La première édition des Plates-formes des arts méditerranéens a eu lieu en 2010, à Damas. La deuxième s'est tenue un an après, à Vitry-sur-Seine (France). La Syrie étant à feu et à sang, c'est Tunis qui accueillera la prochaine session, au mois de décembre 2012 Jamais deux sans leur troisième. Le premier, c'est Ramzi Choukair, acteur et metteur en scène syrien, vivant en France. Le deuxième s'appelle Gérard Astor, il est auteur et directeur du Théâtre Jean Vilar de Vitry -sur -Seine, une commune française située dans le département du Val-De-Marne en Ile-de-France. Le troisième n'est autre que Ezzeddine Ganoun, metteur en scène et directeur du Théâtre El Hamra, situé à la rue Al Jazira de Tunis, fourmilière grouillante et bruyante de ce qu'on appelle «les commerces parallèles». Ces artistes se sont rencontrés en trois temps. En 1997, Ramzi et Gérard se retrouvent à « Sayda » sur une coproduction dont le spectacle, qui était contre la guerre, a été donné juste en cette période où Israël bombardait le Sud-Liban. Plus tard, en 2005, le directeur du théâtre, Jean Vilar, est invité au Festival international du Théâtre de Damas, pour donner une conférence sur l'écriture dramaturgique. Il assiste à une représentation de Ezzir Salem, une mise en scène de Choukair, et c'est à partir de là que les ponts sont jetés entre la capitale syrienne et la ville de Vitry. La pièce Ezzir Salem, écrite en langue arabe, est traduite en français puis présentée dans ses deux versions, dans les deux pays. En 2008, Ramzi reprend «L'assemblée des femmes», un projet de fin d'études de l'Isad, adaptation à l'occasion de Damas, capitale culturelle. Cette comédie d'Aristophane, rejouée par des hommes avec un chœur de sourds-muets — illusion au silence des peuples arabes —, est programmée, par la suite, à Vitry. C'est ainsi que l'idée savoureuse de la plate-forme des arts méditerranéens commence à germer dans la tête des nouveaux complices. Naissance du projet Les collaborations entre Vitry et Damas ont donc ouvert le dialogue. Il ne restait qu'à mettre en place une plate-forme qui rassemblerait les artistes du bassin méditerranéen et dont la fondation serait à Damas. Ramzi voulait réanimer la vie théâtrale en Syrie, en créant un espace alternatif. Il était temps que les professionnels du domaine se réapproprient les arts vivants, longtemps gérés par les autorités en place. La première édition pilote a eu lieu, comme prévu, en 2010, à Damas, dans le cadre du Festival international du théâtre. Les spectacles programmés ont marqué par leur qualité. L'objectif des plates-formes étant de participer à l'émergence d'écritures neuves et de nouveaux artistes. En 2011, la deuxième édition a été accueillie par le Théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine, avec le concours des Scènes nationales d'Evry, et La Roche-Sur-Yon (résidence de création théâtrale) et du Théâtre Massalia, Marseille. Ganoun, Choukair et Astor se connaissaient bien avant de se réunir pour organiser la troisième plate-forme qui se tiendra du 7 au 15 décembre 2012 à Tunis. La rencontre décisive a eu lieu à Vitry lors de la deuxième édition. La troupe de théâtre El Hamra avait alors ouvert la manifestation avec The end, sa dernière création qui était fort bien accueillie par le public de Vitry, curieux de découvrir la vision du monde d'artistes venus du pays précurseur du «Printemps arabe». Les débats autour du spectacle étaient passionnés et le projet des plates-formes des arts méditerranéens s'est consolidé loin de tout exotisme ou de toute idée néocolonialiste culturelle. Pour Ganoun, après cette expérience vitriote, il est on ne peut plus évident qu'El Hamra accueille la troisième édition. Le metteur en scène tunisien a vu dans cette ville industrielle de Vitry un modèle à suivre quant à la place de l'art dans la vie de ses habitants, pour la plupart, ouvriers. La prochaine édition Les trois partenaires, qui ont bien voulu nous communiquer toutes ces nouvelles, sont actuellement en cours d'élaboration du programme définitif de la prochaine édition. Nous savons néanmoins qu'il y aura une forte présence syrienne : trois poétesses seraient invitées dans le cadre d'une section appelée «Femmes et révolution». Oussama M'hamed, le réalisateur, dirigera un workshop sur les images dans le cinéma de feu Omar Amiralay. Et un grand hommage sera rendu à l'écrivain Saadallah Wanous, à travers une pièce de théâtre intitulée Le livre de Damas, mise en scène par Fida Moheissen, un film d'Amiralay, et une conférence sur l'écriture de Wanouss qui sera donnée par Farouk Mardambey, directeur de l'Actor's Studio à Paris. Côté musique, on a programmé trois spectacles égyptiens avec la troupe Edawr al aoual, le chanteur Bachir et un conte musical titré Sindbad. Les Français participeront avec une adaptation de Don juan, mise en scène par Nicolas Hocquenghem. «Cette pièce de Molière est révolutionnaire», nous dit Gérard Astor. Ecrite au XVIIe siècle, elle a inauguré le théâtre moderne français. Ces grandes lignes du programme donnent le ton. Reste à connaître les cinq spectacles tunisiens qui participeront à cette troisième édition des Plates-formes des arts méditerranéens. On nous apprend déjà que l'ouverture aura lieu avec la nouvelle création du Théâtre El Hamra, actuellement en chantier.