Les radios ont été beaucoup plus concentrées sur les législatives que les chaînes TV dont les plateaux ont, très souvent, viré au profit de la campagne présidentielle avant même qu'elle ne soit officiellement engagée Encore une fois, les médias audiovisuels sont mis à l'épreuve. Leur couverture de la campagne électorale des législatives du 26 octobre 2014 a fait l'objet d'un workshop interactif qui s'est déroulé hier matin à Tunis, en présence des professionnels du secteur. La Haica, la seule autorité régulatrice de ce métier, vient de présenter les résultats du rapport du monitoring sur le rendement des médias pendant les dernières législatives qui avaient, finalement, révélé tous leurs secrets. Il s'agit, à vrai dire, d'une étude du pluralisme audiovisuel dans son intégralité dont l'évaluation tient, essentiellement, à l'analyse des prestations médiatiques à titre qualitatif que quantitatif. Ce bilan a été, en fait, basé sur le principe du respect des normes déontologiques en vigueur, mais aussi les dispositions régissant l'audiovisuel telles que stipulées par la loi électorale et exigées par les décrets de la Haica. 14 chaînes TV et 8 radios Les principaux résultats du monitoring tels que présentés par M. Riadh Ferjani, membre de ladite instance, ont concerné 14 chaînes TV et huit radios dont le volume a porté sur un total de 800 heures de couverture électorale dont 200 diffusées sur les ondes des radios. L'objectif, selon lui, est de scruter la présence des candidats aux législatives et leur accès aux électeurs via ces médias. Cela étant, face à la caméra ou sur antenne, explique-t-il, l'importance du monitoring est de voir dans quelle mesure la couverture médiatique était en règle, conformément à la loi en question. Cela veut dire, d'après lui, la règle de l'égalité pondérée en fonction de la présence dans les médias des différentes listes électorales, toutes catégories confondues, selon leur répartition par circonscription. Force est de constater, ici, a-t-il encore ajouté, une certaine discordance, en termes de couverture médiatique de l'événement électoral. C'est que, faut-il le noter, les radios ont été beaucoup plus concentrées sur les législatives que les chaînes TV dont les plateaux ont, très souvent, viré de bord au profit de la campagne présidentielle avant même qu'elle ne soit officiellement engagée. Cette manière d'agir au détriment du droit du citoyen-électeur à l'information n'a fait que détourner son attention et le plonger dans la confusion d'idées. Quitte à tomber dans le contre-productif, au grand dam des temps alloués à la couverture des législatives. « Cela pourrait, partiellement, s'expliquer par l'obligation légale de diffusion des programmes d'expression directe propres à chacun des candidats en lice», a-t-il relevé. De même que la présence des femmes candidates dans l'espace médiatique a enregistré une nette régression, par rapport à la première semaine de la campagne électorale. Un tel rendement médiatique qui se voit décliner en surenchères partisanes a été, enfin, soldé par nombre d'infractions flagrantes. Sur ce point, le président de la Haica, M. Nouri Lajmi, a dénoncé le recours à la publicité politique, soulignant que des sanctions ont été décidées contre certaines chaînes TV qui en faisait usage. Parti pris ! D'autres abus ont été aussi constatés, à savoir les interviews fleuves, la diffusion en live des meetings politiques, ce qui pourrait être interprété comme une position tendancieuse, un parti pris en faveur d'un tel parti. De même, les sondages d'opinion censés être interdits en pareille circonstance n'ont pas manqué à la longue liste des défauts. Leurs auteurs ont fini par briser le silence électoral le jour du scrutin. « De bonne foi ou de façon malintentionnée, ces pratiques pseudo-journalistiques portent atteinte à l'éthique professionnelle des médias, il aurait fallu s'en passer», martèle-t-il. Surtout que la campagne présidentielle bat son plein, au grand jour. Il y va du droit, lance-t-il, de donner équitablement la parole à tous les candidats, en étant à égale distance et d'éviter ainsi les tiraillements politiques. Impartialité oblige. Ces résultats, malgré leur modestie, comme l'estime M. Ferjani, peuvent faire l'économie de beaucoup de débats sur la question, le pourquoi et le comment couvrir les élections. Cependant, en période électorale, la Haica, contrairement à ce qu'on pense, a moins de pouvoir que ne lui donne le décret 116. C'est, selon lui, le choix des politiques quand ils ont adopté la loi électorale. « Il y avait unanimité des parlementaires, toutes sensibilités confondues, sur le rôle à donner aux instances de régulation respectives, à savoir l'Isie et la Haica. Donc, s'il y a problème, c'est, tout d'abord, la loi électorale qui devrait être amendée dans ce sens, en accordant plus de pouvoir à ces instances, afin qu'elles fassent respecter la loi», conclut-il. Le débat a été ouvert aux journalistes concernés pour qu'ils s'expriment librement. Leurs critiques formulées à l'égard de la Haica et de son rôle à jouer fusaient ainsi de partout. Les professionnels des radios régionales ont, eux aussi, dit ce qu'ils avaient sur le cœur, lui reprochant son observation largement concentrée sur les médias locaux. Et les points de vue des experts en la matière ont relativement oscillé entre le positif et l'intolérable.