D'après une étude effectuée par l'Institut arabe des chefs d'entreprise (Iace) et rendue publique en juin dernier sur "le tourisme en Tunisie : constat du secteur, défis et perspectives", la Tunisie maintient son niveau en termes d'arrivées et de parts de marché, mais accuse en même temps, et surtout depuis 1999, une perte de compétitivité par rapport à d'autres destinations dont la croissance est plus rapide. L'étude, menée de façon à connaître les véritables tendances du secteur, affirme que les recettes touristiques tunisiennes apparaissent comme particulièrement faibles en comparaison avec les destinations concurrentes et tout particulièrement avec le Maroc, ce qui indique qu'elle se situe sur des marchés faiblement rémunérateurs. Depuis les événements du 11 septembre, le secteur n'est pas parvenu à retrouver le niveau d'activité qui était le sien en 2001. Malgré la grande révolution historique que connaît la Tunisie, ce grand événement ne semble pas parvenir à doper les nouvelles arrivées de la saison 2011. l'étude parle aussi de la crise vécue par le tourisme tunisien et, en particulier, de l'industrie hôtelière est plus profonde qu'elle ne paraît. Cette crise n'est pas conjoncturelle, "elle trouve ses racines dans le schéma global de développement sectoriel adopté depuis quelques décennies déjà", notent les résultats de l'étude. Et même si la place de l'hôtellerie reste importante au sein de l'économie nationale, elle est en perte de vitesse comparativement aux autres secteurs d'activité comme les autres services, les industries mécaniques et électriques, la chimie et les industries diverses, puisque sa contribution à l'effort de création de richesses supplémentaires marque un essoufflement évident. Par ailleurs, l'enquête relève une faiblesse très apparente des prix moyens par lit loué, comparativement à ce qui est en vigueur dans les pays concurrents du bassin méditerranéen. "L'écart est de 1 à 5 entre la Tunisie et la Turquie, et de 1 à 3 entre la Tunisie et le Maroc", notent les chiffres avancés. Autre entrave à la croissance du secteur, les flux de crédits contractés annuellement pour financer les investissements et la croissance ce qui a fortement endetté les hôtels. Ces derniers "ont fini par accumuler un encours d'endettement vis-à-vis du système bancaire relativement important". Il est à signaler, par ailleurs, que "la restructuration de l'industrie hôtelière devra s'inscrire dans deux axes principaux et indissociables l'un de l'autre. Le premier envisage l'assainissement immédiat de la situation financière de l'activité hôtelière afin de préserver ses acquis ; son potentiel d'emploi et son courant de recettes en devises". Aussi, et en ce qui concerne l'offre d'hébergement touristique et plus particulièrement l'examen de l'évolution de l'offre de service par le secteur, l'enquête fait ressortir "une croissance rapide de la capacité d'hébergement soutenue par un effort constant de l'Etat pour la mise en place d'une infrastructure moderne et une panoplie de mesures et d'incitations fiscales et financières. l'offre en hébergement a connu une croissance rapide et régulière depuis le début du développement touristique de la Tunisie. La croissance a été très forte jusqu'au début des années 90, après quoi on assiste à un ralentissement de l'augmentation de la capacité. Le nombre de lits moyen par établissement a très fortement augmenté jusqu'aux années 90, mais depuis, il s'est ralenti jusqu'en 2000, pour demeurer stationnaire. Cette augmentation de la capacité par unité correspond en réalité à une demande des tour-opérateurs qui exigent des capacités minimales par zone touristique". Une évolution qui s'est faite en parallèle avec l'élévation de la catégorie des établissements hôteliers. Un second constat a également été mentionné par cette enquête : les hôtels classés dominent largement. Ces derniers représentent près de 90% de la capacité d'hébergement, alors que les autres établissements se répartissent comme suit ; 5% en villages de vacances et hôtels non classés et 0,6% en pensions de famille. la conclusion serait donc que "la Tunisie se trouve donc dans la situation d'un hébergement monotype". Il a été, par ailleurs, constaté que l'hôtellerie progresse, tandis que la capacité-lits des villages de vacances stagne. "La régression de l'hôtellerie non classée correspond à l'élévation générale du niveau de gamme des hôtels tunisiens", assure l'étude. D'autres constats concernant l'évolution de la demande touristique montrent "un essoufflement certain au cours des dernières années...Cet essoufflement témoignerait du net recul du produit touristique de base du tourisme tunisien constitué par des séjours de moyenne gamme en bord de mer, mais également de la sensibilité de ce produit à la conjoncture extérieure, notamment les événements du 11 septembre 2001 aux USA et d'El ghériba en 2002, et la crise économique de la fin de la décennie". L'enquête s'est aussi intéressée à plusieurs autres volets, comme l'évolution comparée des arrivées des touristes méditerranéens, la contre-performance de la Tunisie en termes de recettes internationales, les performances macroéconomiques de l'activité hôtelière, l'évolution et la structure des recettes en devises, ainsi que d'autres faiblesses du secteur comme la faiblesse des prix par nuitée, le seuil de rentabilité rarement atteint, la faiblesse relative du taux d'épargne, le lourd fardeau de la dette...L'enquête réalisée par l'institut arabe des chefs d'entreprise présente même des conclusions et des recommandations. l'une des plus importantes constatations est que les acteurs de l'industrie hôtelière tunisienne ont continué à miser sur le créneau monoproduit «soleil, plage» à caractère purement saisonnier ...les hôteliers tunisiens n'ont pas su s'adapter à une nouvelle donne et aux nouvelles perceptions du voyage. Plusieurs propositions sont, par ailleurs, proposées, comme la poursuite et la consolidation de l'action de diversification des produits, l'accompagnement du secteur dans son action pour développer le tourisme de croisière et de santé, le repositionnement de l'image de la Tunisie pour l'éloigner de l'image d'une destination à bas prix...