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L'usage exagéré de la force n'était pas justifié Rapport de la commission indépendante d'investigation sur les incidents de Siliana survenus en novembre 2012
Les déclarations de certains hommes politiques, notamment Nouredine B'hiri et Ali Laârayedh, et la partialité du gouverneur à l'époque ont aggravé la situation Le président de l'Assemblée nationale constituante aurait promis de prendre en considération le rapport de la commission d'investigation et le président de la République provisoire aurait promis de prendre en charge médicalement les blessés C'est en se basant sur des entretiens avec 208 personnes, entre blessés et membres de leurs familles, syndicalistes, responsables du gouvernorat, dont l'ancien gouverneur de Siliana, hauts responsables de la sécurité au niveau du ministère et de la salle d'opérations centrale, cadres médicaux à Siliana et Tunis, représentants de la société civile et de partis à Siliana, ainsi que des citoyens en relation avec les incidents, que la commission indépendante chargée de l'investigation sur les incidents de novembre dernier à Siliana a élaboré son rapport final. Ce rapport a englobé les volets sécuritaire, politique et socioéconomique dans la région essayant d'effectuer une corrélation entre ces différents volets. Ladite commission est composée de cinq membres : Messaoud Romdhani, président (membre de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme), Charfeddine Kellil (avocat), Imène Béjaoui (avocate), Romdhan Ben Amor (membre du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux) et Néji Bghouri (ancien président du Syndicat national des journalistes tunisiens). Sur le plan sécuritaire, la commission a insisté sur l'usage exagéré et non justifié de la force et notamment les balles de chevrotine et des bombes lacrymogènes, dont la validité a expiré depuis plus de vingt ans. Le rapport précise que l'emploi des balles de chevrotine n'était pas dans le but de se protéger d'un danger imminent. De même, la commission indépendante d'investigation a souligné le non-respect de la gradation de l'usage de la force face aux protestataires. Tout en indiquant les difficultés qui ont entravé son travail, elle a affirmé que les forces de l'ordre n'ont pas fait participer les personnalités locales et syndicales pour négocier avec les habitants avant d'user de la force. Selon le rapport de la commission, la non-implication des agents originaires de la région de Siliana et le manque d'expérience d'un grand nombre d'agents de sécurité intérieure qui ont affronté la vague de protestation ont été une défaillance dans le traitement du corps sécuritaire avec la situation. Le manque de communication, un défaut majeur Selon le président de la commission indépendante d'investigation, Messaoud Romdhani, le manque de communication entre les différentes parties, notamment la société civile et le gouvernorat, a été à l'origine de la dégradation de la situation, alors que cette région est marginalisée et souffre de la pauvreté et du chômage. Il a souligné les efforts de l'Union régionale des travailleurs qui a demandé dans un premier temps à se réunir avec le gouverneur, qui a affiché une certaine passivité et partialité dans son traitement de la situation, et à négocier avec les habitants de la région dans un deuxième temps. «Ce sont des conclusions et non pas des accusations que nous avons formulée dans ce rapport final. Ce qu'a vécu Siliana est une vraie tragédie et un tournant dangereux avec ce qui a été enregistré dans plusieurs cas entre autres de handicaps permanents», a-t-il affirmé. D'après lui, tant que la communication fera défaut, la tension persistera. De son côté, Charfeddine Kellil a affirmé que plus de treize agressions ont été relevées par la commission et qui ont été commises par les forces de sécurité, indiquant que des journalistes ont été visés par les balles de chevrotine dont le correspondant de France 24 et celui du journal Achourouk. Il a souligné que certaines bombes lacrymogènes, utilisées les 8 et 9 novembre 2012, portaient des dates périmées (1984)... De la tension dans l'air Les membres de la commission ont indiqué que le travail de cette commission indépendante d'investigation n'interfère pas avec celui des autorités judiciaires et qu'elle déposera prochainement des plaintes pénales quant aux différents crimes enregistrés. Quant à Imen Béjaoui, elle a, comme Néji Bghouri, évoqué les blessures enregistrées du côté des habitants et protestataires, notamment au niveau des yeux et qui causent des difficultés énormes pour les blessés. Elle a insisté sur l'importance de l'ouverture d'une investigation administrative au sein du ministère de l'Intérieur, tout en soulignant le devoir de rectifier les discours de certains hommes politiques au niveau du gouvernement. Pour sa part, Kellil a affirmé que les déclarations de certains responsables, dont ceux de l'ancien ministre de la Justice transitionnelle et des droits de l'Homme, Noureddine B'hiri, et de l'ancien ministre de l'Intérieur, Ali Laârayedh, ont affecté l'amour-propre des habitants de la région de Siliana et Kasserine. Ce qui, selon elle, a rendu la situation plus tendue. Pour sa part, le président de la commission indépendante d'investigation sur les incidents de Siliana, Messaoud Romdhani, a affirmé que la commission a eu des assurances quant à la prise en compte du rapport par le président de l'Assemblée nationale constituante, Mustapha Ben Jaâfar. De même, il a indiqué que le président de la République provisoire, Moncef Marzouki, a promis la prise en charge médicale des blessés des incidents de Siliana. De graves dépassements Revenant sur le déroulement des évènements de Siliana du mois de novembre dernier, le rapport de ladite commission a souligné que les visages et les dos des protestataires ont été pris pour cible par les agents de l'ordre, ce qui confirme, d'après lui, leur manque d'expérience. Des cas d'avortement, de lynchage, d'agression d'une ambulance, d'intrusion à l'hôpital régional , 131 agressions d'agents de l'ordre, 137 blessés parmi les habitants dont 93,65% parmi les hommes et 72% survenus le 28 novembre, un cumul de marginalisation sociale et économique, ce sont, entre autres, les conclusions auxquelles a abouti l'investigation. Le rapport a englobé aussi un diagnostic de la situation après les incidents, qui reste fragile jusqu'à aujourd'hui... Les recommandations formulées par la commission, qui attribue la grande part de responsabilité dans ce qui s'est passé au gouvernement, ont porté sur la réhabilitation des blessés, leur prise en charge médicale, la nécessité de dévoiler la vérité, l'intégration de ces incidents dans le processus de justice transitionnelle, la réactivation du processus de réforme du secteur sécuritaire, l'installation d'un code de bonne conduite pour les agents de sécurité intérieure, le renforcement de la présence des indépendants au sein des structures régionales de l'Etat et de la communication entre la société civile et les représentants du gouvernement à l'échelle régionale, etc.