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Au pays de l'eau pure et des belles pêches
Reportage - Visite au Jebel Bargou
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 04 - 2010

Minuscules nous l'étions. Etres frêles, assoiffés de belles sensations devant ces gigantesques rochers, puissants gardiens du Jebel Bargou.
Le cœur léger, les yeux inondés de beauté sauvage, nous plongions dans ce bain fait de lumière, de verdure et d'amitié.
Devant ce corps nu allongé sur le flanc qu'est la dorsale, recouvert de feuilles à certains endroits, une brise fraîche venait caresser nos âmes lasses et meurtries. Nous frémissions de plaisir et nous respirions à pleins poumons cette nature généreuse et hospitalière, chargée de nectar, d'eau limpide et d'histoire. Nous y reviendrons, certainement… espérons-le.
Entretemps, le récit d'une escapade inoubliable en compagnie des anciens du tourisme, infatigables professionnels que la retraite administrative n'a pas arrachés à leur premier amour… Le tourisme. Reportage
Tunis, vers Siliana, à 8h00, l'autre jour. Dans le bus qui nous emmène pour une randonnée au pied du Jebel Bargou, l'accueil est plus que chaleureux. Présentations, café, lait et sucreries à volonté… Quoi de plus naturel chez ces anciens du tourisme, regroupés, depuis quelques années dans leur association (l'Association tunisienne de développement touristique) et qui continuent à servir ce secteur vital de notre économie à coups de visites commentées, de séminaires, de tables rondes…
Sur la route nationale n°3 (RN3) en direction d'El Fahs, la verdure qui s'étend à perte de vue de part et d'autre de la chaussée laisse deviner un printemps pluvieux.
Là, près de l'insaissable horizon, défilent devant nos yeux les ruines des aqueducs construites au milieu du IIe Siècle pour alimenter la Carthage romaine en eau en provenance des sources du mont Zaghouan.
Jovial, n'arrêtant pas de taquiner ses compagnons, M. Lotfi Khaïat met les points sur les «i» et l'excursion dans son cadre : «Examiner de plus près, les potentialités de notre pays dans le domaine de l'écotourisme».
Au programme, un petit déjeuner traditionnel au pied du Jebel Bargou (1268m), l'excalade du versant, la visite de l'ancien village (dechra), la visite de Aïn Boussadia, un couscous à l'agneau … Alléchant, n'est-ce pas ?
Après une légère pause à El Fahs (50 km au sud de Tunis, légèrement vers l'ouest), nous nous engageons dans la RN4 vers Siliana, chef-lieu de la région, à 50 km plus au Sud et vers l'ouest.
La route commence à monter. A droite s'étend une plaine. Immense lac de verdure sous un ciel légèrement voilé. Un cimetière avec au milieu la zaouia d'un marabout se détache du paysage. Telles des eaux écumeuses, les tombes blanchies à la chaux et bien entretenues laissent deviner une présence vivante qui tarde à se manifester.
M. Wahid Ibrahim, ancien DG de l'Office national du tourisme tunisien profite du trajet pour donner une mini-conférence sur le tourisme écologique, ce qu'il est, ce qu'il devrait devenir en Tunisie. Il sera relayé en cela par le Dr Ridha Koubaâ, professeur en marketing, diplômé des Etats-Unis, avec dans la poche une longue et riche expérience dans le tourisme.
Le royaume
de l'abondance
La route commence à descendre. Nous filons maintenant tout droit vers Bargou, l'ancienne Roboô, localité siège de la délégation du même nom, fief des Ouled Yahia.
Celle-ci a été ainsi rebaptisée après l'Indépendance en l'honneur de la bataille décisive livrée en 1954 contre l'occupant (quelques mois avant la fin de l'occupation) et dont les reliefs de Jebel Bargou étaient le théâtre. Résumons alors. Il y a Bargou, la localité, et Jebel Bargou le site et le mont du même nom, deux populations locales différentes.
Face à nous, vers le Sud, enfin… Le Jebel Bargou, mont de l'abondance, pays de l'eau pure et des célèbres pêches qui en portent le nom.
«Barr… Gou», dit la légende. C'est-à-dire le pays («barr») d'un vénérable chef du nom de «Gou», nous apprend M. Tijani Bargaoui, garde-forestier, après nous avoir rejoints dans le bus. A notre gauche, il nous montre par la même occasion, encore plus au Sud, le Jebel Sarj (1357 m) appelé ainsi parce qu'il présente deux crêtes, dessinant avec la légère dépression la forme d'un «sarj» (selle artisanale pour cheval).
