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Comment garantir le droit de vieillir dans la dignité
Opinions - Aujourd'hui : journée internationale des personnes âgées
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 10 - 2012


Par Saïd HAJEM (*)
A l'instar de l'ensemble des pays du monde, la Tunisie célèbre aujourd'hui, avec la même ferveur, l'année internationale des personnes âgées. Comme tous les ans, c'est l'occasion pour la communauté nationale de témoigner sa solidarité et de réaffirmer son attachement à cette frange extrêmement importante de la population qui mérite toute notre affection et notre protection.
C'est également l'occasion de réitérer la ferme volonté et l'engagement de toute une société de poursuivre les efforts déployés en faveur du bien-être de nos aînés afin de consolider et d'enraciner durablement leurs acquis sanitaires et sociaux.
Ce rendez-vous annuel incontournable offre enfin aux intervenants dans le champ gérontologique l'opportunité de faire le point sur le processus de vieillissement de la population qui constitue le principal défi auquel sera confronté notre système socio-sanitaire durant les années ou les décennies à venir. En effet, l'espérance de vie à la naissance poursuit sa progression et se situe actuellement à 75 ans (73 ans pour les hommes et 77 ans pour les femmes — estimation de l'Institut national de la statistique). De même, l'analyse de la part des années vécues sans incapacité au sein de l'espérance de vie totale a montré qu'en Tunisie 90% du temps restant à vivre à 65 ans pour les hommes comme pour les femmes est du temps libre d'incapacité sévère et de toute démence sénile (estimation de l'Unité de recherche sur le vieillissement de l'Institut national de santé publique).
Notre population vieillit donc à un rythme relativement accéléré et les projections démographiques laissent entrevoir que ce processus se poursuivra dans le futur. Cette nouvelle donne démographique pose un sérieux problème de santé publique et suscite, dans un contexte de ressources limitées, quelques interrogations: durant les prochaines années, quelles seront les priorités pour notre dispositif de soins ? Quelles alternatives aux pratiques traditionnelles de soins et à l'hospitalisation classique devrions-nous développer ? Comment assurer la continuité et la qualité des soins aux personnes âgées en perte d'autonomie? Comment assurer un financement stable et durable des soins gériatriques qui sont souvent lourds et coûteux ?
Mieux cerner les besoins
Toutes ces questions, et bien d'autres encore, trouvent leur justification dans le fait que le vieillissement de la population est un facteur essentiel à prendre en compte dans l'analyse des évolutions prévisibles et des tendances futures de la morbidité. Il entraînera, en effet, inéluctablement dans son sillage une augmentation sensible des maladies chroniques et des pathologies dégénératives handicapantes liées à l'âge auxquelles aura à faire face le dispositif de soins à plus ou moins brève échéance.
Cette situation ne manquera pas de se traduire par une demande excessive et des pressions inflationnistes en matière de soins hautement spécialisés ainsi que par l'explosion de la consommation de médicaments et de biens médicaux (prothèses, lunetterie, appareils, correcteurs de surdité ou d'assistance respiratoire...). Il convient de noter, dans ce cadre, que la polymédication des sujets âgés est la résultante de trois paramètres fondamentaux que constituent la polypathologie, la polyprescription et l'automédication.
Dans ce contexte, il est de notre responsabilité collective de mettre tout en œuvre pour renforcer la capacité d'adaptation et la réactivité de notre système de santé face aux multiples conséquences de la transition démographique. Le principal défi à relever, me semble-t-il, se trouve à ce niveau, c'est-à-dire au niveau de la capacité de ce système à répondre aux besoins réels d'une société en pleine mutation.
En effet, le vrai enjeu pour notre système de santé de demain réside, à mon sens, dans sa capacité à répondre adéquatement aux attentes des personnes âgées et à leur offrir des prestations appropriées sûres et efficaces capables de satisfaire leurs besoins hautement spécifiques. Il nous appartient donc de veiller à trouver des solutions idoines pour espérer gagner cet enjeu d'envergure. Inspirées du dynamisme démographique de notre pays et adaptées à notre contexte socio-sanitaire, ces solutions devraient nous permettre de mieux cerner les besoins récurrents et émergents des populations âgées, les anticiper et les satisfaire de façon adéquate et durable.
C'est pourquoi les évolutions que nous devons conduire, en vue d'adapter notre système de soins à l'afflux massif de malades âgés, voire très âgés, doivent s'articuler essentiellement autour des axes majeurs suivants qui embrassent des domaines aussi divers que la formation, la recherche, l'organisation des soins et la diversification des structures et des modes de prise en charge.
