La loi de finances complémentaire pour l'exercice 2014, adoptée mercredi soir en Conseil des ministres, devrait atterrir aujourd'hui à l'Assemblée nationale constituante (ANC). Un projet de loi placé sous le signe de la relance et du redressement économique, sans aucune mesure d'austérité ». L'équation est certes difficile, mais paraît-il réalisable Une loi de finances complémentaire pour l'exercice 2014 est pour le moins qu'on puisse dire nécessaire, impérative, voire obligatoire. La réalité économique étant difficile, morose avec un déficit budgétaire important, il fallait des solutions urgentes et des mesures correctives. Le gouvernement Mehdi Jomâa a opté, à juste titre d'ailleurs, pour la mise en place d'une loi de finances complémentaire (LFC), et non pas pour des solutions de colmatage, à l'instar de la diplomatie économique. Cette dernière aurait pu aider, mais elle n'offre pas des solutions à long terme. Aussi, le projet de la LFC au titre de l'exercice 2014 se propose-t-il d'être un plan de redressement de l'économie nationale, d'une part, et un moyen de réduire le déficit budgétaire, de l'autre. Force est de reconnaître que le déficit budgétaire est des plus importants. Il est clair que les dépenses de l'Etat sont supérieures à ses ressources. En d'autres termes, les dépenses ont augmenté de manière vertigineuse, avec une quasi-stagnation des recettes fiscales. En effet, les dépenses s‘élèvent à environ 30 milliards de dinars, contre des recettes de l'ordre de 20 milliards de dinars. Une situation difficile à soutenir. Contexte économique fragile Par ailleurs, la Tunisie connaît une situation de fragilité économique importante. Il est à rappeler que l'hypothèse sur laquelle a été bâtie la loi de finances 2014 était surestimée, avec un taux de croissance de 4%. Un taux désormais ramené à 2,8% par le gouvernement Jomâa. Taux certes plus réaliste. Néanmoins, le peu de croissance réalisée n'est en rien tirée par les investissements. Bien au contraire, la croissance est plutôt tirée par l'agriculture, le tourisme et la légère reprise de l'activité phosphate. Enfin, le projet de la LFC 2014 intervient dans une conjoncture internationale pas très favorable, avec une Europe, partenaire essentiel de la Tunisie, proche de la déflation, d'une part, et une augmentation du prix du baril de pétrole, qui passe de 110 dollars à 115 dollars, suite à la crise en Irak. Partant de l'équation difficile que le gouvernement devrait résoudre, est en premier lieu de stopper la détérioration des finances publiques sans mesures d'austérité. Sans compter qu'il fallait le consensus de toutes les parties concernées, afin que le projet de LFC puisse passer à l'ANC. Et le dialogue économique national, à travers ses commissions préparatoires, a constitué un cadre idoine pour trouver des solutions adéquates et surtout à long terme. Parce que l'idée principale était non pas d'élaborer un projet de LFC où l'on cherche le simple équilibre financier mais plutôt un projet porteur d'une vision économique. D'où le signe sous lequel est placée la LFC : « Vers un redressement économique ». Il fallait redresser la croissance, les finances publiques et toute l'économie nationale. Un projet qui bénéficie de l'approbation de tous, notamment au niveau des grandes orientations et principes mis en avant, avec en prime préserver les grands équilibres à travers la réduction du déficit budgétaire. Ce dernier devrait, au regard de la déclaration de Nidhal Ouerfelli, porte-parole du gouvernement, à l'issue du Conseil des ministres, pour l'adoption de la LFC, passer de 6,9% à 5,2%. Priorité : réduire le déficit budgétaire La priorité des priorités du gouvernement Jomâa, à travers la LFC, est de consolider le devoir fiscal et de lutter contre la contrebande avec des mesures simples, mais nécessaires. Des mesures qui concerneraient entre autres le passage du régime forfaitaire au régime réel pour plusieurs secteurs d'activité. Il est à préciser, quand même, que le régime forfaitaire ne serait pas supprimé définitivement mais il serait réorienté vers ceux qui le méritent. Aussi, apprend-on, 68 secteurs passeraient, après la promulgation de la LFC 2014, au régime réel. Pour certains métiers, la LFC prévoit que les métiers à équivalent dans le secteur public seront soumis au même taux d'imposition que leurs homologues dans le public. Par contre, les métiers qui n'ont pas d'équivalent dans le secteur public, ne paieront pas en dessous de ce que paye la profession. Cette mesure devrait, selon des sources bien informées, générer 150 MD de recettes fiscales pour les caisses de l'Etat. En matière de contrebande, il s'agirait d'abord d'instaurer pas seulement des amendes. La LFC prévoit également d'autres mesures coercitives. Sachant que la lutte contre le commerce parallèle et la contrebande est un travail de longue haleine, qui exige un suivi, de l'effort et de l'énergie. Mais, le gouvernement Jomâa est déterminé à oser pour le moment, dans la mesure du possible. Dans le même contexte, la LFC prévoit une disposition concernant « la levée du secret bancaire », avec des garanties La LFC pour l'exercice 2014 est basée, par ailleurs, sur la rationalisation des dépenses publiques et non l'adoption d'une politique d'austérité qui pourrait avoir un impact sur les catégories à faibles et moyens revenus. A ce titre, il est à noter que les produits de base subventionnés destinés aux familles ne subiraient aucun changement. En attendant, le ministère des Affaires sociales est en train de travailler sur l'identifiant social unique, afin de rationaliser, dans une seconde phase, la subvention. La rationalisation des dépenses de l'Etat concernant les frais de fonctionnement, de développement, les dépenses imprévues et autres permettraient visiblement à l'Etat, si tout va bien, de faire des économies de l'ordre de 1,6 milliard de dinars. La LFC est aussi basée sur la mise en place de dispositions visant le développement de la croissance et de l'investissement. Deux fondamentaux nécessaires qui exigent par ailleurs une stabilité et une visibilité sans lesquelles le site tunisien des affaires n'intéresserait personne. Il est donc nécessaire de mettre en place une vision claire sur le long terme. Car il y va de l'intérêt et de l'avenir du pays. Le gouvernement Jomâa a eu le mérite de redorer le blason du site tunisien des affaires et de rétablir la confiance en la destination Tunisie. Aujourd'hui, il appartient à tous et à toutes de reprendre le travail, de redémarrer l'appareil productif, d'améliorer la productivité, de réinstaurer la stabilité et la paix sociale dans le pays. En outre, ce projet met au point l'accélération de la mise en place de réformes économiques structurelles, l'adoption d'une politique de solidarité et d'intégration sociale, ainsi qu'une nouvelle approche pour la prochaine période.