A scruter les projets des alliances en vue des prochaines élections, les Tunisiens pourraient se retrouver face à quatre grands pôles politiques Au moment où Mehdi Jomâa et ses ministres se démènent un peu partout en vue de renflouer les caisses vides de l'Etat et que le Fonds monétaire international et la Banque mondiale commencent à rouvrir timidement les vannes, sans oublier les promesses des pays du Golfe de réactiver les mégaprojets bloqués depuis la révolution, l'on assiste à une vaste dynamique de remodelage du paysage politique national, à travers une série d'alliances futures que les concepteurs présentent comme «la solution idéale pour faire front à la bipolarisation Ennahdha - Nida Tounès». Où en sont ces projets d'alliances et quels sont leurs objectifs et les mécanismes sur lesquels ils vont s'appuyer ? Les Tunisiens assisteront-ils, à la faveur des prochaines élections présidentielle et législatives (dont personne n'est actuellement en mesure de dire quand elles seront organisées), à une nouvelle composition de la scène politique nationale, offrant quatre grands pôles : la droite conservatrice pilotée par Ennahdha, la droite libérale conduite par Nida Tounès, la gauche traditionnelle sous l'égide du Front populaire et la mouvance centriste se présentant déjà comme le Front social démocrate ? Autant d'interrogations qui requièrent précisions et éclaircissements de la part des acteurs du paysage politique national , pour qui il «est normal que les choses bougent bien que la date des élections ne soit pas encore définie et que la loi électorale, dont les dispositions pourraient influencer les futures alliances, ne soit toujours pas adoptée par l'Assemblée nationale constituante». Une alternative à la bipolarisation Mahmoud Baroudi, membre du bureau exécutif de l'Alliance démocratique, révèle : «Oui, nous sommes actuellement en concertations avancées avec Al Joumhouri, le mouvement Achaâb et le Parti du travail, en vue de constituer un front centriste à même de faire face sérieusement à la bipolarisation Ennahdha-Nida Tounès qui cherchent à accaparer par tous les moyens la scène politique nationale». «Nous estimons, ajoute-t-il, que le paysage politique national sera dominé par quatre grands pôles politiques, à savoir premièrement, Ennahdha et les partis gravitant autour de Montplaisir, deuxièmement Nida Tounès et les partis qui partagent ses orientations, dont en premier lieu ceux coalisés au sein de l'Union pour la Tunisie, troisièmement, le Front populaire composé des partis dits de la gauche traditionnelle et enfin, le Front centriste qui regroupera l'Alliance démocratique, Al Joumhouri, le Parti du travail et le mouvement Achaâb. Ce front ne sera pas fondé sur le choix d'un candidat quelconque en vue de l'élection présidentielle, mais plutôt sur des programmes d'avenir pour la Tunisie, dont nous traçons actuellement les grandes lignes». Non à la fusion Du côté des destouriens, plus particulièrement auprès de l'Initiative nationale destourienne (quatre partis d'obédience destourienne) dirigée par Kamel Morjane, les choses sont claires. «Nous coaliserons, précise Nizar Ben Saâd, membre de la direction de l'Initiative, avec ceux qui nous sont proches et avec lesquels nous avons des affinités culturelles, idéologiques et historiques. Et ces partis sont principalement Nida Tounès et le Front destourien dirigé par Dr Hamed Karoui». Cependant, le dirigeant destourien reconnaît qu'il existe un grand risque «dans ces alliances qui se préparent un peu partout. Il s'agit du délitement des partis considérés comme étant de petits partis politiques. Ces partis risquent de disparaître de la scène politique nationale au cas où les alliances attendues opteraient pour leur fusion au sein des partis dits grands ou influents». Bien que l'Initiative nationale destourienne ne soit pas menacée de disparition, eu égard à son poids et sa représentativité, plus particulièrement dans le Sahel, nous sommes contre l'idée de fusion». Nous attendons la loi électorale «Nous avons eu une rencontre de concertation, mercredi dernier, avec l'Alliance démocratique, le mouvement Achaâb et le Parti du travail dirigé par Ali Romdhane. Nous avons enregistré un rapprochement tangible dans nos visions, dans la mesure où nous sommes d'avis qu'il existe une opportunité réelle pour que les forces démocratiques modérées puissent faire entendre leurs voix et faire prévaloir leurs approches. En tout état de cause, nous avons convenu de nous rencontrer de nouveau à la suite de l'adoption par l'ANC de la loi électorale en vue de voir comment définir les conditions de cette future alliance», confie Issam Chebbi, porte-parole d'Al Joumhouri. Mais, du côté des Berges du Lac, Nida Tounès considère que «les alliance dont on parle actuellement sont prématurées, puisque personne ne sait pour le moment à quelle date seront tenues les élections présidentielle et législatives». «Toutefois, reconnaît Noureddine Ben Ticha du bureau directeur de Nida Tounès, nous coaliserons avec nos alliés traditionnels, en premier lieu ceux de l'Union pour la Tunisie, mais aussi avec le Front populaire. En dépit des déclarations de certains de ses responsables, le Front populaire n'a pas encore décidé d'affronter tout seul les élections. Donc, il est possible qu'on coalise».