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Cette actualité qui nous prend de court
Le terrorisme dans les médias
Publié dans La Presse de Tunisie le 22 - 07 - 2014

Voilà presque trois ans que les évènements relatifs au terrorisme jihadiste marquent notre actualité. Mais les médias se laissent encore surprendre par chaque attaque comme si elle était la première
Mercredi 16 juillet 2014. Près de quatre heures après la double attaque terroriste qui a coûté la vie à quinze soldats en poste à Henchir Ettalla du mont Châambi, la chaîne de télévision publique El Watanya 1 poursuivait le long fleuve tranquille de sa programmation ramadanesque, à peine troublée par la bande défilante rendant laconiquement compte d'une nouvelle attaque jihadiste à Châambi. Derrière la chaîne dite «locomotive», même amnésie, même attente indéfinie sur les écrans privés dont rares font défiler les tubes patriotiques de circonstance, de Beni Watani ( Enfants de ma patrie ) d'Oulaya à «Ana Joundi» (je suis un soldat ) de Bouchnak...
Le bilan de la dernière heure
Face à un public tenu en haleine et une opinion en colère, toutes les radios et toutes les chaînes attendaient une intervention officielle et un bilan fiable qui tardaient à venir. Ce soir-là, aucun mėdia, aucune rédaction n'osera se hasarder loin de la version officielle et se lancer dans une « aventureuse» production maison autour du grand sujet national et mondial du terrorisme. De quoi situer le dernier événement dans sa longue chaîne logique et chronologique, sécuritaire et géopolitique. De quoi faire œuvre de pédagogie, participer à l'explication d'un phénomène aux multiples facettes. De quoi s'acquitter simplement de son devoir de média qui ne se réduit pas à répercuter les messages de.la communication gouvernementale.
Il n'en fut rien, et il faudra attendre le milieu de la nuit pour qu'une conférence de presse pressée et laconique du ministère de la Défense soit diffusée avec un bilan d'avant le sommeil, peu plausible et très loin du compte réel, mais sur lequel aucun média ne rebondira. Toutes les rédactions semblent convenir que demain est un autre jour, avant d'aller se coucher.
D'où vient cette absence de réactivité des médias? Pourquoi les opérations terroristes continuent-elles à étonner des rédactions que rien ne devrait surprendre dans leur mission d'informer et d'expliquer ?
Beaucoup invoquent la spécificité du sujet du terrorisme mais très peu prennent la peine de la déterminer.
Certes, une attaque terroriste est une actualité spéciale, extrêmement délicate dont la couverture en direct et le traitement en général procèdent un peu du journalisme de guerre. Sa médiatisation s'inscrit en partie dans les stratégies de la guerre psychologique propre à toutes les guerres. Mais le terrorisme jihadiste a cela de spécifique : qu'il implique autrement et de manière plus problématique les médias.
La deuxième arme
Pour les groupes jihadistes, une des phases cruciales de l'acte terroriste est sa médiatisation. Dans la littérature des chefs d'Al Qaïda et leurs théories, l'offensive reste inachevée, si elle n'est pas suivie par sa médiatisation et sa mise en spectacle. Il est attendu de celle-ci qu'elle puisse produire le choc et l'effroi dans le grand public. Images insoutenables de sang, de feu et de larmes, de drame et de terreur qui, d'une opération à l'autre, ont pour finalité de participer progressivement à l'instauration du chaos qui préfigure l'installation du Califat.
Dans cette stratégie, les médias sont impliqués de près, pris à parti et bien souvent instrumentalisés à leur insu. Ils constituent la deuxième arme du terrorisme.
De leurs complicités, ou même de leurs balbutiements, leurs erreurs ordinaires et leurs graves dérives, le terrorisme jihadiste tire aussi sa victoire comme il le fait du bilan de ses victimes qui valent par eux-mêmes, comme autant d'insignes, que par l'image, le discours et le message qui s'en diffusent.