Il faudrait tout mettre en œuvre pour renforcer et harmoniser les formations initiale et postuniversitaire qualifiantes de la gériatrie au sein des facultés de médecine et des écoles de santé. Il faudrait également mettre au point un véritable programme de formation continue destiné aux professionnels de la santé qui n'ont pas bénéficié d'une initiation à la gériatrie au cours des cursus d'études de base. Il devrait s'agir d'un programme décentralisé doté de fortes composantes régionales, voire locales, et ce, dans le but de toucher un plus grand nombre de professionnels de la santé.
Il convient aussi d'insister sur la nécessité d'axer les formations initiale et continue sur la rationalisation de la prescription médicamenteuse ainsi que sur son adaptation aux spécificités de la personne âgée. Ces formations doivent aussi permettre de sensibiliser les professionnels de la santé au droit universellement reconnu des personnes âgées à des soins de qualité, sûrs et adaptés. Dans ce cadre précis, il serait utile d'envisager la conception d'une charte des droits des personnes âgées malades et dépendantes.
Favoriser la continuité des soins
Sachant que l'exercice hospitalier de la gériatrie ne peut se concevoir sans structures spécialisées facilement accessibles aux personnes âgées, il est fortement recommandé de généraliser la création d'unités spécifiques de gériatrie à tous les services de médecine interne. En plus des soins avec toutes leurs composantes, les unités hospitalières de gériatrie sont appelées à jouer un rôle de premier plan dans la formation en gériatrie des différents professionnels de la santé tant en matière d'enseignement théorique qu'en matière de formation pratique.
La création d'un hôpital de jour gériatrique dans le gouvernorat de l'Ariana s'est avérée d'une grande utilité. Il conviendrait donc de poser cette expérience en exemple et la généraliser dans tous les gouvernorats. Une telle structure a pour mission essentielle d'éviter une hospitalisation à temps complet du malade âgé en ce sens qu'elle lui permet de bénéficier d'un plateau technique performant pour le diagnostic, la mise en place du traitement, la surveillance ou la réadaptation, tout en retournant à son domicile le soir.
Parmi les priorités qui s'imposent dans le sillage de la transition démographique, figure incontestablement la création de services de soins de suite et de réadaptation qui jouent indéniablement un rôle fondamental dans le processus de prise en charge des personnes âgées ayant besoin d'une rééducation. Ces services ont, en effet, pour mission principale de prendre en charge, pendnat une durée limitée, les patients âgés dont l'état de santé requiert des soins continus après la phase aiguë de la maladie ou à la suite d'une intervention chirurgicale.
L'augmentation continue de l'espérance de vie représente un réel progrès pour notre pays mais aussi un véritable défi pour la collectivité nationale. Il est en effet bien connu que la prise en charge des personnes âgées ayant des besoins spécifiques se traduit par un coût financier très important. L'enjeu est donc considérable pour notre système de santé qui a l'obligation de s'assurer des sources de financement stables et pérennes afin de favoriser durablement la continuité des soins aux personnes âgées dépendantes
L'hospitalisation à domicile
Il est bien admis aujourd'hui que l'hospitalisation à domicile (HAD) joue un rôle capital dans le processus de prise en charge des personnes âgées ayant des besoins spécifiques. C'est pourquoi il importe d'insister sur la nécessité de développer des services dédiés à ce nouveau mode de prise en charge qui fait partie des alternatives à l'hospitalisation classique permettant de soigner, chaque fois que cela s'avère possible, les malades dans leur contexte familial et social. Ce mode de prise en charge est destiné à privilégier les soins ambulatoires et le transfert du patient du cadre hospitalier vers son milieu de vie habituel qui constitue son point d'ancrage socioculturel et affectif.
Aujourd'hui, tout le monde reconnaît que le tissu associatif occupe une place centrale dans le dispositif de prise en charge sanitaire et sociale des personnes âgées défavorisées ou handicapées. Il joue en effet le rôle essentiel de relais dans la prise en charge à domicile de ces personnes. Il est donc impératif de réfléchir dès à présent à la création de réseaux gérontologiques «ville-hôpital» (réseaux reliant les hôpitaux aux associations régionales de protection des personnes âgées) capables de repérer et d'anticiper les besoins des personnes âgées et de leurs familles. Ces réseaux contribuent également à l'élaboration de réponses adaptées à ces besoins ainsi qu'à l'organisation de ces réponses au domicile du malade.
