Le dirigeant étoilé crie au complot et livre un procès gratuit contre la Télévision nationale et, par-delà, aux médias sportifs Houcine Jenayeh confirme, encore une fois, qu'il manque d'expérience et de sens de la retenue. En moins de 6 heures, il est intervenu deux fois sur la Télévision nationale pour créer deux polémiques. La première, après s'être imposé à notre confrère, Jamel Hasnaoui, juste après le match CAB-ESS pour condamner, en toute hystérie, un complot qui vise l'ESS. Quelques heures après, on le trouve invité VIP du «Dimanche sport». Au lieu de défendre les intérêts de son équipe, loin de toute instrumentalisation régionaliste ou politique, il nous sort un discours agressif, frôlant la provocation, en attaquant presque tout le monde : public du CAB, Hassana, arbitre du match, les autres clubs, et surtout la Télévision nationale et l'équipe qui a retransmis le match polémique CAB-ESS. Que reproche alors Houcine Jenayeh à la Télévision nationale? Tout simplement, le fait de focaliser sur une banderole où il y a des propos vulgaires envers la région du Sahel. D'abord, on condamne cette banderole et tous propos visant la région du Sahel, ainsi qu'à toutes les autres régions. Mais en quoi l'équipe technique, le cameraman et le réalisateur sont-ils coupables? Pouvait-on ne pas transmettre l'information et relater les faits? Quand on passe un match, la télévision doit tout passer, quitte à frôler «l'interdit» : ceci relève du travail. De plus, le champ du cameraman peut parfois contenir des banderoles outrageuses et le terrain en même temps. Que peut-on faire alors? Jenayeh va encore plus loin, en faisant un lien suspicieux entre le commentaire de Jamel Hasnaoui lors d'un certain ESS-ESR (basket) et son attitude envers l'invité du «Dimanche sport» avant-hier, quand il l'a arrêté en direct. Mais où va-t-on avec cette diabolisation des médias sportifs? Jenayeh invoque le motif «télévision publique». Un organe financé par l'argent du contribuable qui paye doublement : l'impôt et la redevance sur la facture de l'électricité et du gaz. Mais cela veut dire que la Télévision nationale doit se tenir à la même distance de tout le monde et non le fait de devenir le porte-parole d'un club. Le dirigeant étoilé a eu même l'audace de diriger le débat et d'orienter Hichem Guirat (qui était dans une situation embarrassante) dans l'interprétation de la «moviola». Ce n'est pas tout, on va même jusqu'à l'instrumentalisation politique, en disant que la région du Sahel est visée par tout le monde depuis la révolution! Comme si, avant le 14 janvier, nos stades étaient de véritables théâtres. Comme si, avant le 14 janvier, l'ESS et les chants régionalistes n'existaient pas. Faux, archifaux. C'est un modèle politique protégé depuis l'Indépendance où le régionalisme était une vraie politique d'Etat. On se souvient juste du duel politico-sportif entre l'EST et l'ESS pour confirmer les dires de Janayeh. Bref, ce fut un procès gratuit des médias et du football tunisien en général, comme si seule l'Etoile était la victime des chants vulgaires et régionalistes. On se rappelle juste ce qu'ont fait Marouen Tej et les joueurs étoilés envers le public sfaxien, en célébrant la Coupe gagnée. Cela, Houcine Jenayeh ne l'a pas cité, et vous vous souvenez des images misérables qu'on a vues en direct à la «Télé» et en présence du chef du gouvernement. Que veut-on des médias? On a un petit reproche à faire à nos collègues de la télé. Pourquoi ils permettent à n'importe qui d'attaquer les journalistes sportifs, de les incriminer, de les empêcher d'entrer au stade et de faire leur boulot (n'est-ce pas M. Jenayeh?!) chaque dirigeant a, certes, le droit à la parole, il n'a pas le droit, cependant, à un traitement de faveur. Jenayeh n'est pas le seul à vouloir détourner les médias et les journalistes sportifs, pratiquement tous les dirigeants le font. Et, malheureusement, les médias et les journalistes sportifs sont passifs, peu solidaires entre eux face à cette tentative de domination. Et, puisque c'est un secteur où les intrus se font nombreux, tout se mélange. Demain, le public étoilé ne va pas être tendre avec la Télévision nationale après cette attaque. Qui va protéger les journalistes s'ils sont agressés dans n'importe quel stade? Qui va garantir une liberté d'opinion du journaliste qui ne vas pas être confondue avec le cliché «fixation sur le club»? Les médias sportifs sont en grand danger aujourd'hui. Un danger interne (un métier, un profil et une éthique qui ont du mal à être définis) et externe (pression des clubs, du public, des sponsors et de perception collective).