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Amor Ben Mahmoud, l'ambiance nostalgique du passé
Portrait
Publié dans La Presse de Tunisie le 28 - 05 - 2010

Dans un enchaînement de compositions picturales, à thèmes variés, balayées par le souffle puissant d'une décharge émotionnelle et cathartique, Amor Ben Mahmoud, en digne prince d'un Kairouan impérial, tire sa révérence
Le 10 juillet dernier nous quittait sur la pointe des pieds un artiste d'excellente extraction, pétri de qualités devenues par les temps qui courent une denrée rare. Il s'agit de Amor Ben Mahmoud, né à Kairouan le 25 décembre 1938. Artiste peintre, il était également sculpteur dont les œuvres, nombreuses, témoignent de son engagement total dans l'art du burin.
Doué d'une sensibilité à fleur de peau qui imprégnait l'ensemble de ses œuvres et qui, jaillies du fin fond du cœur, étaient une sorte de condensé de l'histoire du mouvement de libération nationale; des œuvres exécutées de façon très spectaculaire et à grande échelle.
C'est bien à lui et à Hédi Selmi qu'a échu l'honneur de réaliser le monument des Martyrs de Sedjoumi, représentant un patriote blessé par les forces coloniales et soutenu par une femme. Nous lui devons également la statue sur pied du leader Habib Bourguiba qui se trouve à Menzel-Bourguiba. Dans un autre registre, il a réalisé les fameuses sirènes en cuivre martelé, ornant l'entrée de la ville de Hammamet ainsi que, en collaboration avec Zoubeïr Turki, le buste d'Ibn Khaldoun. Avant de décéder, Amor Ben Mahmoud a sculpté le buste du roi Henri IV, dont la France se prépare à fêter très prochainement le quatrième centenaire de son assassinat par Ravaillac.
C'est en hommage à ce roi (1553-1610) qui, de son vivant, a ramené la paix religieuse et rétabli l'autorité monarchique dans un pays ruiné par plus de trente années de guerres de religion que Amor Ben Mahmoud a réalisé cette œuvre.
Après l'école des Beaux-Arts de Tunis de 1954 à 1958 et l'Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris de 1958 à 1966, Amor Ben Mahmoud a enseigné à l'Ittaaut de 1966 à 1999 et exposé en Tunisie et en France. En 1995, il a été fait Chevalier de la Légion d'honneur, une distinction dont il se glorifiait à bon escient.
La ferveur extatique
Le mois dernier, sa veuve, Yvette, a organisé une exposition rétrospective de ses œuvres (aquarelles et dessins) qui s'est déroulée du 16 au 30 avril 2010 au Palais Essaâda, à La Marsa. Certains tableaux dataient de l'époque où il était étudiant à Paris. Une exposition confrontant ses premières œuvres, réalisées il y a plus d'un demi-siècle, aux toiles plus tardives de sa célèbre série des marines. Une trentaine de belles œuvres dont la moitié remonte au milieu des années 1950, à une époque où il pratiquait avec élégance et brio un certain art figuratif presque naïf, dirions-nous. Dans cette tendance picturale, on se laisse presque bercer, imprégner par cette ambiance nostalgique des fifties avec la scène du «Kouttab» (école caranique). Le meddeb en train d'infliger une punition corporelle à l'aide de sa trique sur la plante des pieds emprisonnés dans une «falqa». Ou de celle du notaire et de son clerc.
Dans cette atmosphère nimbée de souvenirs du passé, on reste saisi et muet face à cet étalage de talent et de virtuosité. Les scènes de la vie quotidienne en milieu citadin ou paysan, argumentées de contrastes et ponctuées d'éclats vifs, expriment les émotions suggestives ressenties par l'artiste face à la réalité des choses. Les scènes, chez lui, baignent dans une lumière étrange qui semble irradier de l'intérieur des formes et il apparaît que le symbolisme —l'artiste a une sainte horreur du cloisonnement — est chez lui une nécessité, afin que l'image ne se contente pas de représenter le monde extérieur, mais aussi d'exprimer et de suggérer certaines pensées ou idées conformes à ses états d'âme. La ferveur extatique de certains visages de femmes et d'enfants rend les peintures très émouvantes. Le portrait de «La Kairouanaise», datant de 1958, somptueuse toile sur laquelle planent des nuances en vibration, en est une parfaite illustration.
Bien qu'originaire de Kairouan, sa peinture explore le monde de la mer et les ambiances océanes, des bâtiments pris dans les filets d'une mer houleuse, déchaînée et furibonde, nous laissent pessimistes quant à l'issue du naufrage. Tout de suite après, on retrouve une mer calme et sereine, réconciliée avec la nature. Les reflets du soleil miroitant sur la surface de l'eau agissent sur nos nerfs, mis à rude épreuve par l'effet boomerang de cette tempête en mer, comme une catharsis. Une décharge émotionnelle qui met en évidence une pensée réfléchie et une excellente maîtrise du métier. Dans une architecture marine où le mouvement du pinceau prend des directions verticales, obliques, horizontales ou diagonales, l'artiste réussit admirablement à nous plonger dans l'univers marin de ces vaisseaux en pleine dérive. Une vision du vide et de l'au-delà.
A travers ses œuvres, Amor Ben Mahmoud nous apparaît aussi attaché à résoudre des problèmes picturaux qu'inspiré par un besoin de libérer ses propres fantasmes ou émotions. Loin de se conformer aux aspects immédiats de la réalité, il les transpose lyriquement en une synthèse où se rencontrent le réel et l'irréel. Si cet art a un aspect évident, manifeste dont le sens est parfois facile à percevoir, il a aussi un aspect assez complexe, une poésie et une fraîcheur délectables qui séduisent le regard.
Amor Ben Mahmoud flirte également avec les portraits, les siens de préférence, saisis dans différentes périodes de son existence. Du nu féminin, présent dans des dessins au crayon et au fusain. Un nu suggestif qui, à travers la sensualité équivoque du regard, parvient à communiquer un érotisme coquin et ingénu, salace et pudibond à la fois.
Pour cet artiste à l'art consommé, il restera, maintenant qu'il n'est plus là, une sorte d'artisan qui ne pouvait faire autrement que de demander à ses mains de traduire sa pensée. Un artisan lucide qui savait que tout langage doit s'apprendre pour pouvoir être utilisé et servir plus exactement l'extériorisation de l'homme.


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