuvre de la grande architecture néo-gothique et ses intérieurs sont l'une des plus magnifiques». « Une richesse étouffante » Depuis le parc, les cinq tours des appartements apparaissent en forme d'enfilade dont la finalité n'est autre que de produire l'effet d'un horizon garni de foule bigarrée et embellie par l'ambiance romantique de l'époque victorienne, comme l'atteste la réflexion du professeur Mordaunt Crook en qualifiant les lieux comme suit : «Au château de Cardiff, le lys souffre d'un excès de dorures.. La richesse étouffante était le but suprême de ce délice architectural. Les chambres aux allures de capsules de fiction nous embarquent tels des tapis volants aux royaumes de fées : les royaumes de l'or. En effet, dans le château de Cardiff nous pénétrons dans un pays des rêves». Le château de Cardiff est extraordinaire. Mais est-il unique? Mordaunt Crook soutient qu'il n'y a rien de semblable dans l'Angleterre victorienne avec un tel exotisme obsessionnel. «Château d'Alton, Eaton Hall, Carlton Towers, Alnwick, Peckforton, n'ont aucune approche de la Sublime Burgesian. Et aucun n'a des intérieurs comparables à ceux du château de Cardiff. Il est tout simplement incomparable et inégalable. Sa silhouette incarne l'horizon de la capitale du Pays de Galles. Ainsi, le rêve d'un grand mécène et celui d'un grand architecte est presque devenu le symbole de toute une nation». Enfin, il reste à signaler que les maîtres des lieux offrent aux visiteurs du site l'opportunité de bénéficier des béatitudes d'un centre d'interprétation, avec exposition et film de présentation sur l'histoire du château. Sans parler d'une visite guidée audio du parc du château, de ses remparts et du donjon ainsi que les appartements spectaculaires et le musée du soldat gallois tout cela en compagnie d'un guide expert. A noter que la visite est gratuite pour les détenteurs du British Heritage Pass sinon l'entrée est à 11 livres sterling ! * Grade I Listed Building : C'est un grade de classement utilisé au Royaume-Uni visant à répertorier les bâtiments qui présentent une architecture spéciale ou atypique avec un important intérêt historique. Il s'agit d'un statut largement utilisé et appliqué à environ un demi-million de bâtiments.