Le mouvement estudiantin, en l'occurrence l'Union générale des étudiants de Tunisie (Uget), fut parmi les premiers à réagir face à l'effroyable nouvelle de l'élimination politique du militant Chokri Belaïd. A l'annonce de la nouvelle qui a écorché plus d'un coeur, le 6 février 2013, les facultés et autres établissements se sont vidés et les étudiants membres de l'Auget, adhérents ou pas au Parti des patriotes démocrates unifié, se sont dirigés spontanément vers la clinique d'Ennasr pour escorter la dépouille de l'homme qui a inspiré leurs premiers pas dans le mouvement de lutte estudiantine. Grande figure du mouvement estudiantin, Chokri Belaïd a entamé son engagement politique en s'activant dans les années 1980 dans les rangs de l'Auget, se démarquant surtout lors du 18ème congrès extraordinaire du syndicat estudiantin arraché de l'emprise des destouriens. Mercredi dernier, les amphithéâtres, salles de cours et autres couloirs des établissements se sont vite vidés et les étudiants ont investi la rue, afin de rendre un dernier hommage à leur leader et, surtout, dénoncer l'acte barbare qui a mis fin à sa vie et à son élan politique, menaçant d'achever une démocratie fraîchement conquise sous nos cieux. La situation n'a pas trop changé hier, et les étudiants ne semblaient pas s'être résignés à reprendre les cours tant que de vraies mesures politiques n'ont pas envisagés par les détenteurs du pouvoir. «L'Uget informe tous les étudiants de la Faculté des lettres et des science humaines du 9 avril qu'une grève générale est décrétée dès mercredi 6 février 2012, afin de dénoncer l'assassinat du militant Chokri Belaïd. L'Union appelle également les étudiants à participer massivement à l'enterrement national du martyr qui se tiendra le 8 février 2012» (Ndlr : aujourd'hui). Voilà ce que l'on pouvait lire, hier, à l'entrée de la Faculté de 9 avril, désertée par les étudiants. Les enseignants, de leur côté, ont décidé lors d'une réunion matinale qui s'est tenue le même jour de reprendre les cours, après une grève observée la veille. «Officiellement, la grève ne se poursuit pas et les cours ont repris aujourd'hui», nous a déclaré le secrétaire général de cet établissement, connu pour être un des fiefs du mouvement de la gauche estudiantine. «Lors de notre réunion, nous avons encore une fois condamné vivement le crime odieux perpétré contre la personne de Chokri Belaïd. Ce fut également une occasion pour dénoncer toutes les formes de violences perpétrées par de sinistres éléments au sein de notre établissement et au sein d'autres encore, ainsi que pour rappeler les principes que l'on défendra bec et ongles telles que les libertés académiques et la liberté d'expression», nous a confié un enseignant. La couleur est ainsi annoncée dans les rangs des étudiants syndicalisés, et le mot d'ordre est de ne pas fléchir avant d'avoir crevé, une fois pour toutes, cet abcès qui menace de putréfier notre société. Voilà un bel hommage rendu à cette grande figure de l'Uget, à travers la poursuite de la lutte, pour rompre définitivement avec la violence faucheuse de rêves et de libertés.