Par Mohamed Ridha BOUGUERRA L'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) s'est déjà imposée à tous les acteurs politiques de la place par son sérieux et sa rigueur dans sa manière de piloter les modalités du scrutin du 23 octobre pour la Constituante. Son calendrier a été respecté à la lettre, que cela soit pour l'enregistrement volontaire des électeurs ou pour le dépôt des candidatures à la future assemblée qui aura à rédiger notre prochaine Loi fondamentale. Nulle contestation n'a été opposée jusqu'ici aux décisions de l'Isie. Or, voilà que certains se mettent, soudain, à lui tirer dessus à boulets rouges et à déclarer illégale sa dernière décision ! Quel est le crime de Kamel Jendoubi et de tous ses collègues à l'Isie ? Quel impardonnable faux pas viennent-ils de faire ? Que leur reproche-t-on, finalement ? Tout simplement d'avoir décrété hors-la-loi la publicité politique ! A l'approche de la campagne électorale et après des semaines d'un indécent battage médiatique sauvage par les partis qui en ont le plus les moyens financiers, l'Isie a cru bon, à juste titre, de mettre fin à un comportement tapageur et, surtout, inégalitaire vis-à-vis des formations politiques aux budgets fort modestes ! Crier à l'illégalité de cette décision édictée par l'Isie est d'une totale hypocrisie dans la mesure où ses précédents «arrêts» ont été acceptés sans que personne n'y trouve rien à redire ! Faudrait-il rappeler ici que la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution, de la réforme politique et la transition démocratique a connu une levée de boucliers identique lorsqu'elle a décidé de moraliser le financement des partis ? Le citoyen ne manque pas aujourd'hui de constater de nouveau l'indécence des partis qui passent outre, depuis une semaine, à la recommandation de l'Isie. Il se pose, surtout, la question de savoir comment faire confiance et donner sa voix à un parti qui ne respecte pas déjà les règles du jeu et ne se soumet pas à ce qui, édicté par une Instance officielle, devrait faire force de loi durant cette période transitoire. Aussi, les tricheurs se marginalisent-ils eux-mêmes et perdent-ils ainsi tout crédit auprès des électeurs ! Car, comme le dit un proverbe : «Il n'y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre» ! On devrait donc lancer le mot d'ordre de boycotter, lors du scrutin à venir, tous ces politiciens qui, par leur indigne comportement, cherchent à se mettre au-dessus des lois – ou ce qui devrait tenir lieu de lois — en ce moment critique de notre histoire ! La disposition contre la publicité politique n'est pas, cependant, le seul sujet de mécontentement de certaines parties prenantes des élections du 23 octobre. La feuille de route connue maintenant sous le nom de «Déclaration du processus de transition» et préparée par le président de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution n'a manifestement pas fait, non plus, que des heureux si l'on en juge par les réactions virulentes de certaines personnalités politiques. Là encore on ne peut que dire «Il n'est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre» ! Car, quel est l'intérêt premier de cette Déclaration, sinon, pourrait-on avancer, qu'il consiste à rassurer les citoyens sur la continuité de l'Etat au lendemain du scrutin en prévoyant les modalités nécessaires afin de garantir une transition pacifique des pouvoirs et afin d'éviter un vide, oh combien préjudiciable aux institutions politiques. La Déclaration limite aussi à un an la durée de la Constituante et préconise des mécanismes destinés à permettre à celle-ci de se mettre rapidement au travail. Dans l'ensemble, ose-t-on affirmer, le bon sens, la bonne volonté et l'éminent sens des responsabilités du président de la Haute Instance ont prévalu lors des discussions entre les onze parties prenantes qui ont fini par s'entendre sur cette Déclaration et parapher ce document tout à l'honneur de son initiateur et de tous ses signataires. Il y a là, certes, une manœuvre opportune par laquelle le président de la Haute Instance a très habilement coupé l'herbe sous les pieds de tous ceux qui ont tenté de polluer la sérénité des élections, de semer la confusion dans l'esprit des électeurs et d'empoisonner l'atmosphère politique en lançant si tardivement le mot d'ordre de référendum ! Bien entendu et tout le monde le répète à l'envi, la Déclaration du processus de transition n'a qu'une valeur morale qui n'engage que ses signataires. Ceux-ci, à l'examen, se révèlent de vrais patriotes qui, pour la plupart sont soucieux de l'avenir de la Tunisie moderne, tolérante, égalitaire et démocratique, si l'on écarte du lot, cependant, certains opportunistes qui ne figurent ici que par crainte pour leur image de marque et afin de racheter leur défection au moment de la discussion du Pacte républicain et se sont retirés de la Haute Instance lors de l'adoption de la loi sur le financement des partis !