Le gouverneur, le procureur et le chef du district de la Garde nationale pointés du doigt Une nouvelle journée de colère à Sidi Bouzid. Des centaines de manifestants, jeunes et moins jeunes, des délégations d'El Bkakria, de Menzel Bouzayen, d'El Fayedh... ainsi que ceux de la ville de Sidi Bouzid ont répondu présent à l'appel de «La journée de libération de Sidi Bouzid du trio qui freine la région : le gouverneur, le procureur de la République et le chef du district de la Garde nationale», selon le communiqué signé par les organisateurs du mouvement. L'appel a été lancé sur les réseaux sociaux par des associations civiles, à l'instar du front 17 décembre des forces progressistes, qui incorpore plusieurs partis politiques de l'opposition, et du comité 17 décembre pour la protection de la révolution, ainsi que plusieurs figures indépendantes. Selon l'un des activistes de ce mouvement, ces trois hauts responsables ont ordonnée une série d'actions répressives et humiliantes ainsi que de farouches campagnes d'arrestations contre les habitants des délégations qui ont revendiqué leur droit à l'eau courante et à l'électricité. Mais, à vrai dire, ce n'est qu'une partie des motivations, voire un argument de mobilisation. En effet, cette fois, le mouvement n'est pas spontané, ni social, ni professionnel. Il s'agit d'un mouvement politisé. Notre source, l'un des organisateurs, indépendant, le confirme. Revenant sur les faits, M. Lazhar Hamdi, membre de la société civile, témoigne : «Dès la première heure les habitants des délégations ont afflué par centaines au centre-ville du gouvernorat. A 9h00, la foule a entamé une marche imposante sur la principale artère de la ville». Lors de cette marche, les manifestants ont scandé haut et fort des slogans hostiles au gouvernement et aux responsables régionaux. Le fameux «dégage» n'a épargné aucun niveau, de haut en bas, de la hiérarchie de l'autorité publique. Dans ce sens, ils ont brandi des banderoles contre le gouverneur. De retour à la place Bouazizi au centre-ville, une heure après, ajoute notre témoin oculaire, les manifestants ont assiégé les locaux du gouvernorat, du commissariat régional au développement agricole ainsi que le bureau régional de l'emploi. Et c'est le siège du gouvernorat qui a attiré la grande partie des manifestants qui ont tenté d'investir les lieux. Du coup les forces de l'ordres sont intervenues, aux environs de 11h30, pour disperser la foule par le lancement de gaz lacrymogènes et des tirs de balles en caoutchouc. On apprend aussi que le bilan fait état d'un blessé et de quatre cas d'asphyxie. D'après, M. Rachid Fetini, un homme d'affaires de la région, plusieurs partis politiques et des figures indépendantes ont participé activement à ce mouvement. En effet, d'après lui, tout le monde s'accorde à ce que la région est mal desservie par les services sociaux et d'infrastructure. «Au moment où les coupures récurrentes d'eau courante persistent, le gouvernement prépare le dossier de l'indemnisation des prisonniers politiques. Et ce, par le recours à l'endettement extérieur», déplore-t-il. Il nous fait savoir, également, que le communiqué des organisateurs de ce mouvement mentionne que les solutions passent par le remplacement de trois responsables régionaux : le gouverneur, le procureur de la République et le chef du district de la Garde nationale. Selon M Fetini, les même pratiques coercitives et la marginalisation semblent perdurer à Sidi Bouzid. En effet, les manifestants ont revendiqué, entre autres, la liberté des détenus, «enlevés pour avoir manifesté contre les coupures de l'eau et de l'électricité», selon notre source. Il renchérit : «Les forces de l'ordre ont tenté d'enlever, de l'hôpital de la ville, les blessés qui appartiennent au Parti des travailleurs. Mais les habitants, toutes tendances politiques confondues, les ont empêchés», ajoute-t-il. Une manifestation n'est que le sommet de l'iceberg. Il faut, alors, chercher plus loin les causes profondes ainsi que les solutions radicales de ces mouvements. Car quand ça dégénère, c'est déjà trop tard! Laârayedh dénonce des agissements politiques Le ministre de l'Intérieur Ali Laârayedh a accusé, hier, au Bardo, des parties politiques d'être à l'origine des derniers sit-in et incidents dans le gouvernorat de Sidi Bouzid. M. Laârayedh, qui répondait aux interrogations des constituants, a mis en garde contre les tentatives de certaines minorités d'imposer leurs opinions, faisant remarquer que de «telles pratiques vont conduire à l'établissement d'un Etat désorganisé et d'une démocratie fragile». Par ailleurs, le ministre a démenti toute violation par les forces de l'ordre des libertés individuelles pendant le mois de Ramadan, précisant que les forces de l'ordre interviennent, le cas échéant, pour régler certains problèmes liés notamment à l'imamat dans les mosquées. D'autre part, Laârayedh a démenti la poursuite des pratiques de torture en Tunisie, faisant remarquer que tous les efforts sont axés sur l'abolition de ces pratiques. Evoquant la fermeture du poste frontalier de Ras Jedir, il a indiqué que la décision a été prise du côté libyen sur fond de troubles qui ont éclaté au niveau des frontières, faisant part de la volonté de la Tunisie et de la Libye de voir la stabilité et la sécurité se rétablir sur les frontières et les points de passage de Dhehiba et Ras Jedir rouvrir.