Plusieurs remarques ont été forumulées par des experts en fisaclité et en finances à propos du budget de l'Etat 2013 qui a été examiné dans le cadre d'une conférence organisée hier par le parti El Majed dans un hôtel de la place. Comme présenté par M. Hamadi Chouchène, expert financier, le volume du budget 2013, recettes et dépenses, est de l'ordre de 26.792 MD, soit une augmentation de 4,9% ou 1.241 MD par rapport aux résultats attendus du budget 2012. Les estimations budgétaires de 2012 se sont basées notamment sur les résultats attendus au cours de l'année, sur le développement prévu des différents indicateurs économiques de l'année 2013 dont notamment celui qui concerne la croissance prévue de 4,5% sur le prix moyen du pétrole au cours de toute l'année à 110 dollars le baril et sur le niveau du prix de change du dollar à 1,580 dinar. M. Chouchène estime que les amendements à introduire au budget doivent faire l'objet au préalable d'une consultations et discussion avec les experts en tenant compte de la réalité et de la conjoncture économique, loin de toute propagande ou intérêts électifs. Et de constater que «le budget présenté par le gouvernement n'est pas révolutionnaire dans la mesure où il préserve le même contenu que celui des précédents budgets». Les recettes provenant de l'augmentation des ressources fiscales et non fiscales, des biens confisqués et de la vente de la part de l'Etat dans certaines entreprises ne va certainement pas résoudre le problème, selon l'orateur, qui plaide pour «une augmentation de la production pour constituer les fonds propres de l'Etat», souhaitant savoir quel est l'apport du gouvernement dans la constitution de nouvelles ressources financières. Travailleurs des chantiers indisponibles L'expert financier a, d'autre part, prévnu le gouvernement sur l'importance de la préservation des équilibres financiers qui était la règle dans l'élaboration du budget qui tenait compte aussi de plusieurs indicateurs dont les prix des matières premières, du volume de la compensation. Or, aujourd'hui, on a constaté que le schéma de développement est arrivé à saturation, ne pouvant plus répondre aux attentes des citoyens, notamment en matière de création de postes d'emploi. «On peut tabler sur une croissance à deux chiffres, explique l'orateur. Mais l'essentiel est de savoir qui va bénéficier des richesses dans la mesure où les citoyens sont intéressés par leur quotidien, les prix affichés, la création de projets dans leurs régions...». L'orateur estime que les chantiers dans les régions ne constituent pas la solution radicale et pertinente puisque plusieurs bénéficiaires perçoivent un salaire de 300 dinars sans vraiement travailler. En faisant appel à ces travailleurs pour exécuter certains travaux publics, y compris des travaux agricoles, ils ne sont pas toujours disponibles. Le discours des responsables politiques au pouvoir est toujours le même, constate M. Chouchène. La contre-bande présentée comme responsable de l'augmentation des prix et du manque des produits de consommation se fait en camions à partir des usines et aucun contrôle, pourtant possible sur nos routes, n'est effectué. L'orateur va jusqu'à considérer que 50% des usines légales travaillent dans le noir. D'où la nécessité de prendre les dispositions qui s'imposent pour atténuer l'inflation qui a atteint les 5% sans être évoquée par le gouvernement qui a jugé opportun d'effectuer des changements à la tête de l'Institut national de la statistique et de la Banque centrale de Tunisie. L'injection de l'argent sur le marché — pour satisfaire des demandes relatives aux augmentations salariales et autres — peut certes calmer pour un temps la tension mais ne constitue pas une solution radicale dans la mesure où une telle action provoque l'inflation et le glissement de la valeur du dinar. Regrouper les dispositions fiscales De son côté, M. Moncef Akermi, expert en fiscalité, a lu trois fois la loi de finances sans détecter des éléments positifs, selon ses dires. La loi de l'année en cours est même meilleure que celle qui sera appliquée en 2013. En général, la formulation de la loi de finances n'a pas changé depuis 1990. Aucune grande réforme n'a été vraiment engagée. Les remarques formulées par les experts n'ont pas été prises en considération. Pour élaborer une loi pertinente, il est nécessaire d'examiner toutes les problèmatiques posées. En plus de la formulation qui ressemble aux précédents textes, cette loi adopte un contenu et des termes similaires à ses prédécesseurs. Une grande partie des ressources est consacrée à la gestion alors que le développement ne bénéficie pas des fonds suffisants. Pourtant, un expert est en mesure de trouver des solutions à la fuite fiscale, par exemple, estime l'orateur. D'autant plus que la fiscalité reflète une réalité économique. Autant dire que la loi n'a pas donné l'importance escomptée aux dimensions sociale et économique. La réforme fiscale a été évoquée par plusieurs gouvernements successifs sans être vraiment réalisée. Les dispositions prises semblent également vouloir maintenir le commerce parallèle et favoriser la fuite fiscale. En plus, les dispositions fiscales sont multiples et non regroupées dans un seul code, ce qui met l'investisseur dans une situation délicate dans la mesure où il ne sait pas s'il est en règle ou non avec la loi. «La réforme du Code des investissements devrait être précédée d'une réforme du système fiscal», soutient l'orateur, appelant à consulter les experts pour la rédaction du Code en question qui ne doit pas être rédigé dans les bureaux du ministère de la Coopération internationale. «La volonté d'introduire une réforme fiscale est inexistante», pense-t-il. Auparavant, Abdelwaheb Hani, président du parti Al Majed, a regretté l'absence de débat avant la rédaction du budget de l'Etat d'autant plus que la Tunisie dispose de plusieurs compétences. Le discours du chef du gouvernement est peu clair pour M. Hani qui souhaite connaître des dates précises pour trouver une issue aux perturbations. «Les investisseurs veulent plus de visibilité quant au futur», estime-t-il. Plusieurs projets annoncés n'ont pas été encore réalisés comme celui des logements sociaux. Le budget, qui table sur une croissance de 4,5%, est considéré comme très ambitieux de l'avis même du gouveneur de la Banque centrale de Tunisie dont la nomination a fait l'objet de réserves de la part du parti. «Il aurait fallu tenir compte aussi d'un scénario moins optimiste», recommande l'orateur qui n'a pas compris la raison du retard accusé pour la nomination d'un ministre des Finances. Celui-ci devrait être interrogé par les membres de l'Assemblée nationale constituante pour expliquer la portée du budget dont il est l'auteur et non pas pour défendre les orientations du gouvernement qui a pris en charge la rédaction du budget. M. Hani regrette aussi la diminution de la part réservée au développement de 15% et la baisse des fonds propres de l'Etat pour se situer à 75% au lieu de 77% en 2012 et 81% en 2011. Le crédit occupe une part belle dans le financement alors que la compensation connaît une explosion, ce qui prédispose le pays à connaître une situation difficile l'année prochaine.