Par Abdelhamid Gmati Lors de la guerre d'indépendance de l'Algérie, les forces d'occupation française avaient érigé, à partir de juillet 1957, le long de la frontière algéro-tunisienne, une ligne de défense armée appelée «ligne Morice» du nom du ministre français de la défense à l'époque. Cette ligne, longue de 460 km, était barbelée, électrifiée, minée et surveillée en permanence. Elle visait à couper les combattants algériens de leurs bases et de les empêcher de pénétrer dans le territoire tunisien. Au prix de beaucoup de sacrifices, les valeureux combattants algériens bravaient cette ligne et venaient quand même en Tunisie, pour se ressourcer, rencontrer leurs chefs, soigner leurs blessés, s'approvisionner et repartaient au combat. Après l'indépendance de l'Algérie, cette ligne a continué à faire des victimes avec les 11 millions de mines implantées. Ce n'est qu'en octobre 2007 que les plans de ces mines furent livrés aux autorités algériennes qui les désamorcèrent. Ce rappel est juste pour souligner la grande difficulté de la tâche qu'accomplissent nos militaires et nos forces de sécurité, au prix de nombreuses victimes, pour ratisser cette immense zone sur le Chaâmbi, montagneuse, forestière, truffée de grottes et de ravins, difficile d'accès et pour traquer des dizaines de terroristes installés depuis quelque temps déjà et préparant des actions terroristes dans notre pays. 37 terroristes ont été arrêtés et 35 autres sont pourchassés dans les zones frontalières. On compte plusieurs Tunisiens parmi ces terroristes qui ont déjà accompli des actions meurtrières depuis plus d'une année : Rouhia, Bir Ali Ben Khalifa, Sidi Bouzid, Jendouba, Hergla, Bouchebka, Fernana, Le Kef, etc. Selon les autorités, ces groupes sont liés entre eux et il y en aurait dans plusieurs régions, y compris dans la capitale. Les nombreuses caches d'armes découvertes dans plusieurs endroits ces derniers temps attestent de l'activisme de ces groupes. Sans vouloir être alarmiste outre mesure, il faut néanmoins s'attendre à des actions terroristes. D'autant que la violence politique s'est installée dans notre pays, sans qu'aucune action d'envergure pour l'éradiquer n'ait été prise par les autorités, malgré les appels répétés de plusieurs partis politiques et de la société civile. Les Tunisiens s'inquiètent de ce climat d'insécurité qui prévaut depuis plus d'une année. Cette insécurité, inconnue jusqu'ici, est-elle fortuite ou préméditée ? Certes, la révolution a libéré une vague de mécontentements qui s'est exprimée par des manifestations pacifiques et des grèves. Mais ce sont les agressions violentes, perpétrées par des salafistes et les milices des LPR, qui ont déclenché cette insécurité. On a tous en mémoire les attaques contre des réunions de partis de l'opposition, contre des personnalités politiques, contre les artistes, les journalistes et les forces de l'ordre. Le policier gradé Mohamed Sboui, atrocement torturé et tué, en est une des victimes. Aujourd'hui, on franchit une nouvelle étape pour s'attaquer aux militaires. Des niquabées salafistes (peut-être des hommes travestis) ont distribué, au Kef, des tracts appelant au jihad contre l'Armée nationale. Selon certaines sources sécuritaires, les extrémistes religieux s'apprêteraient à entamer des actions pour éliminer des agents de sécurité et des journalistes. Samedi dernier, face à la caserne de la Cité El Khadra, des salafistes ont installé une tente et ont qualifié les agents de sécurité de «taghout» qui méritent la mort. La police, informée, a arrêté certains de ces malfaisants. Ajoutons à cela les nombreux prédicateurs wahhabites qui se baladent en Tunisie pour semer la haine et la discorde appelant à l'élimination des mécréants. En toute impunité. Pire, sur invitation de groupements islamistes et encouragement de certains députés nahdhaouis qui vont les accueillir en grande pompe et les accompagner dans leurs meetings. Le député Sadok Chourou estime que le jihad est un devoir tandis que son collègue nahdhaoui Habib Ellouze invite tous ceux qui ne sont pas d'accord avec lui et son mouvement à quitter le pays. A Sfax, on s'en prend aux petits enfants : dans un jardin public (sur la route de l'aéroport) un groupe de gamins d'une dizaine d'années s'entraînent au jihad sous la direction d'un guide qui les initie aussi aux slogans religieux et guerriers. Il faut être doté d'une dose anormale de naïveté pour croire que tout cela, que cette insécurité est fortuite. Alors, qui en est l'instigateur et à qui cela profite-t-il ? Suivez mon regard, dirait l'autre. Mais M. Samir Dilou, ministre des Droits de l'Homme, nous livre gratuitement une piste. Selon lui, les élections ne peuvent pas être organisées dans un climat de violence. CQFD.