RAMALLAH, Cisjordanie (Reuters) — Barack Obama et Benjamin Netanyahu plaident pour une reprise des négociations directes de paix au Proche-Orient, mais les Palestiniens dénoncent le piège d'un accord qui les enfermerait dans la création d'un Etat aux pouvoirs et aux contours restreints. Avant de revenir s'asseoir à la table des négociations, l'Autorité palestinienne demande des réponses à plusieurs questions en suspens: quelle forme pourrait prendre cet Etat ? Quel serait le tracé de ses frontières ? L'armée israélienne se retirerait-elle de la vallée du Jourdain ? A ces interrogations s'ajoutent des incertitudes pesant sur le gel temporaire des activités de colonisation juive en Cisjordanie, décrété par Benjamin Netanyahu en novembre 2009 et qui doit prendre fin en septembre. C'est à cette date que s'achèveront les «discussions de proximité» entamées en mai sous la médiation de l'émissaire américain George Mitchell et prévues pour durer quatre mois. Israël juge que ce dialogue sous l'oeil des Etats-Unis constitue une perte de temps et que Palestiniens et Israéliens devraient discuter sans intermédiaire pour trouver un accord. Lors de son entrevue avec Netanyahu, mardi à la Maison-Blanche, Barack Obama a répété qu'il était favorable à cette option, confirmant que le début de la négociation directe avant septembre était essentiel à la survie du processus de paix. «La clé des négociations directes se trouve dans les mains du Premier ministre Netanyahu», affirme Saeb Erekat, chef des négociateurs palestiniens. «A la seconde où il annonce un gel (total) des colonisations, à la seconde où il annonce une reprise du dialogue sur un statut définitif là où il fut interrompu en décembre 2008, nous entamerons les négociations directes», a-t-il ajouté. Craignant d'apparaître comme responsables d'un éventuel échec, les Palestiniens rappellent qu'ils ont passé la majeure partie des 17 dernières années à participer au «processus de paix». Ils rappellent également que trois présidents américains se sont succédé durant cette période et ont montré des niveaux d'implication très divers, sans que cela change quoi ce soit au résultat. Les négociations directes, menées avec le gouvernement d'Ehud Olmert alors au pouvoir, ont été interrompues en décembre 2008 lors de l'intervention israélienne dans la bande de Gaza sous le contrôle du Hamas qui refuse tout traité de paix avec Israël. Barack Obama n'a eu de cesse de presser Netanyahu, de retour aux affaires après les législatives de février 2009, de renouer les fils du dialogue. «Les Etats-Unis ne peuvent pas accepter la légitimité d'une colonisation israélienne continue. Ces constructions violent les précédents accords et sapent les efforts pour parvenir à la paix. Il est temps que cette colonisation cesse», affirmait Obama dans une allocution prononcée au Caire, il y a 13 mois. Les espoirs palestiniens nés de cette déclaration avaient été vite douchés lorsque le président américain avait ensuite adopté une position nettement moins ferme sur la question du gel total des activités de peuplement israélien. L'association israélienne de défense des droits de l'Homme B'Tselem a rendu public cette semaine un rapport qui montre que plus de 300.000 colons juifs sont implantés sur 42% de la Cisjordanie, territoire que les Palestiniens revendiquent dans une «solution à deux Etats». «Si nous nous engageons dans les négociations directes sans principes clairs sur la nature du futur Etat palestinien, les Israéliens pourront se retirer et nous dire: ‘Nous vous avons offert un Etat et vous n'en avez pas voulu'», explique Nabil Abou Rdainah, conseiller du Président palestinien Mahmoud Abbas. «Nous ne voulons pas que lors de la prochaine phase on puisse nous reprocher d'avoir refusé l'offre d'un Etat palestinien sur, disons, 60% de la Cisjordanie», a-t-il ajouté. «Nous voulons participer à des négociations directes qui ont pour but de créer un Etat palestinien suivant les frontières de 1967 avec quelques échanges de territoires. Nous voulons savoir sur quoi nous allons négocier. Ce que Netanyahu ne veut pas dire», a-t-il poursuivi. Les Palestiniens attendent maintenant que George Mitchell leur fasse part de la teneur des entretiens entre Obama et Netanyahu et leur précise les «mesures concrètes» envisageables. Interrogé sur la télévision américaine hier, le Premier ministre israélien n'a pas répondu à la question du gel des colonies juives.