•La grogne de nos policiers n'aura finalement duré qu'une heure. Pourvu que le message soit passé… «Chômage forcé», hier, pour nos policiers: armes en berne, pause-café dans les commissariats et, surtout, absence notable dans les tribunaux. In fine, ce fut un sit-in «élégant», voire «sympa», dans la mesure où il n'aura duré qu'une petite heure, avant de voir tout le monde reprendre, illico presto, le boulot. Rien à voir, en tout cas, avec ces sit-in sauvages aux conséquences parfois désastreuses. Observateurs et citoyens ont donc apprécié ce mouvement qui témoigne, à leurs yeux, d'«un sens de la responsabilité et d'un comportement au diapason des attributs de la citoyenneté». Il est vrai que ce sit-in n'a pas paralysé outre mesure la marche des administrations, même s'il a été très ressenti dans certains tribunaux où les salles d'audience ont accusé un retard sensible dans le traitement des affaires. Par contre, on a constaté que le mouvement est passé presqu'inaperçu dans les postes de police où les files d'attente formées en début de matinée ont fini, deux heures plus tard seulement, par fondre comme neige au soleil. Légitime défense Ce sit-in organisé à l'appel de l'Association tunisienne pour une police citoyenne (Atpc) et du Syndicat des forces de sécurité intérieure (Sfsi) survient dans la foulée de l'ouverture, hier, par le Tribunal militaire, de l'affaire des 22 victimes de la révolution abattues, entre le 17 décembre 2010 et le 15 janvier 2011, par des agents de l'ordre dans les villes de Kasserine, Thala, Tajerouine et Kairouan. Il est donc clair que les sit-inners ont voulu, par leur mouvement solidaire d'hier, lancer un message fort, à savoir l'exigence d'un procès équitable pour leurs collègues impliqués dans cette affaire. «Mes camarades ont fait leur boulot, en appliquant les ordres venus d'en haut», se défend un policier qui assure que «la responsabilité des faits incombe plutôt à leurs patrons qui devront être jugés à leur place». Pour un autre policier, «il est anormal qu'on continue d'accuser les agents de l'ordre d'être toujours à l'origine des drames sans leur accorder la moindre circonstance atténuante». Et de s'interroger, de plus en plus inquiet: «Pourquoi n'a-t-on pas ouvert jusqu'ici les dossiers de ceux qui ont tué les policiers avant et après la révolution ? Ne sommes-nous pas des Tunisiens comme tous les Tunisiens? Et quand, mon Dieu, cessera-t-on de nous prendre pour l'éternel bouc émissaire ?» Par ailleurs, des flics qu'on a approchés hier ont fait état d'un mauvais traitement de leurs collègues détenus en prison où ils attendent d'être dans cette fameuse affaire qui avait défrayé la chronique, ces derniers temps, sur fond de mouvements de protestation lancés par les familles des victimes et des blessés. Rappelons que, dans ladite affaire qui avait fait 22 morts et 602 blessés parmi les habitants des villes citées plus haut, sont impliqués, outre Zaba, 22 accusés dont notamment les ex-ministres de l'Intérieur, Rafik Hadj Kacem et Ahmed Friaâ, ainsi que Ali Sériati et les hauts cadres de la sécurité Adel Tiouiri, Jalel Boudriga, Lotfi Zouaoui, Youssef Abdelaziz, Moncef Laâjimi, Noômane El Ayeb, Khaled Marzouki, Khaled Ben Saïd, Béchir Betibi et Wissem Ouertani.