La fermeture de 21 mosquées décidée par la cellule de crise du gouvernement en fin de semaine dernière continue de faire polémique. Hier, le parti Ennahda a appelé à la réouverture des lieux de culte dans « les plus brefs délais», selon les mots de son porte-parole Ziad Ladhari. «On inflige une double peine aux croyants qui subissent d'abord l'islam radical puis la fermeture de leurs mosquées», a-t-il assuré. Plus virulent, le parti Tayyar El Mahaba a également rejeté cette décision avec vigueur dénonçant «une fausse solution» : «Cette décision peut profiter aux terroristes qui gagneront le soutien des populations en accusant l'Etat d'être contre la religion», a soutenu Said Kharchoufi, porte-parole du parti. « On ne vise pas les vrais lieux de culte avec autorisation, s'est défendu le chef de cabinet du ministère des Affaires religieuses, Abdessatar Badr, nous nous attaquons aux établissements installés de manière illégale sur le territoire qui sont hors contrôle et présentent un danger». Selon lui, 90% de ces mosquées interdites ont un discours extrémiste; elles incitent les jeunes à partir faire le djihad ou soutiennent les actions terroristes. Pourquoi le gouvernement ne les ferme-t-il que maintenant ? «Il faut prendre des mesures fermes après les attaques au Mont Chaâmbi», a répondu Abdessatar Badr faisant référence aux attaques qui ont fait 15 morts parmi les soldats tunisiens la semaine dernière. Collaboration entre la Justice, l'Intérieur et les Affaires religieuses Afin d'identifier ces lieux de prière hors-la-loi et leurs prêcheurs, le ministère des Affaires religieuses travaille en collaboration avec les ministères de la Justice et de l'Intérieur : «Deux commissions ont commencé à travailler depuis lundi pour régulariser la situation de ces endroits», explique Abdessatar Badr. En tout, le gouvernement a recensé 91 mosquées hors-la-loi établies de manière anarchique après la Révolution : «Nous nous sommes attaqués aux plus dangereuses», explique Najat Hammami, du bureau de presse du ministère des Affaires religieuses. Aucune information n'a été confirmée par les ministères sur l'éventuelle arrestation d'individus lors de ces opérations cette semaine. Pour Zied Ladhari, du parti Ennahda, le risque est que ces mosquées restent fermées pendant trop longtemps : «Nous soutenons les opérations qui visent à se débarrasser de ceux qui utilisent les mosquées à des fins partisanes et de prosélytisme, mais nous craignons que ça ne prenne trop de temps». C'est également un «mauvais précédent» pour le parti Tayyar el Mahaba : «D'autres pays dans le monde pourraient prendre exemple sur la Tunisie pour fermer des mosquées», craint Said Kharchoufi, leur porte-parole. Encore 37 Mosquées hors de contrôle En plus de la lutte contre les mosquées hors-la-loi, le gouvernement doit aussi reprendre le contrôle des lieux de culte autorisés par l'Etat mais accaparés par des intégristes. Le ministère des Aaffaires religieuses assure avoir récupéré 112 mosquées sur les 149 considérées comme rebelles depuis qu'il est au pouvoir. Les équipes de travail dépêchées par les trois ministères (Justice, Intérieur et Affaires religieuses) dans le cadre de la cellule de crise, travaillent avec les 680 prédicateurs de toute la Tunisie pour reprendre le contrôle des institutions religieuses. Si un Imam ne respecte pas la déontologie religieuse, il peut être limogé par un prédicateur après accord du ministère. Un Imam n'a par exemple pas le droit de prononcer un discours politique à la mosquée. «Nous recevons parfois des courriers de citoyens ou des avertissements des prédicateurs», assure Najat Hammami du ministère des Affaires religieuses.