Le festival de la Médina a entamé sa marche ramadanesque samedi, avec un concert assuré par la chanteuse Syrine Ben Moussa au Théâtre municipal de Tunis. Musicienne et musicologue, la jeune interprète travaille sur ce riche legs qui lie le Maghreb et l'Espagne, en intégrant au "malouf" et ses dérivés, des sonorités andalouses et latino. Un brassage qui semble, au préalable, alléchant mais qui a manqué, avant-hier, terriblement de goût… «La Tunisie chante la liberté» est l'intitulé—désormais éculé, tant tout le monde en use et en abuse sans à-propos—, de son spectacle; un hommage qu'elle rend aux derniers événements qui ont secoué le pays. «Tout en gardant mon aspect maghrébin, je vais rendre hommage, à ma manière, à la révolution tunisienne», a-t-elle affirmé, dans ce sens. Et c'est justement la manière qui a manqué ce soir là… En effet et hormis le bel effort vestimentaire et capillaire (elle était belle et élégante), on a eu, malheureusement, droit (après un retard de 40 mn) à un manque de clarté vocale, à une présence-absence scénique, à des paroles étouffées, comme ravalées, que l'on a eu du mal parfois à distinguer. Le mélange des langues, dans quelques titres, n'arrangeant pas les choses, cela a fini par engendrer une sorte d'idiome hybride entre l'arabe et l'espagnol, qu'apparemment seule Syrine semblait comprendre (enfin, peut-être)! Ajoutons à cela des notes inachevées et une voix effacée (parfois inaudible), malgré la performance maîtrisée des brillants musiciens qui l'accompagnaient (piano, violon, qanun, nay, violencelle, percussions). Le public, venu pourtant nombreux pour célébrer la 29e édition du festival de la Médina, a fini progressivement par se déconnecter et les applaudissements (hormis ceux de quelques-uns) se sont fait de plus en plus discrets. On peut constater que la volonté y était, celle de rendre un bel hommage à la Tunisie à travers la nouvelle chanson Ya Tounès, à ses martyrs à travers son autre nouveau morceau Ma tibkich, aux femmes libres avec un bouquet de chansons tunisiennes. De bonnes intentions, et dans les thématiques et dans l'interprétation, aussi. Syrine n'a pas manqué de nous offrir, également, des «waslat» andalouses, des reprises de chansons connues telles que Chante la guitare, Ya rayah (Rachid Taha) et La foule, une chanson d'Edith Piaf. Mais voilà, la prestation ne nous a pas marqués outre mesure, parce que franchement insipide. Il va lui falloir faire mieux que cela pour parvenir à convaincre un public de la Médina, réputé exigeant, et espérer s'imposer en tant qu'interprète.