Plus d'un million de Syriens ont manifesté hier contre le régime de Bachar Al-Assad, principalement à Hama et à Deir Ezzor, mais quatre civils ont été tués dans la dispersion de rassemblements à Alep, Homs et près de Damas, ont annoncé des militants. Plus de 1,2 million de personnes ont manifesté à Hama (Centre) et à Deir Ezzor (Est), selon Rami Abdel Rahmane, chef de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (Osdh). "A Deir Ezzor (près de la frontière irakienne), ils étaient plus de 550.000 à la fin de la manifestation, et à Hama, ils étaient plus de 650.000", a-t-il assuré, précisant que les forces de sécurité étaient absentes dans ces deux villes. La télévision publique syrienne a démenti une telle mobilisation, affirmant que seulement 2.000 personnes avaient participé à la manifestation à Deir Ezzor. Les restrictions à la circulation imposées par les autorités syriennes n'ont pas permis de vérifier ces informations de manière indépendante. Selon M. Abdel Rahmane, les manifestants ont scandé des slogans contre le régime et exprimé leur solidarité avec les villes assiégées par les forces de sécurité, en particulier Homs (Centre), théâtre de violences meurtrières depuis une semaine. Les violences n'ont d'ailleurs pas cessé dans cette ville à laquelle la mobilisation était dédiée hier. "Un manifestant a été tué par les tirs des forces de sécurité qui ont dispersé une manifestation dans le quartier Al-Khalidyé" à Homs, a annoncé Abdel-Karim Rihaoui, chef de la Ligue syrienne des droits de l'Homme (Lsdh). En outre, "un manifestant a été tué par un coup de couteau devant la Mosquée Amné à Alep (Nord) par des milices pro-régime qui ont pénétré dans la mosquée et attaqué les fidèles", a précisé M. Rihaoui, faisant état de dizaines de blessés et d'interpellations. A Mleiha, dans la province de Damas, "deux manifestants ont été tués par les tirs des forces de sécurité, et d'autres ont été blessés", a affirmé M. Abdel Rahmane. M. Rihaoui a aussi mentionné des tirs des forces de sécurité qui ont fait plusieurs blessés à Idleb (Nord-Ouest). Mobilisation dans la capitale A Damas, où seize manifestants avaient été tués le vendredi précédent par les forces de sécurité, des milliers de militaires ont été déployés tôt hier matin, isolant de quartier de Roukn Eddine où vit une importante communauté kurde. Des milliers de personnes ont cependant manifesté dans la capitale après la prière hebdomadaire. Ils étaient environ 5.000 dans le quartier Midane et des milliers d'autres sont sortis de trois mosquées du quartier Hajar Al-Assouad en scandant des slogans réclamant la liberté. A Douma, une localité à 15 km de Damas où les communications téléphoniques et l'électricité étaient coupées selon un militant, les forces de sécurité quadrillaient le marché et la place de la Grande Mosquée. "Beaucoup d'habitants ont quitté la localité de crainte d'arrestations arbitraires", selon l'Osdh. Des centaines de manifestants ont défilé dans les localités kurdes du gouvernorat d'Hassaké (Nord-Est), ainsi qu'à Soueida (Sud) et plus de 12.000 personnes ont manifesté à Idleb (Nord-Ouest), selon des militants. "Nous ne nous tairons pas sur la servilité, ni sur l'injustice, ni sur le despotisme, quel que soit le prix", ont scandé des jeunes manifestants à Jablé, sur la côte. A Deraâ (Sud) où est née la contestation contre le régime du président Bachar Al-Assad le 15 mars, des agents de sécurité étaient déployés autour des principales mosquées mais "des jeunes ont défilé dans la rue Al-Koussour et des tirs nourris ont été entendus", a déclaré M. Abdel Rahmane. A Homs, en dépit des intenses opérations sécuritaires de ces derniers jours, "des milliers de personnes ont défilé dans plusieurs quartiers", a-t-il ajouté. Hommage à Homs Dans leurs appels à manifester, comme chaque vendredi, contre le régime, les militants de la page Facebook "Syrian Revolution 2011" avaient dédié la journée à Homs, où la répression a fait plusieurs dizaines de victimes civiles cette semaine. Dans cette ville, la troisième du pays, les forces de sécurité ont abattu deux civils jeudi dernier, tandis qu'au moins 50 autres ont péri entre samedi et mardi, touchés par des tirs de l'armée lors de funérailles ou tués dans des affrontements entre opposants et partisans du pouvoir, selon des militants. Dans un communiqué, les Comités de coordination de la Révolution syrienne, qui chapeautent les manifestants, ont mis en garde contre les tentatives du régime syrien d'"attiser" le confessionnalisme. "Le régime criminel au pouvoir en Syrie va continuer de provoquer les dissensions confessionnelles. Il planifie des assassinats et des explosions de voitures devant des écoles et autres dans différentes régions, visant des communautés particulières", dénonce le communiqué. "Le régime va continuer d'armer certains habitants de la communauté alaouite (à laquelle appartient M. Al Assad), en leur faisant croire qu'ils sont menacés par les autres communautés", ajoute-t-il.