Toujours pittoresque, la route commence à serpenter. Nous traversons sans encombre le lit d'un oued à sec. Nous sommes aux alentours de Aïn Zakkar. Quelques centaines de mètres plus loin et à droite, les vestiges d'une construction sans doute remontant à l'époque romaine.
Au milieu des pins et à l'ombre de ces conifères d'Alep, produisant le fameux zgougou (graines de pin d'Alep), nous voilà remonter encore une fois la pente avec un précipice à droite pour enfin traverser une petite agglomération et des vergers tout roses, grâce aux pêchers en fleurs.
La route devient assez dangereuse et encore une fois nous descendons la pente. Une plaque indique la direction de Sidi H'mada. «Le coin idéal pour une bonne cure de remise en forme», nous confiera plus tard M. Ahmed Smaoui, expert international dans le domaine. Il nous montrera d'ailleurs, sur le chemin du retour, le rapport d'une ONG suisse sur les atouts de la région en matière de tourisme écologique.
Plusieurs sources, pures et fraîches, coulent dans les parages telles que Aïn Mezzata, Aïn Boussaâdia, Aïn Ben Aïssa, Aïn Masmoudia, Aïn Seniet El Jebel…et les stations de mise en bouteilles commencent à se multiplier. Une troisième entrera en production pour bientôt, nous dit notre guide.
Monte M. Fadhel Bargaoui, le omda des lieux. Et les questions de fuser de toutes parts. Chacun désire un peu plus d'informations, et ce, malgré le petit dossier distribué par les dirigeants de l'association depuis le départ.
Nous laissons «Sodga» à notre droite. Une pépinière doublée d'un centre forestier, entourée de vergers bien entretenus.
Les virages deviennent plus accentués et plus dangereux et le chauffeur du bus, en vrai commandant de bord, dose bien ses coups de frein et donne de légers rappels à son volant.
El B'hirine! Tout le monde descend! Il s'agit en fait du nouveau village. Nous empruntons alors un sentier escarpé. «Ici, c'est aussi le pays des cerises, du caroube et du miel», nous explique M. Fadhel Bargaoui, la soixantaine mais paraissant nettement plus jeune.
L'accueil que l'on nous réserve dans cette terrasse de petite villa donnant sur la plaine est plus que convivial. Affamés comme nous le sommes devenus à cause du trajet, mais surtout l'air pur, nous plongeons jusqu'aux oreilles dans l'huile d'olive, le miel, le raïeb (lait caillé), le tout à coup de pain «mlaoui» et de morceaux de fromage frais. Sur le bord d'une niche surplombant une petite fontaine, des douilles de balles au calibre effrayant, une boulette métallique (sans doute de canon)… souvenirs lugubres de la fameuse bataille qui s'est déroulée il y a plus de cinquante-cinq ans.
Bien rassasiés, nous quittons la table en direction de l'ancien village, haut perché. Le relief devient plus menaçant, tel un loup montrant ses crocs, mais la verdure est encore reine.
Raquettes en bouquet de figues de Barbarie, arbrisseaux d'aloé, touffes de romarin, nous grimpons aussi au milieu des oliviers. La brise légère carresse nos visages et les rochers saillants aux formes parfois acérées nous guettant.
A près de 800 m et le portable qui sonne encore!? Vive la technologie! «Vous voyez cette plaque rocheuse lisse? Eh bien c'était notre glissade quotidienne», nous confie Si Tijani en joignant le geste à la parole. Et… vrrr… Le voilà quelques mètres plus bas.
A force d'être utilisée, la plaque s'est en effet transformée en un véritable toboggan, avec une couleur plus foncée.
«Le dernier occupant les lieux en est parti en 1990», nous précise Si Tijani devant l'entrée de l'ancien village (Dechret El B'hirine). Un village berbère des crêtes, en pierres apparentes avec fortifications, et un saint patron des lieux, Sidi Amor Ben Moussa, dont la zaouia donne directement sur l'allée principale.
Juste après une petite pause à l'ombre d'une maison de style moderne mais en ruine, nous continuons l'escalade pour contourner de gros rochers et rejoindre ainsi notre point de départ.
Au milieu d'un troupeau de vaches en liberté, nous essayons de bien nous cramponner. Une eau fraîche et limpide, coule devant nous et l'un des maîtres des lieux vient de détourner son cours pour l'inviter à caresser les pieds d'un vieil olivier, chargé d'histoire et sagesse. Ce sont les fameux ruisseaux (“jadawel”) et roches (“soukhour”) de notre grand poète national et arabe, Chebbi.
