Durant les 10 premiers mois de 2012, les autocars de la ligne 102 ont généré à eux seuls plus de 2.250.000 DT, soit l'équivalent de 50% de la recette totale des 8 lignes confort de la Srtgn Créée en 1961 sous la dénomination «Société nationale du Cap Bon», la Société régionale de transport du gouvernorat de Nabeul a su évoluer avec le temps en offrant à ses voyageurs des prestations de services sur la base d'un rapport qualité/prix très encourageant. Cela lui a valu en 2001 d'être certifiée «ISO 9002 version 1994» pour son activité de transport des voyageurs sur la ligne confort Nabeul-Tunis (numéro 102) : une première dans le secteur du transport à l'échelle nationale. Depuis, la société a continué son chemin en obtenant : «Au mois de septembre 2009 des certificats de conformité ISO 9001 version 2008 (Qualité), ISO 14001 version 2004 (Environnement et Ohsas) 18001 version 2007 (hygiène, santé et sécurité professionnelle) pour ses activités transport des voyageurs sur les lignes directes et développement de nouvelles lignes directes confort». La ligne 102 : un succès commercial malgré un confort qui laisse à désirer Selon l'avis de ses fonctionnaires et de ses fidèles voyageurs, la première décennie des années 2000 a marqué l'âge d'or de la société en accédant en pole position dans le peloton des sociétés régionales de transport en commun, comme en témoigne l'obtention, au mois d'avril 2010, du certificat de conformité aux exigences du règlement technique relatif au «Label Marhba» dans les espaces d'accueil du siège social et des stations de Tunis «Bab Alioua» et de Nabeul «Lahouach». Durant cette époque, la société a surfé sur une vague de popularité grâce au succès commercial qu'a connu la ligne confort reliant Tunis à Nabeul, mais depuis 2010, rien ne va plus! Le confort et la qualité du service ne sont plus d'actualité surtout au niveau des lignes confort. Selon un document interne de la Srtgn résumant sous forme de statistiques les recettes des huit lignes confort de la société durant les 10 premiers mois de 2012, l'ensemble des autocars de la ligne 102 ont généré à eux seuls plus de deux millions deux cent cinquante mille dinars tunisiens (plus de 2.250.000 DT), soit l'équivalent de 50% de la recette totale des lignes confort. Juste derrière la ligne 102, la ligne 105 reliant Tunis-Hammamet réalise plus de 750 mille DT comme recette totale. Toujours selon ces statistiques, durant cette même période, la recette moyenne d'un seul autocar confort de la ligne 102 a renfloué les caisses de la société avec plus de 225 mille DT, sachant que la recette moyenne par jour pour un seul autocar sur cette ligne reliant Nabeul à Tunis avoisine les 800 DT. Avec de telles recettes, comment peut-on expliquer les défaillances techniques enregistrées sur les bus de la «102» (la vache à lait de la société), ainsi que l'état déplorable des sièges? Pourquoi la Srtgn n'arrive-t-elle pas à renouveler sa flotte? En effet, du côté des voyageurs et des abonnés de cette ligne, nombreux sont les témoignages d'indignation. «Le confort laisse à désirer sur la ligne 102, jadis vitrine de la Srtgn. Du confort, les bus n'ont gardé que l'appellation. En hiver, en temps de pluie, dans certains autocars, l'eau s'infiltre à travers la jointure des vitres et du système de climatisation. Pour faire face à la pluie, il m'est arrivé de me servir des rideaux pour boucher la fuite. J'ai même vu une femme utiliser son parapluie pour se protéger de l'eau qui suintait par le toit. Sans parler du système de chauffage qui ne fonctionne pas dans la plupart du temps. Il est aberrant que la Srtgn continue d'avoir le monopole sur ce trajet. Tout le monde sait que la concurrence du privé pourrait être bénéfique pour le consommateur et pour la Srtgn comme cela a été le cas dans le domaine de la téléphonie mobile et l'internet. La