La viande de mouton espagnol est disponible sur le marché à 18DT500 le kilo : un prix concurrentiel qui reste, pour certains, inabordable. Après la sensible baisse du prix de la viande bovine opérée à l'occasion de Ramadan, le consommateur tunisien a eu droit à une autre faveur. Il faut dire que c'est bien lui qui a réussi, pour une fois, à rationaliser le prix de cette viande devenue, depuis le 14 janvier 2011, un produit de luxe. Se trouvant dans l'incapacité de faire l'acquisition du mouton du sacrifice et de célébrer cette fête religieuse en bonne et due forme, bon nombre de Tunisiens se sont abstenus de cet acte qui risquait de fragiliser leurs budgets Aussi, la société Ellouhoum s'est-elle retrouvée avec quelque 2.590 moutons sur le dos, soit près de 45% des têtes de moutons importés d'Espagne. Une marchandise qui commence à être liquidée dans les 13 unités de vente implantées au Grand-Tunis, à raison de 18DT500 le kilo. Ce prix s'avère tentant surtout en comparaison du prix de la viande d'agneau tunisien qui se situe à 23DT le kilo. «A la banlieue sud, l'on propose la viande d'agneau à 25DT le kilo, ce qui est exaspérant», indique Mme Najet Kacem, cliente rencontrée au Marché central. Cette dame ne se présente pas en amatrice de viande rouge. Cela dit, elle juge qu'une telle occasion est à saisir. «Personnellement, j'ai vécu à l'étranger et je suis persuadée que la qualité de la viande made in Europe est nettement meilleure que la tunisienne. D'autant plus que le prix de la viande d'agneau espagnol est plus qu'intéressant», indique-t-elle. Un avis que ne partage point M. Ridha Ben Taârit, un autre client au Marché central qui trouve le prix de liquidation des moutons espagnols assez gonflé. «Cela reste tout de même inaccessible par rapport au Tunisien de moyen revenu et nettement élevé en comparaison du coût initial. Pour liquider cette marchandise, il fallait procéder à une tarification tentante à même et de satisfaire le consommateur et de combler les dépenses de l'importation ; soit 12DT le kilogramme», suggère-t-il. Il est à noter que le prix fixé par la société Ellouhoum est censé compenser tout juste les dépenses liées à l'importation. «Notre objectif consiste à liquider cette marchandise restante et rationaliser les prix de la viande de mouton. Nous n'avons donc aucune marge bénéficiaire en proposant le mouton espagnol à 18DT500. D'autant plus qu'il n'est point question de nuire au produit tunisien. Les 2.590 moutons espagnols n'influeront pas sur la commercialisation des 150 mille moutons tunisiens», précise M. Sofiene Massaoudi, directeur financier de la Société Ellouhoum. Du côté des bouchers, les avis convergent sur cette mesure occasionnelle : pour certains, ce prix concurrentiel serait susceptible de dynamiser, un tant soit peu, un métier en mal de résistance. «Le commerce de la viande va mal à cause de la flambée des prix et de la baisse du pouvoir d'achat. Vendre le mouton à raison de 18DT 500 contribuerait, foncièrement, à séduire le client réticent», pense l'un des bouchers du Marché central. M. Haykel Bondka, boucher relevant de la société Ellouhoum, a remarqué une légère affluence grâce à cette offre promotionnelle. Pour lui, la viande espagnole est de bonne qualité. Ce qui n'empêche la majorité des rares clients de préférer le produit tunisien. «Personnellement, avoue-t-il avec le sourire, je propose la viande mais je n'en achète pas. Son prix reste trop élevé par rapport à mon modeste budget». Un peu plus loin se trouve l'échoppe de M. Sami Chihi, un autre boucher exerçant au Marché central. Sami ne se montre pas partant pour vendre la viande de mouton espagnole et ce, en raison d'une marge bénéficiaire minime ne dépassant pas les 700 millimes par kilogramme. Côté qualité, il trouve que le mouton espagnol est trop gras par rapport au mouton tunisien. Un autre boucher, qui préfère garder l'anonymat, parle d'une série de problèmes d'ordre sanitaire qui le dissuadent de proposer cette viande. «Bon nombre de consommateurs se sont déplacés le jour de l'Aïd au siège de la société Ellouhoum pour des réclamations et dans l'espoir d'être remboursés. Ces clients ont été choqués par la mauvaise qualité des moutons importés. Des foies jaunis et autres incrustés de cailloux ont fini par gâcher l'ambiance à ces clients», indique-t-il.