A l'instar des pays ayant réussi à maîtriser leur transition démographique, la Tunisie doit veiller à développer la recherche sur les différents déterminants de l'état de santé des personnes âgées ainsi que sur les multiples aspects relatifs à leur mode de vie.
La recherche doit être promue et utilisée en tant qu'outil essentiel d'aide à l'action et à la décision en gériatrie et gérontologie. Elle a en effet un rôle important à jouer dans la prévention des effets néfastes du vieillissement par l'identification des facteurs de risque évitables ainsi que dans la conception et l'évaluation de programmes de prise en charge destinés aux personnes âgées. Il est également conseillé d'impliquer davantage la recherche dans l'estimation du coût des stratégies élaborées spécialement pour répondre aux besins spécifiques de nos aînés.
Prenant en considération le fait que la satisfaction des besoins des personnes âgées dépendantes relève d'une approche collaborative intégrée à la fois pluridisciplinaire et multisectorielle, il sera aussi utile que nécessaire de procéder à la création de comités régionaux d'information et de coordination (Cric). La mission de ces comités est d'assurer le pilotage et la coordination, au niveau locorégional, des services et des programmes de prise en charge sanitaire et sociale destinés à satisfaire les besoins de la population âgée. Il est, en outre, très urgent de mettre en place des mécanismes de coordination des interventions, qu'elles soient publiques, associtives ou privées. A terme, l'objectif revendiqué est de garantir une prise en charge globale et continue de cette population.
Le rôle du secteur privé
Le système privé de soins constitue une composante intégrale du système de santé tunisien au sein duquel il occupe une place de plus en plus prépondérante. Dans ce contexte, il n'y a rien de plus normal que de tout mettre en œuvre pour inciter ce secteur à investir massivement dans les structures spécifiques dédiées à l'accueil et à la prise en charge des personnes âgées ayant des besoins spécifiques. Parmi ces structures, on peut citer notamment les services médicaux (centres de moyen et long séjour...) ainsi que les centres d'accueil et d'hébergement temporaire qui manquent cruellement dans notre système socio-sanitaire.
A l'heure où notre pays met en place un nouveau dispositif d'assurance maladie garantissant une couverture universelle, il est très important de veiller à ce que la dépendance soit considérée, au même titre que la maladie, comme un risque social à part entière, qui devrait bénéficier d'une prise en charge par la Sécurité sociale. En conséquence, il apparaît impérieux de faire fonctionner le principe de solidarité nationale afin de faciliter l'accès des personnes âgées dépendantes aux prestations d'assurance maladie. Concrètement, cela devrait se traduire par l'introduction des soins spécifiques aux personnes âgées dépendantes dans le panier de base de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam).
Compte tenu du défi que pose la complexité de la prise en charge sanitaire des personnes âgées, la création d'un observatoire national de la santé des personnes âgées devrait figurer parmi les solutions destinées à adapter notre système de santé à la transition démographique qui bouleverse très profondément la donne sanitaire. La mission de cet observatoire s'articulerait autour de quatre axes majeurs:
— Promouvoir la qualité, l'efficacité et l'innocuité des prestations offertes aux malades âgés;
– Adapter l'offre de soins aux besoins spécifiques et aux caractéristiques intrinsèques et extrinsèques de la population âgée;
– Rapprocher les soins de santé du lieu de vie des personnes âgées afin de leur faciliter l'accès à des soins de qualité;
– Promouvoir l'autonomie et prévenir la dépendance.
Réactivité et adaptation
Voilà les formidables challenges que s'apprête à relever notre système de santé dans les années ou les décennies à venir. Ces défis font partie intégrante des grands enjeux sociaux, sociétaux et économiques soulevés par la transition démographique que connaît notre pays. Notre capacité à relever ensemble ces défis communs est le témoignage de la réactivité de notre système de santé et de l'ancrage dans notre société de la culture de la solidarité. L'enjeu consiste, en effet, à renforcer les capacités d'adaptation de notre dispositif de soins aux attentes spécifiques de la population âgée, tout en préservant la cohésion sociale.
Notre société doit être à la hauteur de ces enjeux vitaux afin d'assurer à nos parents et à nos grands-parents une vie saine dans un environnement humain et social favorable susceptible de leur garantir le respect, le confort et le bien-être dont ils ont besoin et qu'ils méritent indéniablement. C'est ainsi que nous consacrerons, de manière durable et pérenne, le droit de nos aînés à l'autonomie et, par voie de conséquence, leur droit absolu à vieillir dans la dignité.
* (Epidémiologiste)


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