Encore une fois, Sidi Bouzid se soulève contre l'oubli, la marginalisation et les fausses promesses. L'évènement n'est pas du tout des moindres et semble être un signe. Un signe que le dialogue entre le gouvernement et les habitants de la région d'où a émané la première étincelle de la révolution populaire du 14 janvier trébuche de plus en plus. Ce, pour dire que près de 4 mille manifestants de tous âges ont investi, hier matin, la place Mohamed-Bouazizi avant de poursuivre leur marche protestataire à travers les principales artères de la ville, selon l'activiste politique et enfant de la région Naceur Hamdouni. Scandant des slogans dans le style: « C'est la révolution des pauvres et non des politiciens », « Pauvre citoyen! Ben Ali est parti, Jebali est là », « Le développement régional équitable est un objectif de la révolution » et « Etudiants, ouvriers et agriculteurs réunis pour lutter contre l'installation d'une dictature d'un tout autre ordre », les manifestants se sont, par la suite, rendus devant le Tribunal de première instance, revendiquant la libération des détenus dans les récents événements qui ont secoué la même ville. Toujours selon le même témoin oculaire, cette grève générale à laquelle ont appelé la représentation régionale de l'Union générale des travailleurs tunisiens (Ugtt), des associations locales et nationales des droits de l'Homme, des partis politiques comme le Parti du peuple et le Parti des ouvriers tunisiens (Pot) et d'autres formations politiques telles que le Front du 17 décembre et le Comité de protection de la révolution de Sidi Bouzid, a été observée dans l'ensemble des établissements publics, des administrations et des commerces de la ville, à l'exception de quelques boucheries et autres commerces d'artisanat, compte tenu des besoins de la Nuit du Destin. Cette marche protestataire a également enregistré quelques altercations entre les forces de l'ordre, massivement présentes, et certains manifestants. Lesquelles altercations ont été vite maîtrisées grâce à l'intervention de certains sages qui ont appelé à la mesure et au respect des exigences du mois saint. « Cette grève générale à laquelle ont pris part le leader du réseau Doustourna (notre Constitution) Jaouhar Ben Mbarek et Emna Mnif, porte-parole du mouvement citoyen Kolna Tounes, vient en réaction contre ceux qui nous parquent dans la misère et se réjouissent de cueillir les fruits de nos sacrifices. Ils ont fort probablement, plutôt, certainement, oublié que s'ils sont devenus ce qu'ils sont aujourd'hui, c'est grâce au soulèvement des pauvres et des agriculteurs de Sidi Bouzid. Et au lieu de servir leur cause, une fois au pouvoir, ils excellent dans l'art de les ignorer. Telle est la conviction de la pulpart de mes concitoyens ici. Je vous le dis au nom de tous ceux qui se sont lassés des fausses promesses et des projets illusoires de ce gouvernement. Ce que nous voyons aujourd'hui, sous la conduite des nouveaux suceurs du sang du peuple, ce n'est certes pas la République, ce n'est même rien qui ait un nom. C'est juste de l'improvisation de politiciens en panne d'issues et de solutions efficaces à nos problèmes socioéconomiques. Ils veulent nous réduire au silence par la force. Mais ces hommes que les anciens gouvernements ont laissés sans instruction et à qui on n'a pas donné la lecture qui pouvait les éclairer, mais qui se sont eux-mêmes instruits et éclairés, sauront toujours éveiller les consciences mortes et distinguer le bon grain de l'ivraie pour dénoncer l'exploitation de l'homme par l'homme. A ceux à qui des grands maîtres de la garde-robe mettent le col aujourd'hui après avoir sombré des années durant dans la panade, nous disons que c'est aller contre le maintien de la société que de donner des droits politiques et des armes nationales à qui n'a rien à défendre et tout à prendre», égrène Naceur avant d'ajouter que grâce à cette grève générale, certains détenus ont été libérés vers la fin de la journée d'hier, en attendant la libération des autres prochainement.