concurrence pousse le service public à relever le niveau de qualité de ses prestations», souligne Slim Troudi, un des fidèles voyageurs de la ligne 102. Un renouvellement au compte-gouttes Et les réclamations ne s'arrêtent pas là. Imen, une jeune étudiante en mastère informatique, témoigne à son tour : «La situation est devenue insupportable. Nous payons un ticket pour voyager sur une ligne confort, finalement c'est une heure de trajet sur un siège inconfortable qui bascule tout seul vers l'arrière». Le calvaire des voyageurs ne s'arrête pas à ce stade. On ne compte plus les coussins complètement détachés des sièges, les conduits de climatisation cassés, les cafards sortant de ceux d'aération. «Je suis très triste pour le sort de la Srtgn. Jadis, cette société donnait l'exemple en matière de qualité de service à l'échelle nationale. A une époque, on a même vu des hôtesses, à chaque départ, parfumer les voyageurs avec du zhar (l'eau distillée du bigaradier, une spécialité de la région) et offrir des calendriers aux voyageurs. Hélas, cette époque est révolue! De nos jours, les usagers de la Srtgn ne cherchent plus que la sécurité en raison de la multitude des pannes mécaniques enregistrées ces dernières années en plein trajet. J'ai vécu cet incident à plusieurs reprises sur la ligne 102. Le bus s'arrête sur l'autoroute et les voyageurs doivent attendre des heures l'arrivée d'un autre autocar, faute de véhicules disponibles, il nous est arrivé de poursuivre le voyage debout alors que nous avions payé pour un siège dans un bus confort. C'est scandaleux!». Le ras-le-bol est aussi palpable du côté des fonctionnaires de la société. Les conditions de travail dans les bus de la ligne 102 sont de plus en plus déplorables. Le confort laisse à désirer et les autocars sont dans un état de vétusté avancé. «A quand un renouvellement de la flotte des autocars confort?», ajoute Hmed Ben Hmed, chauffeur expérimenté sur la ligne 102. Propos confirmés par Fethi Jebali, chef de départ à la Srtgn : «Nous sommes tous tristes pour l'état actuel de nos bus. Jadis, notre société donnait l'exemple en matière de confort et de services. Aujourd'hui, le bilan est très décevant». Selon Karim Chérif, secrétaire général adjoint du syndicat de base de la Srtgn : «Les autocars de la ligne 102 n'ont pas été renouvelés depuis les Jeux méditerranéens Tunis 2001». De son côté, M. Issam Gabsi, directeur d'exploitation au sein de la société explique le retard du renouvellement du parc de la ligne 102, comme suit : «Comme toute société étatique, les décisions pour acquérir de nouveaux bus ne dépendent pas uniquement du conseil d'administration de la société en question mais aussi du ministère de tutelle. Comme vous le savez, avant la révolution, les deux sociétés qui fournissaient les autocars étaient monopolisées par des proches de l'ancien président». En effet, les deux concessionnaires des deux constructeurs allemands d'autocars confort étaient entre les mains des Trabelsi pour la marque «MAN» et de Shakher Materi via sa société «Ennakel», détentrice des droits de commercialisation des véhicules «Wolkswagen» sur le territoire tunisien. «Aujourd'hui, nous venons d'acquérir 7 autocars confort, deux d'entre eux ont été déjà affectés à la ligne 102 (Tunis-Nabeul) et la ligne 802 (reliant Tunis à Zaghouan). Et il est prévu, rien n'est sûr, d'alimenter la ligne 102 par deux autres autocars confort. Cette proposition sera débattue dans le conseil d'administration de la société. Sachons que dans notre société, les décisions ont toujours été prises d'une manière collégiale», renchérit Issam Gabsi. En attendant la réception de nouveaux bus et l'amélioration des conditions de voyage sur ces lignes surtout au niveau des lignes confort, les 40 millions de voyageurs par an de la Srtgn n'ont pas d'autres choix que le «Wait and see»!