Le secteur bancaire en Tunisie est considéré, certes, comme l'un des piliers de l'économie nationale, mais il connait depuis des années d'importantes difficultés structurelles et notamment financières, pour la simple raison qu'il n'a jamais connu une réforme de fond. Depuis l'avènement de la révolution de 14 Janvier 2011, les experts ont découvert l'importance de la main mise du clan de Ben Ali sur le secteur bancaire, et précisément le secteur bancaire public. Les priorités des réformes économiques initiées par les gouvernements depuis 2011 et avec le concours de la banque centrale ont pris en considération la réforme du secteur bancaire et surtout celui du secteur public. Pour bénéficier de soutien financier, les bailleurs de fonds (FMI et Banque Mondiale) exercent des pressions pour mener des réformes radicales et permettre au secteur bancaire de jouer un rôle de locomotive dans l'économie tunisienne. Les dispositifs de la réforme du secteur bancaire ont été pris depuis les premiers mois après la révolution, mais en vain. Les réformes tardent à venir, notamment le fameux full audit des trois banques publiques et ses filiales (reste encore l'audit de la BNA qui traine). L'ANC, de sa part, a contribué au retard enregistré en matière de recapitalisation des trois banques (1000 million de dinars) en bloquant l'adoption de la loi régissant cette recapitalisation. Le projet de loi de finances pour 2015 a essayé d'intégrer certaines de ses réformes pour assurer les décaissements futurs de ces bailleurs. Des mesures qui demeurent cependant insuffisantes et pas courageuses. Le projet de loi de finances pour 2015 concernant le secteur bancaire prévoit la création de plusieurs pôles. Une stratégie adoptée afin de restructurer le secteur bancaire et instaurer de nouvelles structures, qui s'ajoutent à celles déjà existantes. L'actuel gouvernement a dressé depuis des mois un plan stratégique pour reformer la politique de l'Etat en matière de financement de l'économie, et couvrir les questions liées à la gestion financière et opérationnelles, pour assurer la solidité des banques publiques principalement dans le but d'améliorer sa gouvernance et sa gestion. A cet effet, le projet de loi de finances envisage la création d'un pôle constitué des banques à participation publique dans sa version universelle, dans le cadre d'un partenariat avec le secteur privé, et ce en concrétisation de la feuille de route validée dans le cadre d'un conseil ministériel tenu le 25 Août 2014. Il est à rappeler que les banques publiques jouent un rôle important dans le financement de l'économie tunisienne. Elles couvrent 36,9% des crédits consentis en 2012 aux entreprises et aux professionnels. Elles assurent, par ailleurs, le financement des principaux secteurs stratégiques à l'instar de la BNA qui couvre plus de la moitié des crédits orientés vers le secteur de l'agriculture et de la pêche, la STB qui contribue à hauteur de 36,7% dans le financement du secteur du tourisme et la BH qui accapare près de 20% des crédits octroyés au secteur de l'immobilier. Sur un autre plan, le secteur bancaire souffre depuis des années d'un taux élevé de créances douteuses. En effet, l'encours des créances aux professionnels impayées et en contentieux est passé de 3 928MDT en 2010 à 5 506MDT en 2012, soit une croissance annuelle moyenne de 18,4%. Le nouveau projet de loi de finances pour 2015 prévoit dans le budget de l'Etat la participation de ce dernier dans le capital du pôle de recouvrement. Sur la même lancée, le gouvernement provisoire prévoit la création d'un autre pôle public composé principalement de la caisse des dépôts et de consignation après la refonte de son rôle et l'élargissement de son secteur d'activité. Ces réformes prévues par le projet de loi de finances pour 2015 n'apporte pas de solution claires à certains autres problèmes du secteur banquier tels que le manque de liquidité très contraignant, ou les faiblesses constatées en matière de supervision qui dénotent de l'incapacité de la BCT à cerner la solvabilité des banques, ou bien aux problèmes liés au coût du financement de l'économie et de son insuffisance. S'il sera adopté dans sa version actuelle, le projet de loi de finances prévu par l'actuel gouvernement va certainement apporter un plus pour la réforme du secteur bancaire, mais n'apportera pas des réponses finales à des problèmes éphémères.