Les conflits au sein de la commission de législation générale risquent de tout saborder Les membres de la commission parlementaire de législation générale, planchant depuis près d'un mois sur la prochaine loi électorale, seront-ils dans les délais qui leur sont impartis pour achever leurs travaux et proposer le texte définitif de la loi en question à la séance plénière d'ici fin mars, comme l'a souligné dernièrement Mustapha Ben Jaâfar, président de l'Assemblée nationale constituante. La question s'impose avec insistance d'autant plus que les discussions au sein de la commission se trouvent confrontées à d'importants désaccords portant sur 18 points qui seront examinés par la commission des consensus dans une première étape et pourraient être transférées devant la plénière du Dialogue national, en dernier recours. En plus clair, les discussions risquent de traîner au point de rendre la date des élections présidentielle et législatives, devant se tenir impérativement d'ici fin 2014, compromise. Pour en savoir plus, La Presse a sondé les réactions de certains acteurs du paysage politique national, de la société civile et parmi les constituants pour savoir si la loi électorale sera prête dans les délais. Risque d'une «catastrophe constitutionnelle» Pour Jawher Ben M'barek, enseignant de droit constitutionnel et président du réseau «Doustourna», «les points de discorde relevés au sein de la commission de législation générale sont d'abord politiques. Ils opposent essentiellement les grands partis politiques désirant conserver un système électoral qui leur permet de s'imposer lors du prochain rendez-vous électoral. A l'opposé, les petits partis veulent que le système qui a présidé aux élections du 23 octobre 2011 soit réaménagé de manière à leur donner l'opportunité de dépasser les scores qu'ils ont réalisés il y a trois ans». La commission de législation générale est-elle habilitée à trancher une telle affaire ? Jawher Ben M'barek est tranchant : «Il n'est pas question qu'un tel dossier soit confié aux membres de l'ANC qui nous ont habitués aux décisions confuses et précipitées. C'est la raison pour laquelle il faut que le Dialogue national soit chargé de la responsabilité de trouver la solution aux conflits posés». Notre interlocuteur précise encore : «Nous risquons une véritable catastrophe politique et constitutionnelle au cas où les élections ne se tiendraient pas dans les délais fixés par la Constitution du 27 janvier 2014. Malheureusement, certains partis politiques cherchent à faire retarder les élections en privilégiant leurs intérêts partisans». Toutefois, Ben M'barek garde toujours son optimisme : «Ma conviction est que les élections auront lieu comme prévu en dépit des tiraillements entre les partis politiques. Mehdi Jomâa est clair là-dessus et il l'a souligné de nouveau dans sa dernière interview télévisée». Pour conclure, il estime : «Nous sommes encore dans les délais. Si la Constitution est adoptée d'ici avril prochain, l'Isie aura le temps nécessaire pour organiser les élections avant fin 2014». Un code électoral ou une loi électorale Riadh Ben Fadhl, secrétaire général d'Al Qotb et membre du Front populaire, pose la problématique selon une autre approche: «Au départ, au Front populaire, nous demandions un code électoral et non une loi électorale. La différence est substantielle. Dans le code électoral, sont incluses les élections municipales et les élections régionales alors que la loi électorale que tout le monde attend se limitera aux élections présidentielles et législatives. Nous avons dû accepter la proposition d'Ennahdha qui soutient que la loi électorale peut se transformer en un Code électoral, une fois les élections organisées». Comment le Front populaire perçoit-il la résolution des points de désaccord au sein de la commission de législation générale ? Ben Fadhl énumère les revendications du Front populaire : «D'abord, nous sommes pour le parrainage des candidats par les électeurs de leurs régions. Ensuite, le Front populaire refuse totalement la concomitance des élections présidentielle et législatives pour la simple raison que son coût financier est extrêmement élevé. L'Isie n'a pas, d'autre part, les moyens de gérer la concomitance. Pour le moment, nous n'avons pas tranché mais nous avons un petit faible pour la prééminence de la présidentielle. Enfin, pour ce qui est du financement de la campagne électorale, nous sommes pour la prise en charge ultérieures par l'Etat à condition que seuls les partis ou listes ayant réalisé 4% des voix recouvrent leurs dépenses». On décidera, ce lundi Du côté de l'ANC, on a programmé une réunion, lundi prochain, des chefs des groupes parlementaires. A l'ordre du jour : l'examen des points de discorde. Saïd Kharchoufi, constituant de «Tayyar Al Mahabba», précise: «Pour le moment, rien n'a été décidé à propos de la réactivation de la commission des compromis et ce sont les chefs des blocs parlementaires qui essayeront de débloquer la situation sur les désaccords relatifs en particulier au parrainage, au financement de la campagne électorale, à la concomitance de la présidentielle avec les législatives, etc.».