Le championnat de Ligue 1 est repris par le démon de la violence, compromettant sérieusement le tout récent retour du public. Ce n'est pas que la violence avait été éradiquée depuis le début de la saison ou que nos enceintes sportives s'étaient subitement transformées en de vastes édens. Toutefois, la recrudescence de ce fléau a été subite, engendrant de gros dégâts en ce triste mercredi de guérilla «stadière», si l'on peut s'exprimer ainsi. •Trois gros foyers de tension. El Menzah, Gabès et Monastir ont connu de sévères heurts ayant occasionné d'importants dégâts, au niveau des installations du stade Mustapha-Ben Jannet de la ville du Ribat notamment. Dans cette dernière, les échauffourées s'étaient poursuivies en dehors du stade, les agents de la sécurité ayant eu maille à partir avec des groupes de supporters usémistes dans quelques points chauds de la ville, ce qui a nécessité l'usage de gaz lacrymogène pour tenter de disperser les poches des fans les plus turbulents. Dans ce climat incandescent et électrique qui n'a rien de vraiment «sportif», le trio arbitral conduit par Youssef Sraïri a dû attendre jusqu'à 18h00 pour pouvoir quitter le stade sous haute protection policière. Mais c'est au premier assistant Naoufel Ben Abdallah, qui a signalé un hors jeu inexistant (comme le confirmera la moviola de Ali Ben Naceur) sur le but de Maher Hannachi à la 18e minute, finalement invalidé, que les plus furieux d'entre les supporters monastiriens en voulaient le plus. A Gabès, une bagarre générale s'était déclenchée au coup de sifflet final du match ASG-OB. L'arbitre Elyès Souiden et l'entraîneur suisse de la Zliza, Christian Zermattan, ont été particulièrement visés. La délégation de l'Olympique de Béja dut s'emmurer près de deux heures dans les vestiaires avant d'avoir la voie libre pour prendre le chemin du retour. Last but not least, une tentative d'invasion du terrain par un supporter étoilé a mis le feu aux poudres à El Menzah où les agents de l'ordre, qui déploraient quelques cas de blessés, ont dû faire usage de patience et de sang-froid afin d'éviter l'escalade. L'arbitrage n'explique pas tout : Les passions étaient certes exacerbées depuis un bon bout de temps à Monastir où chacun savait qu'une simple étincelle (la malheureuse appréciation sur le but refusé à Hannachi) pouvait embraser le stade, et ailleurs. Mais on se gardera d'écrire que les erreurs arbitrales ont attisé le feu de la violence, de la casse, de la contestation… Cet hydre avait pris des proportions démesurées bien avant la révolution des libertés. S'il a survécu à la «liquidation» du régime déchu, c'est que, quelque part les jeunes continuent de ressentir un malaise (chômage, conditions de vie précaires, horizons «bloqués»…). Alors que certains profitent de la phase transitoire que vit le pays pour se livrer à ces «moments de bravoure» dont ils pensent goûter le plaisir sur les gradins et dans les virages. Mais admettons, au final, que notre tentative d'explication ne peut prétendre être exhausive, le phénomène recélant de nombreux ressorts complexes. • Le huis clos pend au nez de la compétition: Si le syndicat des différents corps de la sécurité assure boycotter les prochaines rencontres de l'Union Monastirienne, c'est que la dimension prise par la violence était devenue insupportable. Et cela ouvre en fait la porte devant une possible réinstauration du huis clos. Quelques jours avant le début de la saison, le 4 novembre, un modus-vivendi avait été trouvé entre le ministère de l'Intérieur et les présidents des clubs en vertu duquel le retour du public dans les stades sera suspendu aux premiers sérieux incidents enregistrés au cours d'un match. Or, ce compromis a volé en éclats mercredi dernier. Nous ne pensons pas du reste que les agents de la sûreté ont une patience infinie. A fortiori, dans le contexte très délicat, imposant de bien plus urgentes interventions que celles nécessitées par les caprices du monde du football.