Et c'est cette situation problématique qui met les médias face à un dilemme de taille : comment informer de l'acte terroriste sans dramatiser ni toucher au moral des troupes ? Comment montrer la capacité destructrice des organisations terroristes sans faire l'apologie de leur redoutable puissance et sans les doper? Comment dévoiler leurs stratégies sans montrer leur longueur d'avance sur l'armée et la police qui les combattent ? Comment expliquer l'histoire et le présent de leur action sans la banaliser, sans la justifier ou la blanchir ?... Le plus difficile étant d'observer le bon dosage et le ton adéquat... Mais qu'est-ce que le bon dosage et qu'est-ce que le ton adéquat?
Le terrorisme n'est pas à débattre
Dans la foulée des réactions à la dernière double attaque du mont Châambi, le Snjt et la Haïca apportent, au soir du 17 juillet, un début de réponse et décident ensemble de mettre en vigueur une stratégie médiatique globale et un code de conduite devant encadrer et réguler le traitement des questions liées au terrorisme. Selon d'autres parties de la société civile, la solution résiderait plutôt dans la spécialisation des journalistes chargés de ces questions...
Entre les deux solutions, le journaliste professionnel rompu à l'expérience des terrains ardus tire une tout autre conclusion. Pour lui, le sujet, certes inédit et délicat du terrorisme en Tunisie, exige néanmoins le même professionnalisme, la même rigueur, la même maîtrise, le même respect des règles professionnelles et les mêmes bonnes pratiques de recherche, d'investigation, d'accumulation des données qui constituent le fort de tous les sujets difficiles.
Mais trois ans de traitement et de couverture de l'actualité du terrorisme jihadiste montrent que ce niveau de professionnalisme basique fait généralement défaut à nos médias. Outre quelques rares organes de la presse écrite et quelques sites d'information, le reste des médias, notamment ceux de l'audiovisuel public et privé continuent à céder à l'urgence et l'improvisation et à recourir au genre unique du talk show. Désespérément pris de court par une actualité devenue pourtant épisodique, ces plateaux constituent un raccourci ludique et facile particulièrement prisé par les animateurs et leurs invités. Sur fond d'un déficit d'informations, le produit de ces plateaux est un défilé incessant de figures d'experts, de penseurs et de politiciens manipulant l'évènement à la mesure de leurs idéologies respectives et de leurs positions partisanes tranchées. L'acte terroriste devient sur ces plateaux le lieu de toutes les instrumentalisations, de toutes les propagandes partisanes et précampagnes électorales. Ballotté entre les points de vue et les polémiques, le grand public en sort égaré.
La communication gouvernementale reprend ses droits
Pourtant, le terrorisme a ceci de particulier : que sa couverture médiatique ne s'accommode pas des points de vue idéologiques et des débats partisans. Le terrorisme ne se débat pas. Il s'expose, s'analyse, s'explique à coups de recherches, d'accumulation de données ( histoire, théories, bilans, protagonistes, témoignages de terrain, recoupement de sources, chronologies, images...)
La télėvision publique censée être locomotive de la qualité professionnelle et de la règle éthique n'a toujours pas produit sa matière documentaire, ces longs films du réel que les télės produisent dans l'urgence ou à froid, à chaque fois qu'une question d'intérêt public exige sa part de pédagogie quotidienne et soutenue.
20 juillet 2014. Quatre jours après la double attaque de Châambi, au journal de 20 heures de la chaîne de télévision publique, c'est plutôt la communication gouvernementale qui reprend ses droits et diffuse ses propres images de suspects arrêtés et de soldats à l'assaut... Parallèlement, la cellule de crise réunie à la présidence du gouvernement pose dans la foulée des décisions inscrites au registre de la lutte antiterroriste, les lignes rouges au-delà desquelles les médias ne peuvent revendiquer de libertés...
Une sommation liberticide qui n'aurait pas droit de cité si les médias s'étaient parés contre le terrorisme et comportés comme un acteur compétent et responsable.


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