«Les Tunisiens n'attendront pas indéfiniment que justice leur soit rendue et que les symboles du régime déchu compromis dans les affaires de corruption, de malversation et de torture échappent aux sanctions qu'ils méritent». «La volonté politique de faire instaurer la justice transitionnelle est bien là et nous considérons que si le gouvernement actuel n'arrive pas à le faire, il n'y aura jamais de justice transitionnelle en Tunisie». «La justice transitionnelle que nous cherchons à promouvoir ne sera ni une justice sélective ni une justice de vindicte. Seuls payeront ceux qui ont violé les droits de l'Homme et maltraité les Tunisiennes et Tunisiens durant des décennies, sous la protection d'un régime despotique et répressif». Ce sont les trois grandes dimensions qui ont marqué, hier, les allocutions des Drs Marzouki, Ben Jaâfar et de Hamadi Jebali, à l'ouverture de la conférence nationale pour «Le lancement du dialogue sur la justice transitionnelle». Les trois présidents (président de la République, président de la Constituante et Chef du gouvernement) semblent avoir préparé leurs copies ensemble. Ainsi, pour eux, il est temps, un an et quatre mois après la révolution du 14 janvier, que les Tunisiens sentent réellement «que quelque chose est en train de se préparer afin que justice leur soit rendue et que ceux qui ont violé leur intégrité physique et morale reçoivent les sanctions qu'ils méritent, que les victimes des violations soient réhabilitées, dédommagées matériellement et réintégrées au sein du tissu social, loin de toute tentation de vengeance ou de représailles». Dr Marzouki est on ne peut plus clair dans ce contexte: «Nous rejetons la justice de vengeance, mais nous n'oublions pas le jugement des coupables. Pour nous, le jugement des auteurs des violations est une opération qui permettra de réhabiliter les victimes, sans pour autant que cette même réhabilitation se fasse aux dépens des auteurs des violences, des tortures et des atteintes aux droits humains». Pour le Dr Mustapha Ben Jaâfar, président de la Constituante, la volonté politique de faire réussir le processus de la justice transitionnelle est bien réelle et elle se manifeste au niveau de toutes les institutions de l'Etat, à «commencer par l'ANC qui a déjà prévu dans la petite Constitution, et plus précisément dans le cadre de son article 24, la promulgation d'une loi organique qui donnera naissance à une instance indépendante qui sera chargée du dossier de la justice transitionnelle». Et comme il n'y a pas de recette préétablie ou de modèle à suivre en matière de justice transitionnelle, les Tunisiens sont invités à imaginer leur propre modèle. Un modèle qui montrera — comme l'a souligné Hamadi Jebali, chef du gouvernement — que «la réussite du processus de la justice transitionnelle est une responsabilité collective qui incombe à tous les Tunisiens et à toutes les Tunisiennes, d'où la nécessité d'opter pour une approche participative fondée sur le dialogue avec l'ensemble des composantes du paysage politique national». «Notre ambition est de créer un modèle tunisien qui ouvre la voie à la consécration de la justice transitionnelle dans le monde arabe, à l'instar du printemps arabe dont le déclenchement a été provoqué par la réussite de la révolution de la libertré et de la dignité en Tunisie», a encore souligné Hamadi Jebali, insistant sur sa confiance que le peuple tunisien saura parachever «les tâches de la révolution grâce, précisément, au dialogue et à la concertation».