Actuellement, l'activité cinématographique est au point mort. L'heure est aux élections. Il faut laisser passer. De temps à autre, un film pointe son nez. Cette fois, il nous vient du pays du Nil. Un documentaire Mafrouza de la réalisatrice française Emmanuelle Demoris, prix Léopold d'or au festival du film de Locarno 2011. Sur initiative de l'Association tunisienne pour la promotion de la critique (Atpcc), la première projection de ce film démarrera, ce soir, au Mondial en présence de la réalisatrice et se poursuivra les 24 et 25 septembre dans les salles Ibn Rachiq, El Hamra, Mad'Art (Carthage) et Alhambra (La Marsa). Ce documentaire inédit se veut une plongée dans l'enfer d'une Egypte de l'avant-révolution. Parabole d'un pays en désarroi que la réalisatrice a filmé en cinq parties : «Oh, la nuit», «Mafrouza-cœur», «Que faire», «La main du papillon» et «Paraboles», soit douze heures en tout de projection. Une incursion dans un bidonville d'Alexandrie construit sur le site d'une nécropole gréco-romaine. Mafrouza est le nom de ce bidonville où durant deux ans la réalisatrice suit les destins croisés de personnes dont l'existence est dure mais qui résistent avec force aux aléas de la vie. Ils sont Adel et Ghada, jeune couple à la recherche d'une vie équilibrée. Mohamed Khattab, l'épicier du quartier et cheikh humaniste. Abou Hosni, vieux solitaire au logis inondé. Hassen, chanteur et voyou au gros cœur épris de liberté. Oum Bassouini, paysanne douée dans la fabrication du pain traditionnel. Jihad, jeune lutteuse aux ambitions démesurées. Les Chenabou, famille de chiffonniers qui résistent contre la vie dure. Mafrouza est le microcosme d'une Egypte qui se débat contre la pauvreté et la misère et qui garde toute sa vitalité et sa joie de vivre. Emmanuelle Demoris, telle une anthropologue, prend le temps de s'arrêter sur ce monde complexe et compliqué où les histoires des uns et des autres s'entrechoquent devant sa caméra qui tente de rester neutre et de s'introduire en toute discrétion dans la vie de ses gens simples. C'est une occasion de voir un cinéma différent de celui édulcoré proposé par le circuit commercial. Un cinéma reflet d'une société mal dans sa peau et qui essaie de survivre grâce au sens de solidarité des uns et des autres. Un cinéma à la Attiyat El Abnoudi pour qui nous avons une pensée.