Par Abdelhamid GMATI Il y a bien des terroristes en Tunisie, et ils sont tunisiens. De fait, on le savait déjà, depuis les événements dramatiques de Rouhia en 2011, de Bir Ali Ben Khélifa en 2012 et tout récemment dans le gouvernorat de Kasserine. Le ministre de l'Intérieur vient de le confirmer en apportant nombre de précisions, entre autres qu'il s'agit d'une cellule d'Al Qaïda appelée Milices de Okba Ibn Nafaâ qui vient d'être démantelée. Seize de ses membres ont été arrêtés alors que 18 autres sont dans la nature. Ces terroristes s'apprêtaient à commettre des attentats contre notamment des édifices publics. On sait que ces groupes sont armés, que leurs armes proviennent de Libye et d'Algérie et qu'ils suivent un entraînement intensif. On peut se demander : comment se fait-il que ce phénomène émerge aujourd'hui, alors qu'Al Qaïda sévit dans certains pays du Maghreb et n'a pas pu s'implanter en Tunisie ? Dans la même veine, on apprend que des jihadistes tunisiens se battent en Syrie. Selon l'ONU, 40% des jihadistes en Syrie seraient des Tunisiens. Selon une enquête menée par un journaliste tunisien, des jeunes tunisiens sont recrutés en Tunisie, passent en Libye où on leur fait miroiter des grosses sommes d'argent, où on les entraîne, avant de se rendre combattre le régime syrien ; 150 d'entre eux auraient été tués. Il y aurait 3.500 Tunisiens, au total. Une question : que vont faire ceux qui reviendront après avoir été familiarisés ave le maniement des armes et des explosifs ? Certainement pas construire des routes. Le ministre des Affaires religieuses donne carte blanche aux imams, estimant qu'ils jouissent de la liberté de parole au même titre que les autres citoyens et peuvent donner leur avis sur tous les sujets, politiques, économiques, culturels. Soit, après tout ce sont des citoyens comme les autres. Mais ont-ils le droit de le faire au sein des mosquées qui sont des lieux de prière et de prêche ? Où est donc la neutralité de ces lieux de culte ? Surtout que comme on l'a constaté à maintes reprises, les prêches de ces imams sont souvent des appels à la fitna, à la violence, au meurtre, jetant l'anathème contre tous ceux qui ne sont pas d'accord avec le parti islamiste au pouvoir. Les mosquées sont devenues au service d'Ennahdha. Certains de ces imams font l'objet de plaintes. Celui de Radès est poursuivi pour incitation à la haine, ayant dans un de ses prêches appelé au génocide des juifs. Un autre imam, à la mosquée Sidi Lakhmi, à Sfax, est poursuivi par plus de 200 avocats pour son prêche où il a appelé à la discorde, à s'entre-tuer et à mourir en martyr en préconisant une guerre sainte contre l'Ugtt, les ex-rcdistes et toute personne qui n'est pas d'accord avec le gouvernement. Une avocate, en hijab, a diffusé une vidéo dans laquelle elle affirme : «Nous allons demander aux prédicateurs dans les mosquées de dire à tous ceux qui viennent prier que tout celui qui votera autre chose qu'Ennahdha ou un parti islamiste est un mécréant, un ‘‘kafer'' et qu'il ira droit en enfer». Et il y a d'autres menaces qui pèsent sur notre pays. Ainsi ce qui s'appelle Ligue de protection de la révolution du Kram vient de diffuser une vidéo dans laquelle elle menace le gouvernement de faire sa propre justice et une deuxième révolution si Kamel Letaïf n'est pas arrêté d'ici le 10 janvier et si «les corrompus» ne sont pas éloignés de la scène politique. Le tout impunément et à visage découvert. A Sousse, la LPR de la région a mené une protestation contre les médias accusés comme toujours d'incompétence et de corruption et a jeté sur une des plages des dizaines de postes de télévision et de journaux. A l'ANC, on se propose d'accorder l'immunité judiciaire à vie au prochain président de la République. L'ancien dictateur s'était aussi octroyé cette protection mais elle a été supprimée avec l'annulation de l'ancienne Constitution. Que veut donc cacher ce projet ? Toujours à l'ANC, son président a imposé un second vote concernant la validation de la nomination du nouveau ministre des Finances. Le premier vote avait donné des résultats inférieurs au nombre de voix favorables requis. Sous prétexte qu'il y avait eu une panne technique, on procéda à un nouveau vote qui, miraculeusement, fut positif. On pourrait aussi ajouter, dans ce chapitre des menaces, le constat fait par le président de l'Association tunisienne pour la transparence financière concernant le prêt de 500 millions de dollars accordé par le Qatar à la Tunisie. Il s'avère que ce crédit est majoré d'un taux de 2,5% alors que la Banque mondiale et le FMI appliquent un taux d'intérêt de 1,3%, et les Japonais se contentent d'un 1,13%. Il y a soutien et soutien. Les menaces sont nombreuses et pernicieuses. D'où la nécessité d'être vigilant.