Ceux qui sont atteints de la maladie cœliaque (MC) le savent parfaitement bien: toute leur vie durant, il leur est interdit de manger des céréales! L'interdiction englobe les pains, les pâtes au blé avec tout ce que cela comporte comme plats qui sont à la base de notre alimentation tels que le «couscous», les macaronis ou tout simplement le pain. Paradoxalement, le gluten, « cette masse protéique, élastique et visqueuse et dont le rôle est de donner une texture moelleuse aux pains et aux autres produits de boulangerie afin de leur permettre de bien se lier ensemble», ce gluten indispensable donc à l'être humain, peut amener, chez certaines personnes des réactions telles que leur vie en devient un enfer. L'enfer c'est d'abord, et avant que la maladie ne soit diagnostiquée, toutes sortes d'affections désagréables allant du retard de croissance à l'anorexie en passant par la diarrhée chronique, la distension abdominale et l'atrophie musculaire. La «sale maladie» comme l'appellent beaucoup de parents est d'autant plus ingérable qu'elle s'attaque, la plupart du temps aux enfants. Car et quoiqu'elle puisse survenir à n'importe quel âge, la maladie cœliaque semble avoir une prédilection pour les enfants. Les raisons restent encore inconnues et certains scientifiques avancent plusieurs hypothèses liées tant à des prédispositions génétiques qu'environnementales susceptibles de déclencher la maladie. Ainsi, et conformément à certaines études scientifiques, il existe une nette prédisposition familiale à la maladie «et dont la prévalence est de 10% chez les parents de premier degré d'un enfant» qui en est atteint. Cela reste à confirmer, mais la maladie pourrait être également liée aux habitudes alimentaires au tout début de la vie : un allaitement maternel trop court lié à l'introduction précoce de céréales dans le régime alimentaire du nourrisson pourrait tout aussi bien en être la cause. Les adultes n'en sont pour autant pas à l'abri puisque la maladie est assez fréquente dans la tranche d'âge 20 à 40 ans. En attendant, chaque année elle progresse, lentement certes, mais sûrement. Ainsi et selon une étude effectuée par un groupe de médecins au CHU de Sfax (1) s'étendant sur une période de 6 ans (janvier 1999 à décembre 2004), la prévalence de la MC est de 1/700 avec 15 nouveaux cas chaque année; selon une autre étude effectuée quelques années avant dans le même service, entre 1977 et 1992, la prévalence était beaucoup plus faible avec 6 cas en moyenne par an. «L'incidence de la maladie, explique-t-on dans la deuxième étude, est en constante augmentation du fait des études à grande échelle réalisées au sein de la population générale, par le biais d'outils sérologiques». Ces chiffres seraient, en plus, en-dessous de la réalité car estime-t-on, beaucoup sont atteints de la maladie sans le savoir. La prévalence la plus élevée se situerait cependant en Europe de l'Ouest (1/100 à 1/300); mais si dans cette partie du monde, il est plus ou moins facile de s'approvisionner en aliments appropriés, ce n'est certainement pas le cas pour nos malades. Non seulement la nourriture est extrêmement chère, encore faut-il attendre qu'elle arrive en quantités suffisantes et qu'il n'y ait pas de rupture de stocks. Jusqu'à quelques années en arrière, seulement trois boutiques diététiques approvisionnaient, tant bien que mal, les quelques centaines de malades qui étaient conscients de leur maladie, et qui, par solidarité, se passaient le message d'une ville à une autre du pays, chaque fois que les aliments «sans gluten» arrivaient enfin à bon port. Actuellement, un industriel a eu la bonne idée de fabriquer sur place toutes sortes de produits sans gluten et à des prix plus abordables, au grand soulagement des malades dont le nombre ne cesse d'augmenter. ––––––––– (1) Aspects histologiques de la maladie cœliaque dans le sud tunisien : étude de 114 cas pédiatriques.