La police a arrêté hier en Egypte un cadre important des Frères musulmans ainsi qu'un ex-ministre du président Mohamed Morsi destitué par l'armée, a annoncé le gouvernement dans le cadre d'une répression sans précédent et meurtrière du mouvement islamiste. M. Morsi, premier président élu démocratiquement en Egypte, a été destitué et arrêté le 3 juillet par l'armée après que des millions de manifestants eurent réclamé son départ. Le 14 août, le gouvernement mis en place par les militaires a ordonné la dispersion par la force de tous les rassemblements et manifestations des pro-Morsi, une opération qui a provoqué un bain de sang, en particulier au Caire. Plus d'un millier de personnes ont été tuées en une semaine, des manifestants pour l'essentiel, et plus de 2.000 Frères musulmans ont été arrêtés depuis, dont les principaux dirigeants. Hier, Mohamed Beltagi, ancien parlementaire et l'un des derniers leaders encore libres de la confrérie de M. Morsi, a été interpellé selon un communiqué du ministère de l'Intérieur. Il était l'un des principaux organisateurs des rassemblements pro-Morsi du Caire et l'un des orateurs les plus actifs et les plus virulents des Frères musulmans. M. Beltagi a été arrêté dans une banlieue du Caire en compagnie de Khaled Al-Azhari, ministre du Travail du gouvernement de M. Morsi. Les arrestations se poursuivent quotidiennement dans les rangs des Frères musulmans à tous les niveaux de l'encadrement, locaux et nationaux. C'est pourquoi, en plus d'avoir décimé les rangs des manifestants les plus actifs, le gouvernement a ainsi réussi à affaiblir considérablement la capacité des Frères musulmans à mobiliser. Depuis dix jours, les manifestations des pro-Morsi se font rares et ne rassemblent plus que quelques centaines de personnes la semaine, quelques milliers le vendredi. Les Frères musulmans avaient la capacité d'en rassembler des centaines de milliers avant le 14 août. La direction de la confrérie, qui avait remporté haut la main les législatives de 2012, a été décapitée après le 14 août avec l'arrestation de son Guide suprême, Mohamed Badie, et de ses deux adjoints, dont le procès pour incitation au meurtre s'est ouvert le 25 août. Les pro-Morsi appellent à des manifestations aujourd'hui Les partisans du président islamiste destitué par l'armée Mohamed Morsi, cibles d'une répression sanglante depuis deux semaines en Egypte, ont assuré hier qu'ils avaient l'intention de continuer de manifester, notamment après la grande prière du vendredi. Cette annonce intervient alors que le gouvernement intérimaire mis en place par les militaires a réitéré son autorisation aux soldats et policiers qui quadrillent Le Caire et les grandes villes d'ouvrir le feu sur tout manifestant qui s'en prendrait à des biens publics ou aux forces de l'ordre, une autorisation interprétée de la manière la plus large depuis 15 jours. Plus d'un millier de personnes —essentiellement des manifestants pro-Morsi— ont été tués durant la seule troisième semaine du mois d'août dans la dispersion de leurs rassemblements, et plus de 2.000 arrêtés dont les principaux dirigeants des Frères musulmans, l'influente confrérie de M. Morsi, laquelle avait largement remporté les législatives de 2012. «Nous accueillons favorablement les appels à l'apaisement mais nous allons continuer à manifester pacifiquement», a déclaré hier dans une conférence de presse Salah Jomaâ, l'un des membres de l'Alliance pour la Démocratie et contre le coup d'Etat, composée essentiellement de Frères musulmans. L'Alliance a appelé à de nouvelles manifestations aujourd'hui, au Caire et dans l'ensemble du pays, pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme un coup d'Etat de l'armée, qui a destitué et arrêté M. Morsi le 3 juillet. Mais depuis dix jours, les Frères musulmans dont les rangs ont été décimés et les leaders arrêtés ont du mal à mobiliser, ne réunissant que quelques milliers de manifestants tout au plus au Caire où ils pouvaient en rassembler des centaines de milliers avant les premiers assauts meurtriers des forces de l'ordre le 14 août. Hier, le porte-parole de la police a mis en garde contre tout débordement lors des manifestations prévues aujourd'hui, en répétant que soldats et policiers étaient autorisés à tirer. L'Alliance contre le coup d'Etat a également publié hier un communiqué réitérant ses demandes de libération des détenus islamistes, dont les chefs des Frères musulmans, et réclamé une enquête sur les violences meurtrières qu'elle impute à l'armée et aux forces de l'ordre. L'alliance a également appelé à l'arrêt des campagnes d'arrestations et à boycotter les journaux, télévisions et les produits de sociétés d'hommes d'affaires «soutenant le coup d'Etat». Les médias égyptiens privés et publics, qui invoquent à l'unisson avec le gouvernement et l'armée une «guerre contre le terrorisme», font état quotidiennement d'arrestations de cadres intermédiaires des Frères musulmans dans tout le pays.