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CPR, Ettakatol : notre avenir est entre vos mains
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 21 - 11 - 2011


Par Abdellatif GHORBAL
Sans vouloir réduire son importance, la formation du gouvernement ne doit pas occuper l'essentiel de nos pensées. La priorité doit revenir plutôt à l'élaboration de la nouvelle Constitution garantissant les libertés universelles et individuelles, à l'abri du risque de la voir un jour dévoyée par un éventuel parti dominant, Ennahdha aujourd'hui, un autre parti demain. Pourtant, depuis les élections, beaucoup de Tunisiens ont peur, craignant l'instauration d'une dictature religieuse, malgré les dénégations d'Ennahdha. En réalité, trois phénomènes proches mais bien distincts sont confondus sous l'étiquette islamiste, contribuant à déboussoler les Tunisiens et à les effrayer encore plus, et à paralyser leur action, en les détournant des vrais enjeux politiques.
Les différents périls islamistes
Le premier de ces phénomènes est le salafisme, une attitude nouvelle en Tunisie, car étrangère aux courants religieux traditionnels, qui se manifeste bruyamment depuis la révolution. Il s'est développé dans le sillage des forces rétrogrades du Golfe, notamment les wahabites saoudiens. Fanatisés et violents, les salafistes se montrent très agressifs contre les femmes, et plus généralement contre tous ceux qui n'adhèrent pas à leurs fantasmes. Conservateurs d'extrême droite, ils sont comparables aux skinheads européens, et ne se distinguent de ces derniers que par leur obsession maladive et malsaine des femmes. Ils appellent au jihad, à l'instauration du califat, et à l'application de la chariâ, sans comprendre aucun de ces concepts. Paradoxalement pourtant, ils ne constituent qu'un danger mineur pour le pays. Avec des effectifs limités, sans pouvoir d'attraction dans la société, suscitant méfiance, réprobation et mépris, y compris parmi les religieux, ils ne sont dangereux que parce que la Justice laisse faire. Le jour où l'Etat décidera d'assumer ses responsabilités vis-à-vis d'un tel fléau, la peur qu'ils tentent de faire régner dans la société disparaîtra, en même temps que leur pouvoir de nuisance. Le salafisme relève donc de la gestion de l'ordre public.
Le deuxième péril est plus sérieux et plus difficile à combattre, car plus diffus. C'est celui de l'islamisme rampant, qui tente de modeler la société, par petites touches, dans le sens de ses conceptions conservatrices et passéistes. Il ne s'agit plus là d'un mouvement organisé, aux membres identifiables, mais du résultat d'une multitude d'actions combinées de la moitié conservatrice du pays, qui n'imagine sans doute pas la gravité de son comportement inquisiteur et irrespectueux des libertés individuelles. Des pressions quotidiennes sont exercées à l'encontre des femmes, soit directement, soit indirectement, à travers les prêches dans les mosquées ou par les affiches et slogans muraux. Malheureusement, il n'existe pas de solution facile pour protéger efficacement les femmes contre ce danger-ci, à part un travail de longue haleine, basé sur l'éducation et l'apprentissage de la vie en société.
En réalité, le vrai, le seul péril islamiste qui existe est Ennahda. Pourquoi ? Non parce que ses dirigeants sont les plus extrémistes (ils semblent au contraire beaucoup plus réfléchis, beaucoup plus rationnels que les salafistes), non parce qu'ils auraient des desseins cachés et inavouables, mais tout simplement parce que ce sont les seuls qui ont un vrai pouvoir ! Nous devons nous méfier d'eux, comme nous devons nous méfier de tous les partis représentés à l'Assemblée constituante. Simplement, puisqu'Ennahdha constitue le plus grand groupe parlementaire, ce sont eux les plus dangereux.
Le CPR et Ettakatol, les vrais maîtres du jeu
Les premières déclarations de certains de leurs ténors ne sont pas à leur avantage, les laissant apparaître comme inexpérimentés ou ignorants. Suppression de la langue française, interdiction de la vente d'alcool, louanges de l'émir du Qatar, (serait-il le nouveau Bey de Tunis ?), instauration du 6e califat, les femmes célibataires et leurs enfants insultés et traînés dans la boue, la liste est bien connue. A chaque fois, le parti dément, et à chaque fois s'ensuit une nouvelle provocation le lendemain. Serait-ce la fameuse preuve de leur double discours ? Dans leur cas, il faudrait plutôt parler de triple ou de quadruple discours, tant leurs idées et propositions varient selon les jours, les auditeurs, et les interlocuteurs ! En réalité, Ennahdha ne maîtrise pas le discours public de ses membres. Il n'est même pas sûr qu'ils sachent eux-mêmes quoi faire du pouvoir. La seule chose certaine, c'est qu'Ennahda est plus un conglomérat d'intérêts divers qu'un véritable parti politique responsable. Ce parti n'agit pas, il ne fait que réagir aux événements. Il ne faut pas les diaboliser, mais il n'y a malheureusement rien de positif à attendre d'eux. Mais jusqu'à quel point doit-on se méfier d'eux ?
