«Un autre monde est possible», tel est le slogan du Forum social mondial qui fut créé en 2001 à Porto Alegre (au Brésil) en réponse au Forum économique mondial de Davos. Pour bâtir cet «autre monde» où seront bannis le «néo-libéralisme, la domination du monde par le capital ou par toute autre forme d'impérialisme», il faut de l'argent pour réunir le monde autour de convictions profondément «altermondialistes». Chaque année depuis 2001, le Forum social mondial brasse des millions de dollars pour que se tienne cette rencontre entre les mouvements altermondialistes du monde entier. A titre indicatif, le Forum de cette année qui se déroule à Tunis, bénéficie d'un budget de 1,5 million d'euros (selon L'Economiste maghrébin) dont moins de 10% proviennent des inscriptions des participants, le reste étant généreusement mis à disposition par ce qu'on appelle des organisations non gouvernementales. En 2003, la très controversée Fondation Ford (notamment pour ses liens avec la CIA), créée en 1936 par Henry Ford propriétaire de la célèbre voiture, a largement financé le Forum social mondial qui s'est déroulé en Inde. Certains rapports d'institutions et d'activistes «antimondialistes» attestent que même la Rockefeller Foundation (créée par des banquiers) a financé certaines activités du Forum social mondial. Ce qui est intéressant à signaler, c'est que la charte de principe du Forum social mondial, ne fait état d'aucun article traitant des sources de financement. Pour la 12e édition du Forum social mondial, les documents distribués citent quatre bailleurs de fonds mondiaux, que sont la Oxfam, la Friedrich Ebert Stiftung, Terre solidaire ainsi que Brot fûr die Welt (pain pour tout le monde). Mais qui sont ces ONG ? Commençons d'abord par la puissante Friedrich Ebert Stiftung, qui est une ONG liée au PSD (Parti social-démocrate allemand) et dont les fonds proviennent de l'Etat allemand, qui n'est pas du tout hostile à la mondialisation. Oxfam, quant à elle, tire ses fonds essentiellement du Royaume de Grande-Bretagne, qui, lui non plus, n'a rien à reprocher à la mondialisation, il en est au contraire l'un des acteurs principaux. Quant aux deux autres bailleurs de fonds, il s'agit de «pain pour tout le monde» (une association des églises protestantes d'Allemagne), et «terre solidaire» qui est un groupement d'églises françaises financées en partie par l'Union européenne, ainsi que par le ministère des Affaires étrangères. Pour un forum altermondialiste, dont les organisateurs ont veillé à ce qu'aucune présence «d'officiels» n'apparaissent à l'image, ces constats laissent sceptiques. C'est que les altermondialistes, contrairement aux antimondialistes, acceptent la mondialisation et ne refusent pas le capitalisme, souhaitant le moraliser, pour un monde meilleur, et par conséquent ne sont pas rigoureusement exigeants par rapport aux bailleurs de fonds. Certains analystes soutiennent que la puissance du système capitaliste est telle qu'elle est en mesure de contenir et d'amortir les mouvements sociaux tel un gigantesque trou noir. C'est ce qu'ils appellent le «soft power» (force douce) qui n'hésite pas à flirter avec leurs détracteurs jusqu'à les pervertir.