Le tour de magie étant de parvenir à convaincre tout le monde à mettre en veilleuse leurs différends et autres rivalités Al Massar a donné hier à 12h00 une conférence de presse à son siège à Tunis. Un rendez-vous pris avec les journalistes, deux jours après le dénouement que l'on sait du feuilleton Dialogue national. Objectif : clarification de la position du parti taxée d'équivoque. Pour rappel, Al Massar a choisi de ne pas se retirer samedi de la table des négociations, au moment du vote portant sur le choix du chef du gouvernement. Mais tout en restant, le parti d'opposition a opté pour un bulletin blanc. Une attitude mi-figue mi-raisin, qui n'a pas manqué d'attirer quelques réflexions. D'autant que les composantes du Front du salut national, à savoir Nida Tounès, Al Jouhmouri, Front populaire, Al Massar, chacune y est allée de sa petite chanson. Une incohérence qui a culminé, justement, lors de cette étape ultime du vote. Dans le hall exigu de la section de Tunis, le porte-parole, Samir Taïeb, était assis au centre, épaulé à sa droite par Ahmed Brahim, secrétaire général, et à sa gauche par l'élue Karima Souid. Taïeb a réitéré la volonté de son parti de se conformer aux dispositions de la feuille de route qui reste en vigueur. Tout en ne cautionnant pas le choix, non consensuel, de Mehdi Jomâa au poste de chef du gouvernement, a-t-il tenu à préciser. Les processus gouvernemental et constitutif doivent cependant être mis en application, pour l'intérêt du pays, a-t-il encore martelé. Solidaires aux jours ordinaires Répondant aux questions relatives à l'interventionnisme éventuel des Occidentaux, Ahmed Brahim a rejeté toute ingérence des chancelleries dans la désignation du chef du gouvernement. Il a toutefois précisé, adroitement, que la lenteur des négociations et leur inanité ont entraîné l'impatience de tout le monde, à l'intérieur de la Tunisie comme à l'extérieur. Karima Souid s'est attachée, quant à elle, à mettre en avant la contribution de son parti à la mise en place de la loi fondamentale portant sur la justice transitionnelle, votée samedi dernier. Une justification qui répond aux accusations d'absences prolongées qui ont visé sa personne et son parti dans les travaux des commissions. L'élue a précisé l'introduction de sept amendements par le concours de sa collègue Selma Baccar dans le texte de loi. La Presse a posé une question relative «à la pertinence des coalitions, à l'instar du Front du salut national ou l'Union pour la Tunisie, et l'efficacité de leurs solidarités, reconnues les jours ordinaires, ignorées dans les rendez-vous décisifs, le dernier exemple étant le Dialogue national, où chaque parti a fait cavalier seul, est édifiant» Samir Taïeb a d'emblée défendu le Front du salut en tant qu'acquis national, malgré ses déficiences. «Une réunion devra se tenir d'ici peu en vue de remettre les pendules à l'heure», a-t-il informé. Le dirigeant de l'opposition a fini par reconnaître les implications négatives des divergences qui ont miné le camp de l'opposition. Malgré le fait, a-t-il analysé, que dans tout regroupement chaque famille politique tient à garder sa spécificité. Si l'on devait, in fine, placer la réunion d'hier sous un signe, ce serait celui de la sagesse. Le parti Al Massar, conformément à la ligne tracée par son géniteur originel Al Kotb — première version —, a œuvré à unir les forces démocrates de ce pays, et continue de le faire, sans toujours y parvenir. La sagesse n'étant pas la seule qualité requise dans la sphère politique, il faudra du pragmatisme et un calcul froid des positions de force. Le tour de magie est de parvenir à convaincre tout le monde à mettre en veilleuse les différends et autres rivalités, pour atteindre ensemble un objectif commun : faire l'équilibre contre un adversaire de taille. Faute de quoi, il faudra bien se résigner à jouer les seconds rôles. Ces deux dernières années en offrent de multiples cas pratiques.