Mercredi matin, du côté du Parc des exposition du Kram, les lieux se sont érigés en une ville dans la ville. Le livre est à l'honneur. Les masses humaines entassées devant le parc donnent à lire que cet incontesté ami de l'homme ne courbe point l'échine sur ces terres, de tout temps, carrefour des civilisations et berceau de leur cohabitation. D'un côté à l'autre, adultes, jeunes et moins jeunes parcourent les stands à la recherche d'une œuvre phare, d'un écrivain de renom, de recueils de poésie, ou bien encore de livres d'histoire, vu que l'occasion est propice. La matière est diverse et les prix sont étudiés de manière à redorer le blason de cet objet de tous les désirs, en l'occurrence le livre. Venus de 34 pays, 1.100 maisons d'édition donnent toute sa splendeur à la manifestation, offrant une panoplie de choix répondant à divers goûts et satisfaisant toutes les curiosités. Accompagnée de ses deux enfants, Mme Raja, la quarantaine, professeur d'anglais, affirme que la télévision, le cinéma, la musique, les jeux vidéo et finalement Internet prennent le dessus, occupent de plus en plus de place dans les loisirs juvéniles et gagnent du terrain par rapport au livre. «La foire est une occasion pour rediffuser en eux l'amour du livre et de la lecture», renchérit-elle. Les stands de livres pour enfants connaissent, eux, un remarquable engouement. Conversations et discussions, tantôt s'accélèrent, tantôt se ralentissent, entre parents et enfants à propos du contenu d'un livre ou la biographie d'un écrivain. Ces stands se transforment, ainsi, en ateliers d'initiation indirecte à la lecture. Parallèlement, les publications relevant des domaines de l'art et de la civilisation, du patrimoine archéologique et historique de la Tunisie drainent des visiteurs de tous les âges et de toutes les catégories. «N'a-t-on pas dit un jour que l'homme est grand en ce qu'il est ?», tranche M. Mohamed Ali, spécialiste de la langue de Voltaire. «Mon rendez-vous avec la Foire du livre est régulier et presque sacré. Cela fait des années et des années que j'ai pris l'habitude d'accompagner ma famille à cette foire, qui demeure pour moi une manifestation instructive et non moins distractive. Je suis féru du patrimoine culturel et historique de la Tunisie. C'est pourquoi, dès mon arrivée, ma destination première n'est autre que ce stand, pour me rappeler de ces Tunisiens d'exception qui ont, à un certain moment, enrichi la bibliothèque nationale. Mais que serait la Tunisie sans arts, sciences et littérature ? Décidément, un jardin sans fleurs et sans parfums. Au regard de cette bonne organisation, de cette multitude d'éditeurs et de libraires et de ces prix alléchants, je ne peux que louer les efforts des organisateurs. Sachant que cela traduit un pari continu sur la culture en tant que support du développement et fondement de l'édifice civilistionnel», souligne notre interlocuteur. Par ailleurs, le plus de cette édition serait, comme l'affirme un libraire, cette focalisation sur l'expérience du livre numérique (e-book), consistant en l'intégration du contenu des ouvrages dans des supports numériques de troisième génération. «Une démarche susceptible d'inciter les jeunes à la lecture en adoptant des démarches pédagogiques allant de pair avec les exigences des temps qui courent, si l'on se place du côté de ces jeunes», relève notre interlocuteur. L'autre espace très prisé par les visiteurs est celui consacré à l'encouragement de l'échange des droits entre les écrivains, les éditeurs et les distributeurs. Mme Houda, institutrice de langue arabe, note que cette initiative favorisera le secteur du livre en permettant un enrichissement mutuel des points de vue et des prises de position par rapport à la scène culturelle nationale. «Cette édition est vraiment impressionnante, non seulement par la diversité et la richesse de son contenu, mais aussi par la qualité des invités et la valeur des initiatives. Rencontrer l'écrivaine algérienne Ahlam Mostaghanemi et l'Américaine Brenda Flanagan est un véritable régal, surtout que cela constitue une valorisation de la création féminine et une revanche de la femme au sens noble du mot», s'exclame l'institutrice.