Par Dr Taoufik SKHIRI L'eau source de vie, est en voie de raréfaction sur la planète Terre. L'eau est très inégalement répartie sur la surface du Globe où près d'un milliard et demi de personnes n'ont pas accès à l'eau potable. L'eau est en voie de devenir un enjeu politique de survie pour plusieurs pays. Elle est et sera source de conflits entre des pays riverains. Ainsi, Israël contrôle les eaux du Jourdain au dépens de ce qui reste de la Palestine. La Turquie érige des barrages sur le Tigre et l'Euphrate provoquant des frictions avec ses voisins la Syrie et l'Irak. Chatt El Arab, qui s'étend sur 170 km à l'embouchure des deux fleuves réunis, est en train de s'assécher pour le manque d'eau, et en raison de la pollution et du manque d'entretien, modifiant de fond en comble le mode de vie des paysans. En raison de d'exploitation des eaux du Nil par l'Ethiopie, l'Egypte menace d'intervenir. Dans de nombreux pays, la qualité de l'eau se dégrade du fait des rejets domestiques, agricoles et industriels sans traitement préalable. Le danger touche également les réserves d'eau douce. Les nappes phréatiques sont surexploitées et subissent une pollution par infiltration. La pollution de l'eau frappe aussi bien le Nord que le Sud, mais les conséquences ne sont pas les mêmes. Alors que dans les pays développés les stations d'épuration sont légion, dans les pays du Sud, les eaux usées sont déversées dans la nature sans avoir subi un traitement préalable. Résultat : une contamination des eaux à l'origine de maladies graves (choléra, typhoïde, etc.). Selon l'OMS, 32% de ces maladies pourraient être évitées par un meilleur assainissement de l'eau. De par le monde, 30.000 personnes meurent chaque jour par manque d'eau potable et de services d'hygiène. A Singapour-ville, Etat de 4,5 millions d'habitants d'une superficie de 700 km2, ainsi que la ville de Windhoek en Namibie, l'eau potable vient directement des égouts, après avoir subi plusieurs étapes de traitement. En Tunisie, une action louable est en cours. Les étudiants de l'Institut supérieur de biotechnologie ont mis au point un bioréacteur à membrane pour traiter les eaux usées qui seront utilisées pour l'irrigation et les cultures maraîchères. La Tunisie est un pays semi-aride, la pluviométrie est en moyenne de 1.000 mm dans le Nord, entre 200 et 400 mm au Centre et de moins de 200 mm dans le Sud. L'eau de surface représente 2.700 millions de m3. L'eau souterraine, 2.140 millions de m3. L'agriculture consomme 83%, l'industrie 5%, le tourisme 1%, l'usage domestique 11%. La qualité de l‘eau est variable du Nord au Sud où elle peut atteindre et dépasser 5 grammes de sel/litre d'où la mise en place de 4 stations de dessalement: à Kerkennah, Djerba, Gabès et Zarzis. Au cours de cet été, plusieurs régions ont souffert de coupures d'eau. L'économie d'eau est et doit devenir un devoir national, sa consommation rationalisée par un comportement anti-gaspille à promouvoir : a-t-on besoin de laver sa voiture ou tirer la chasse d'eau avec de l'eau potable? A-t-on besoin de se laver les dents avec un litre d'eau ? La vaisselle consomme en moyenne 40 l/j et plus. Cette quantité peut être réduite en utilisant les 2 bacs de l'évier, l'un pour le lavage, l'autre pour le rinçage en évitant de laisser couler inutilement l'eau. L'hygiène corporelle et les bains consomment en moyenne 140 l d'eau par personne, une réduction est possible par l'utilisation des douches. Les baignoires 200 l sont à proscrire. Pour se brosser les dents, un verre d'eau est largement suffisant. Dix à 20 l d'eau pour chasser 200 cc d'urine est à éviter. Il existe des économiseurs d'eau, à défaut on peut réduire le volume des bacs à eau en y plaçant une ou deux bouteilles. L'arrosage des espaces verts est à faire le soir ou le matin, l'évaporation de l'eau pouvant atteindre 40% de l'eau utilisée. L'agriculture, grande consommatrice (83%) devrait revoir à la baisse cette quantité par l'utilisation du système goutte à goutte, par l'évitement de l'évaporation. L'eau est rare en Tunisie, apprenons à mieux la consommer, en fermant les robinets après usage, à réparer les fuites, à encourager les réservoirs d'eau douce par la construction systématique des majels, à défaut mettre à disposition des citernes de 500 à 1.000 l pour recueillir l'eau de pluie. L'encouragement de l'Etat peut se concrétiser par l'octroi de prêt remboursable, sans intérêts. Pour conclure, disons avec Mathieu Calame : «Sans eau, il n'y a pas de culture, donc pas de nourriture», ce qui peut nous faire avancer que le spectre de la famine peut encore menacer le genre humain.