Entre la source et le carré des martyrs
Nous cherchons maintenant le chemin du retour, au milieu de ces remparts naturels gris et «rouillés» par endroits. L'air qui commence à devenir plus tiède est rempli alors des belles senteurs des plantes aromatiques qui pullulent dans cet endroit et le ciel devient plus éthéré. Une vague impression d'avoir déjà visualisé ces paysages dans l'un des romans de Maupassant décrivant des contrées fascinantes dans le Massif central français, au pays de l'Auvergne.
Et voici un morceau d'une chanson emblématique qui nous revient : «Nos montagnes (Jebali) m'appellent. Le figuier et aussi l'olivier (Zitouna). Vallées haut perchées, j'atteindrai et de ses sources (aayouna), je boirai». Ainsi, chantait Jammoussi le mal du pays.
Nous voilà de nouveau dans le bus. Direction Aïn Boussaâdia. Si El Fadhel profite du trajet pour nous raconter dans les détails les péripéties de la fameuse bataille de Jebel Bargou.
C'était le 13 novembre 1954, l'armée française regroupant quelque 18.000 soldats venait d'encercler les lieux. Objectif : éliminer définitivement les résistants, quelques centaines mal équipés qui venaient d'enlever puis de tuer cinq ou six soldats français dont le fils d'un général.
Ce jour-là, le brouillard et la neige se sont ralliés aux patriotes. Résultat : 18 martyrs du côté tunisien et des dizaines de morts du côté français.
En arrivant à Aïn Boussaâdia, nous nous dirigeons directement vers le carré des martyrs et récitons la Fatiha à leur mémoire, à leur tête, leur chef le valeureux Salem El Ouerghemmi né en 1912.
Le site de la source (Aïn Boussaâdia) est à lui seul un coin merveilleux. Bancs sous l'ombre des eucalyptus, passerelles, et le calme qui enveloppe les lieux. Certains profitent de l'occasion pour acheter le miel chez un apiculteur. D'autres, s'aventurent à l'intérieur de la balise pour admirer les eaux qui dorment sous les arcades d'un grand réservoir en dur. Tourisme écologique, certes, mais aussi à composante culturelle visible. Le village berbère, les traditions, les arts populaires et ce chant magnifique des fils et filles de la région, l'histoire… Tout pour faire de Jebel Bargou une destination inoubliable. Ajoutons à cela un succulent déjeuner traditionnel : couscous à l'agneau, salade de mauve, poulet de ferme à la sauce tomate, garnie de fonds d'artichaut sauvage… Un bol d'air frais, une eau limpide, fraîche et douce, un ciel mystique, un horizon qui se perd à l'infini, l'amitié retrouvée de ces anciens du tourisme et, enfin, celle qui se construit déjà avec ces fiers Bargaouis.
Quand l'utile devient agréable… et vice-versa
Vétérans du métier, les anciens du tourisme n'oublient pas dans le feu de l'action le devoir de l'amitié. Visites aux anciens collègues, trahis par une santé fragile, dans un élan de solidarité sans faille, mais aussi excursion pour se retrouver et entretenir cette jeunesse qui pétille en eux malgré le poids des années.
Depuis sa création, il y a plus de quatre ans, leur association (tunisienne de développement touristique) a fait énormément fait dans l'amitié mais aussi et surtout pour mériter son nom. Du nord au sud du pays, d'est en ouest, aucune région n'est laissée pour compte, ni aucun thème.
Bizerte, Tabarka, Monastir, Kairouan, Korbous, Takrouna, Tozeur, Nefta, Kebili, Djerba, Hammamet, Uthina, El Kef, Sbeïtla, Dougga, Zaghouan et j'en oublie. Toutes ces régions ont reçu la visite de ces dynamiques vétérans. Et pas n'importe quelles visites S.V.P. Des visites intelligentes au cours desquelles tout est analysé, décortiqué, critiqué, évalué… Rapports bien rédigés et bien illustrés à l'appui (le dernier qu'ils nous ont fait parvenir analyse la destination : Tozeur, gafsa, Kébili, Douz).
Côté thèmes, les anciens du tourisme n'ont pas chômé : thermalisme, tourisme intérieur, crise économique et répercussion sur le tourisme, l'animation touristique, la formation, l'artisanat… La prochaine table ronde traitera du tourisme à Tunis et elle aura lieu ce mercredi 21 avril à Gammarth.
Bref, un travail admirable au service de notre tourisme dans le pur esprit du bénévolat et de la citoyenneté active.
«C'est notre façon de rester fidèle à notre secteur malgré la retraite et de servir notre pays en aidant nos confrères encore en exercice dans leur noble mission», nous explique M.Lotfi Khaïat, président de l'Association au terme d'une longue discussion.


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