Tout d'abord, il faut rappeler qu'Ennahda n'est pas encore le nouveau RCD ! Les islamistes sont minoritaires dans le pays, car les élus d'Ennahdha, 40% des sièges, n'ont obtenu que 37% des voix exprimés. Le scrutin, qui avait été mis en place pour minorer leur influence, les a au contraire favorisés ! Les 63% restants, c'est-à-dire la très grande majorité des votants, ne font pas confiance à Ennahda. Si l'on tient compte de l'abstention, en définitive le vrai vainqueur des élections, les élus d'Ennahdha n'ont réuni que 18% des électeurs potentiels. Ce qui signifie que 82% du corps électoral n'est pas de leur côté. Ils n'ont eu que 89 députés sur 217, les situant loin de la majorité absolue, et encore plus loin de la majorité des deux-tiers. Ils ne peuvent influencer l'écriture de la Constitution que grâce à des alliances. Ces alliances, ils les ont déjà, car le CPR et Ettakatol ont accepté depuis des mois de gouverner avec Ennahda. Du fait de cette alliance, ce sont eux, et non Ennahda, qui détiennent le vrai pouvoir, celui d'écrire la Constitution. Le destin de la Tunisie est donc entre les mains du CPR et d'Ettakatol. Sans eux, Ennahda n'a aucun pouvoir.
La Constitution et la majorité des deux tiers
Certes la formation d'un gouvernement pour gérer les affaires du pays est importante, et urgente. Mais ce n'est rien comparé à l'écriture de la Constitution. Il ne s'agit pas des mêmes enjeux. Un gouvernement relève du conjoncturel. En revanche la Constitution est pérenne. Elle s'impose à tous, et demeure la source principale de toutes les lois. Elle ne peut être rédigée ni à la légère, ni au profit d'une minorité, ni servir de monnaie d'échange contre des postes ou des prébendes. Sa grande force vient de l'ampleur du consensus qui aura entouré son élaboration. Plus le consensus est grand, plus la Constitution est légitime. Autrement dit, un gouvernement dirigé par Ennahdha ne représente pas, en soi, un danger immédiat. En revanche, une Constitution estampillée «Ennahdha» serait une catastrophe, surtout depuis que ses dirigeants prennent la parole pour nous démontrer, un peu plus chaque jour, l'étendue de leur ignorance.
Pour éviter les faux pas et empêcher d'éventuelles manœuvres partisanes, la logique et le sens des responsabilités voudrait que les principaux articles de la Constitution soient adoptés à la majorité des deux-tiers. Les objections prévenant de possibles retards ou blocages des travaux de la Constituante ne sont pas recevables. Les blocages, les désaccords, les obstructions sont normaux en démocratie. Fixer le seuil, pour qu'un article de la Constitution soit adopté, à la majorité simple (50% + 1 voix), simplement pour que l'écriture de la Constituante aille plus vite, puis soumettre l'ensemble du texte constitutionnel à un référendum ensuite, serait une catastrophe. Il est même honteux que M. Mohamed Abbou, un responsable du CPR, se soit récemment prononcé en faveur d'un tel système. Fait-il semblant d'ignorer que n'importe quel texte, aussi médiocre soit-il, passera sans difficulté la soi-disant «épreuve» du référendum ? Il suffit pour s'en convaincre de se rappeler ce qui s'est passé en Egypte le 19 mars dernier, quand une Constitution mal ficelée, qui prolonge le pouvoir des militaires, et donc une forme de dictature, a été approuvée par 77% des votants ! Les Tunisiens sont-ils vraiment supérieurs aux Egyptiens ? Je n'en suis pas du tout sûr. Il est au contraire très probable que le peuple tunisien, fatigué et déçu de son personnel politique, refuse de voter contre le projet soumis, quel qu'il soit, pour ne pas revivre une nouvelle Assemblée constituante. Alors à quoi jouent M. Mohamed Abbou et ses camarades en suggérant un tel scénario ? Nous, qui pensions justement que le CPR n'avait pas peur d'une Assemblée constituante de plusieurs années ?
Le courage politique, le seul garant d'une Constitution juste
Cet épisode n'est pas anodin. Il donne l'alerte sur ce qui est peut-être en train de se tramer ces derniers jours entre les coalisés. Le CPR et Ettakatol sont-ils en train d'échanger des articles de la Constitution contre des postes ministériels? Est-ce l'état d'esprit des futurs candidats à l'exercice du pouvoir ? C'est là que se pose la question du courage politique. La stratégie du CPR et d'Ettakatol ne peut prétendre au soutien de l'opinion que si leur démarche demeure à l'abri du soupçon. Ils peuvent facilement obtenir ce soutien s'il s'avère qu'en cas de divergences fondamentales, ils se montrent intransigeants, c'est-à-dire prêts à aller jusqu'à l'obstruction, la paralysie, ou le départ du gouvernement, pour sauver la Tunisie des projets les plus dangereux d'Ennahda. Ce dernier ne se rend même pas compte des énormités que certains de ses dirigeants professent à longueur de temps ! Il revient dans ce cas à leurs alliés de faire le tri, et de valider chez Ennahda uniquement ce qui fait consensus. On peut faire des compromis dans un gouvernement, mais pas pour une constitution ! Ce n'est pas la même chose !
Ennahda, pour le meilleur et pour le pire, ne changera pas, et il y aura sûrement, tout au long des travaux de cette assemblée, des propositions fantaisistes, ou susceptibles de faire frémir une partie de l'opinion. Mais ses partenaires, s'ils veulent être utiles à leur pays, doivent être prêts à se battre si la situation l'exige. Ils ne doivent pas avoir peur des probables menaces, campagnes d'intimidations, chantages à l'obstruction ou chantage au peuple qu'Ennahda ne manquera pas d'utiliser contre tous ceux qui s'opposeront à ses projets non consensuels. Le destin de la Tunisie est trop important pour qu'ils manquent de courage. Puisqu'ils n'ont pas eu peur de Ben Ali, qu'ils nous prouvent qu'ils n'ont pas peur d'affronter Ennahdha quand cela est nécessaire ! Et à ce moment-là seulement, le CPR et Ettakatol auront prouvé que leur amour du peuple tunisien est plus grand que leur désir d'exercer le pouvoir.


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