Après une tournée estivale dans plusieurs villes du pays, «Chérifa 3fifa», mise en scène de Mounir Argui et produite par BTL Tunisie, a débarqué, mercredi dernier, sur les planches du Théâtre municipal. Le public était au rendez-vous pour faire le plein d'humour et de rire. Elles sont deux femmes de gros calibre bien en chair : Chérifa et Afifa. L'une et l'autre se retrouvent dans un poste de police pour déposer une plainte contre leurs amoureux qui, fuyant le mariage, ont pris la poudre d'escampette. Les policiers sont en grève ce jour-là. Elles décident alors de se confier. Chacune d'elles raconte son histoire et son vécu. Chérifa (Manel Abdelkaoui) raconte ses déboires aux députés de l'Assemblée constituante et à l'un des comités postrévolution, alors que Afifa (Hanen Chograni), originaire du nord-est, expose sa mésaventure à la télévision dans les programmes de téléréalité et aux réseaux de corruption du pays. Liberté de ton Le texte écrit par Naoufel Saaf se base sur une nouvelle réalité postrévolution. La police en grève, ce qui était impensable à une époque antérieure. C'est bien simple, le sujet était tabou et aucun artiste n'avait l'audace d'aborder la question. Les temps ont changé et la liberté de ton avec. Désormais, la police dispose d'un syndicat et peut se permettre de faire des grèves et des sit-in et l'artiste est libre d'en parler sans la crainte de se faire censurer. L'auteur a choisi, ici, le parti d'en rire non pas de la police mais des députés de l'Assemblée constituante en révélant leurs débordements et leurs frasques. Conservateurs et libéraux expriment leurs points de vue divergents sur le sujet du mariage de manière excessive et dans un chaos indescriptible. Les premiers sont pour la polygamie tandis que les seconds opposent un «niet» catégorique. D'autre part, l'auteur tourne en dérision certains programmes de télévision notamment la téléréalité, qui, pour gagner des taux d'audience élevés, comptent sur les déconvenues des participants. Tout cela est rapporté de manière caricaturale en s'appuyant sur les jeux de mots et les métaphores. Cocasse et tendre Mounir Argui a, quant à lui, permis au duo d'actrices d'être l'une l'écho de l'autre. Manel Abdelkaoui et sa complice Hanen Chograni se sont éclatées en menant un jeu plein d'énergie et de nerf, interpellant de temps en temps le metteur en scène pour les besoins du spectacle. La pièce est également étayée de moments de danse formant des intermèdes entre une séquence et une autre. En gros, «Chérifa 3fifa» est une pièce joyeuse dans la forme mais assez cruelle dans le fond. Elle brosse le portrait à la fois cocasse et tendre de deux femmes au bord de la crise de nerfs que les deux comédiennes incarnent à merveille. Ce qui a conquis pleinement les spectateurs.