L'enfance tunisienne a dépassé les besoins primaires relatifs aux pays en voie de développement, comme le droit à l'éducation, à la santé, à la protection, pour signifier des exigences autres, déclenchées, entre autres, par un contexte socioéconomique, démographique et politique en mutation. Le rapport de l'Unicef sur la situation des enfants en Tunisie pour l'année 2012, «Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012» vient d'être publié, mettant en exergue une réalité à cheval entre des défis significativement relevés pour un pays classé sur la liste des pays en développement, d'une part, et des enjeux nouveaux, engendrés notamment par des mutations d'ordre démographique et socioéconomique, d'autre part. Il faut dire que les questions classiques relatives au domaine de l'enfance, notamment les droits de cette tranche sociale aux besoins spécifiques en matière de protection et de droits se trouvent quelque peu dépassées. En 2012, la Tunisie a réussi à démontrer la pertinence des prestations et des mécanismes établis afin de servir les droits des enfants, notamment le droit à l'éducation, à la santé, au développement, etc. Elle rejoint, dans ce sens, le fil des pays «au développement humain élevé». En effet, et pour ce qui est du droit à l'éducation, notre pays a réussi à asseoir les bases d'un système éducatif régi par plus du quart des ressources publiques et accaparant jusqu'à 7% du PIB. La généralisation de l'accès à l'éducation va de pair avec les principes fondamentaux des droits de l'enfant à l'éducation et au savoir. Néanmoins, il reste beaucoup à faire afin d'optimiser les prestations éducatives et de les hisser au niveau escompté; un niveau répondant aux besoins de la classe estudiantine en termes de qualité, de réduction de la disparité interrégionale et de promotion des compétences enseignantes via des outils de motivation du corps enseignant, mais aussi des mécanismes permettant une meilleure autonomie des structures éducatives. Il convient, également, d'accorder à l'éducation préscolaire la place qu'elle mérite dans le paysage éducatif, tant sur le plan quantitatif que celui qualitatif, tout en veillant au respect du principe de la décentralisation et de la lutte contre la disparité entre les régions. Pour ce qui est du droit de l'enfant, et des jeunes, à la santé, il convient de souligner l'amélioration notable des prestations réservées à cette tranche d'âge. Cela dit, d'autres problèmes jugés comme étant de santé publique menacent les enfants et les jeunes en particulier: le tabagisme, l'alcoolisme, la toxicomanie, les rapports sexuels non protégés et le risque de maladies sexuellement transmissibles, sans oublier le phénomène de la violence, y compris dans le milieu scolaire. Malgré la mise en place de structures et de programmes de lutte contre ces phénomènes sociaux, le recours des adolescents à ces structures demeure limité faute de moyens matériels, mais aussi de préjugés et de «barrières psychologiques». La protection des enfants figure, par ailleurs, au cœur de la politique infantile. La promulgation des textes juridiques nationaux et autres, internationaux, notamment la Convention des droits de l'enfant, le Code de protection de l'enfance en est la preuve palpable. La condamnation des abus apportés aux droits de l'enfant et à sa dignité concrétise de ce fait l'importance accordée à cette question. Cependant, l'Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012 appelle à la nécessité d'adopter une démarche globale impliquant tous les intervenants et à la mise en place de programmes sociaux éducatifs, ainsi que des mécanismes de suivi à même de parfaire les actions pour la protection de l'enfance. Minimiser les risques, valoriser les atouts Aussi, maints enjeux sont à prendre plus au sérieux afin de doter les enfants des moyens leur permettant de mieux développer leurs capacités et d'exploiter leur énergie au profit d'une contribution plus efficiente au développement socioéconomique et technologique, ainsi qu'au processus démocratique. Ce sont les enfants d'aujourd'hui qui construiront l'avenir de la Tunisie. D'où l'impératif de les soutenir dans cet élan quasi spontané en les protégeant contre les facteurs à risques qu'ils encourent et en leur apportant des alternatives salvatrices, voire bénéfiques pour tous. Or, la situation actuelle semble équivoque . Les enfants, notamment les Tunisiens âgés entre 0 et 18 ans, sont confrontés à un contexte incertain qui leur dresse un avenir placé sous le signe du flou plutôt que sous le signe des perspectives. En suivant les cours dans les collèges et lycées, l'adolescent — considéré comme enfant par rapport aux majeurs de plus de 18 ans —, se heurte, moralement, au spectre régnant du chômage. Il est plus que jamais temps de revoir la politique infantile en Tunisie et de l'ajuster, non pas selon les objectifs fixés pour l'amélioration de la situation des enfants dans les pays en voie de développement, mais conformément aux besoins des enfants et des adolescents tunisiens dans un contexte de transition démocratique. Impliquer les enfants et les jeunes dans la prise de décision des programmes qui leur sont destinés s'avère être essentiel afin d'optimiser les programmes et les prestations adoptées. Il convient également de réfléchir sur les solutions susceptibles de minimiser les risques de délinquance, de violence et de déscolarisation et de valoriser, par contre, les atouts pro-enfance. La coopération entre la Tunisie et les organisations internationales œuvrant pour l'enfance s'impose avec une plus grande pertinence, quitte à opter pour des modalités et des domaines de coopération nouveaux. L'Unicef souligne dans son rapport l'impératif de miser sur l'amélioration des capacités et la mise en place de réformes à même de rendre plus performante la politique infantile dans notre pays.