Cette question est sur les lèvres de tous les consommateurs ainsi que les détaillants qui vendent les produits laitiers et leurs dérivés. En prévision d'une éventuelle hausse du prix du lait, certains ont, déjà, commencé à emmagasiner des stocks, afin de les écouler dès que le nouveau prix sera annoncé. Pour l'heure, une augmentation de 120 millimes du prix du litre de lait à la production est prévue mais n'a pas encore été annoncée officiellement par le ministère de l'Agriculture. En effet, après moult tractations entre les représentants du corps de la profession et le ministère de l'Agriculture, un accord a été conclu afin de revoir le prix du litre de lait à la production resté inchangé, depuis des années, et fixé à 580 millimes alors que le coût du concentré (aliments pour les vaches laitières à base de soja et de maïs) a connu une hausse vertigineuse. Excédés, plusieurs éleveurs produisant à perte ont menacé d'abandonner la production de lait si des solutions n'étaient pas trouvées à la crise sans précédent que traverse le secteur. En effet, le bât blesse au niveau du prix des matières premières intervenant dans la fabrication des aliments concentrés servant à l'alimentation des vaches laitières qui ont enregistré une forte hausse sur le marché international alors que l'alimentation représente plus de 50% du coût de la production de lait. «Le coût des aliments concentrés a enregistré, au cours des deux dernières années, une augmentation variant entre 80 et 100%», souligne Abdelhafidh Laroussi, producteur de lait et exploitant d'un élevage comptant 50 vaches laitières. En 2011, le coût des aliments concentrés s'élevait à 652 dinars la tonne. En 2012, ce coût atteint 1.200 dinars la tonne. Or ces aliments composés essentiellement de soja et de maïs ont une influence directe sur l'alimentation des bovins ainsi que sur la production de lait. Conséquence: alors que cette hausse s'est directement répercutée sur le coût de la production de lait qui a connu une augmentation croissante, le prix du litre de lait à la production fixé par l'Etat — la dernière augmentation remonte à 2008 — est resté, par contre, le même, s'élevant à 580 millimes le litre. Ce déséquilibre entre le coût de la production et celui du litre de lait proposé à la vente aux centres de collecte a occasionné des pertes aux éleveurs qui ont de plus en plus de mal à supporter les frais liés à l'élevage. «Une étude réalisée a montré que le prix du lait à la production doit être majoré de 20% par rapport au prix du kilogramme d'aliments concentrés», note Omar El Bahi, éleveur de vaches laitières, précisant que « actuellement, le coût des aliments concentrés s'élève à 720 millimes le kilo. Le prix du litre de lait à la production doit normalement s'élever à 860 millimes le litre. Il est actuellement écoulé à 580 millimes et l'Etat propose de le fixer à 700 millimes le litre. Il s'agit d'une mesure qui va, certes, permettre d'alléger les charges et de réduire les pertes mais cela n'est toujours pas suffisant. Les éleveurs continueront à rencontrer des difficultés pour entrer dans leurs frais. Or, il est essentiel pour nous de le vendre à un prix nous garantissant le recouvrement de nos charges et la réalisation d'une marge bénéficiaire ». Conclusion: l'impact de la hausse du prix des fourrages sur le coût de la production devrait automatiquement entraîner une révision du prix du litre de lait fixé par l'Etat. Les éleveurs pourront ainsi supporter les frais liés à la production de lait et garantir l'autosuffisance à l'échelle nationale. Dans le cas contraire, le secteur risque de s'enfoncer davantage dans la crise car les producteurs de lait, ne pouvant supporter les pertes occasionnées, seront acculés à vendre ou à abattre leurs vaches laitières, faisant peser, ainsi, la menace sur un cheptel national déjà en voie de déperdition. D'un autre côté, l'augmentation du prix du litre de lait à la production annoncée par le ministère de l'Agriculture devrait s'accompagner logiquement de l'augmentation du prix du litre de lait à la consommation. Or, le ministère du Commerce ne s'est toujours pas prononcé sur la question.